Le cas du café au Mexique
07 / 1998
Beaucoup de petits producteurs ruraux des pays en voie de développement cherchent à améliorer leurs revenus en cultivant des produits exportables. Toutefois, les structures du commerce mondial et l’instabilité des prix des matières premières les désavantagent. Deux types de pratiques socio-économiques se proposent de défier ce cercle de la misère : les producteurs s’efforcent eux-mêmes de s’organiser en coopératives de production et/ou de commercialisation, et des organisations sont apparues en Europe et en Amérique du Nord, dont l’ambition est de promouvoir à partir du Nord des relations commerciales plus justes avec les pays en développement (la philosophie qui les guide est celle dite du "commerce équitable").
Le Mexique, quatrième exportateur mondial de café, est aussi l’un des principaux terrains d’essai de la mondialisation. L’importance socio-économique du café dans les campagnes mexicaines est loin d’être négligeable ; les petits producteurs représentent 91,7 % des 282 000 producteurs nationaux, et le café leur permet de répondre à leurs besoins fondamentaux.
L’organisation des petits producteurs en coopératives de production et de commercialisation au Mexique et la naissance des premières organisations de commerce équitable au Nord apparaissent à la fin des années 1980 et début 1990, comme des réponses aux défis posés par la fin des accords internationaux sur le café (1989)et la libéralisation du commerce mondial, laquelle provoqua une chute brutale des prix mondiaux de 1989 à 1994.
Avant cela, la structuration de la filière était assurée par un organisme public, au Mexique, l’INMECAFE, qui disparut au début des années 1990. A ce changement brutal répond la constitution d’organisations de petits producteurs dans certaines régions : celles-ci essaient de combler le vide laissé par l’Etat. Leur mot d’ordre est "l’appropriation du processus de production", et elles se perçoivent comme des organisations sociales cherchant le bien-être de leurs communautés plutôt que comme des organisations corporatistes.
Des ONG du Nord avaient essayé auparavant de définir une stratégie pour un système plus juste pour les petits producteurs. La solution élaborée par une organisation pionnière pour le commerce équitable, Max Havelaar, est la définition d’un label indiquant l’acceptation par l’importateur-torréfacteur de certaines normes économiques et sociales.
Deux mouvements se rejoignent autour d’une communauté d’objectifs et de normes :
le label Max Havelaar oblige le torréfacteur à acheter le café vert directement auprès d’organisations de petits producteurs inscrits dans le Registre des producteurs de café Max Havelaar.
le prix d’achat, selon les conditions Max Havelaar, doit être fixé en accord avec les initiatives du commerce équitable. Cette condition vise à répondre à l’incertitude que représente pour le producteur l’instabilité des cours. Les organisations défendent une politique de prix minimum garanti, mais n’ont pas réussi à influencer la politique agricole nationale sur ce point. L’entrée du Mexique dans l’ALENA a signé l’abandon définitif d’une politique de soutien des prix sur les produits agricoles.
selon les conditions Max Havelaar, le torréfacteur est obligé d’accorder aux producteurs l’accès aux facilités de crédit en début de récolte, à concurrence de 60 % de la valeur du café acheté, et ce à des taux d’intérêt en vigueur au niveau international.
Les efforts d’organisation des petits producteurs et les initiatives de commerce équitable apparaissent largement complémentaires, sans parler des conditions posées par Max Havelaar.
Suite à des entretiens avec des membres des équipes des coopératives mexicaines, il ressort, d’une part, que la part de production vendue avec un label de commerce équitable est minoritaire (étroitesse de ce marché, la majorité du café est vendue aux Etats-Unis); d’autre part, que l’acheteur-importateur est parfois perçu comme étant en position de force et fixe les conditions de prix et de différentiel; enfin, que le contrôle des organisations inscrites dans le registre s’effectue régulièrement par la visite d’un évaluateur qui examine le niveau d’organisation des producteurs, le respect des principes de démocratie...
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, Mexique
Dans la conjoncture actuelle de prix mondiaux élevés pour le café, l’avantage du commerce équitable pour les petits producteurs n’est pas très important. Il est généralement plus rentable pour les organisations de mettre l’accent sur la qualité (production biologique...), et de chercher à améliorer leurs pratiques commerciales.
Les initiatives de commerce équitable constituent un appui utile aux organisations de petits producteurs ruraux, surtout quand elles sont au début de leur existence ou lorsqu’elles doivent faire face à un marché mondial déprimé.Mais elles rencontrent certaines limites à cause de la difficulté de changer le rapport de force au sein de ce commerce.
Il faut cependant reconnaître le mérite au commerce équitable d’avoir montré la responsabilité du citoyen consommateur du Nord vis-à-vis des conditions de vie au Sud.
Contact : Max Havelaar- France, 67 rue Robespierre - CAP 122 - 93100 Montreuil. Tel 01 48 51 69 90. Fax 01 48 51 52 73
Articles et dossiers
JOHNSON, Pierre, Le "commerce équitable"face aux défis du marché global. Le cas du café au Mexique in. Economie et humanisme, 1998/04/ (France), 344
CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - France - cedal (@) globenet.org