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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

L’Union Européenne enfermée dans une logique peu compatible avec les réalités du Sud

Eléments significatifs pour un changement

Jean Jacques GUIBBERT

01 / 1999

Responsable actuellement à Enda PPU au Sénégal, j’ai travaillé précédamment au Maroc, où j’ai lancé une antenne d’Enda . Nous étions donc une toute petite équipe avec des petits projets. Comme nous étions une institution au début de son histoire, en train d’identifier des processus naissants, nous avions besoin de financements modestes et nous nous sommes adressés à la délégation locale de la UE.

De cette relation, j’emettrai deux observations:

* La première, c’est que la UE ne voulait pas prendre en compte nos projets parce que les financements étaient trop modestes. Cela correspond probablement à une orientation stratégique claire et à un goût du risque relativement peu élévé.

Pour eux,les petits projets n’ont que de petits impacts et ils ne décident de s’engager que lorsque les impacts sont significatifs. Ils mesurent cet impact en fonction du volume de financement du projet qui leur est soumis. Or ceci était très difficile pour nous au Maroc, où les réalités sont telles que les organisations n’ont pas toujours les capacités de faire de gros projets. Et puis qui dit impact significatif, ne dit pas nécessairement gros programmes.

* La deuxième : nous avions tous le sentiment que la délégation n’avait aucune indépendance par rapport à Bruxelles et qu’elle n’avait aucune marge de manoeuvre. Alors, à quoi servent-elles?

En tant qu’ENDA Maghreb, nous avons été aussi partie prenante d’un vaste programme inter-antennes d’ENDA, le PRECEUP, financé par l’Union Européenne. A travers cette relation indirecte, puisque ce programme était géré via notre délégation à Paris, on a pu aussi mettre le doigt sur quelques éléments :

* D’abord, le contrôle financier et le système mis en place autour des justificatifs a été vraiment très lourd . On passe un temps fou à devoir justifier la moindre dépense et cela demande une énergie considérable.

* D’autre part, il y a rarement un débat qualitatif. A cet égard, nous avons eu une expérience assez intéressante. Dans le cadre du PRECEUP, un comité de pilotage a été mis en place et lors d’une des rencontres de ce comité à Bogota, un fonctionnaire de l’Union Européenne était présent. Un débat avait été lancé sur la question: comment faire en sorte que les gens de la commission soient davantage partie prenante et participatifs par rapport à des questions de fonds, de stratégies, d’orientations et pas uniquement des contrôleurs.

L’idée avait surgi de faire du PRECEUP un projet pilote où l’on pourrait expérimenter d’autres relations de partenariat avec l’Union Européenne à travers le financement de ce programme. Mais cela n’a jamais été possible. Je ne sais pas très bien pour quelles raisons mais en tout cas, on voit bien les difficultés que cela représente que de vouloir changer les logiques institutionnelles.

* Un dernier point que je voudrais signaler. Pour nous, ONG du Sud, le passage obligé par une ONG du Nord pour avoir accès au co-financement de l’Union Européenne est complètement artificiel. Les rapports sont faussés et on ne voit vraiment pas ce que cela apporte si ce n’est que l’ONG du Nord prélève sa dîme au passage. Pour nous, c’est aussi très lourd parce que nous avons un intermédiaire de plus, avec ses propres logiques, ses propres systèmes dans lesquels nous devons encore nous mouler. Ce n’est vraiment pas une bonne chose. Nous pensons qu’il faudrait changer cela.

* Et pour terminer, la lenteur des procédures. Le délai entre le moment où on introduit le projet et le moment où on reçoit l’argent est tellement long que seules des organisations qui ont de grosses capacités peuvent tenir le coup.

C’est dommage parce que ce n’est pas nécessairement la taille d’une institution qui reflète sa valeur et son sérieux.

Mots-clés

politique internationale, coopération UE ACP, développement urbain, ONG


, Maroc

Commentaire

En résumant,

* Système de contrôle financier beaucoup trop lourd.

* Logique quantitative et pas qualitative.

* Critères du "Bon projet"définis unilatéralement: .

* Les intermédiaires font souvent écran aux capacités propres des organisations du sud.

* Les logiques institutionnelles empêchent un véritable partage des stratégies avec les bailleurs de fonds.

Notes

[Fiche produite dans le cadre du débat public "Acteurs et processus de la coopération", appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé (relations Union Européenne/Pays ACP). Lancé à l’initiative de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen et soutenu par la Commission Européenne, ce débat est animé par la FPH.]

Source

Texte original

ENDA PPU (ENDA Prospective Populaire Urbaine) - Dakar, SENEGAL - Sénégal - www.enda.sn - ppu (@) enda.sn

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