La viande de porc est très prisée dans la région du Sud Cameroun. Les conditions d’élevage de cet animal y sont favorables mais cette activité n’y est pas très développée. A Sangmelima, dans cette région du Sud Cameroun, l’Union Européenne (UE)finance un projet pôle de Développement Rural (PPDR). Parmi les activités mises en oeuvre dans le cadre de ce projet figure en bonne place l’élevage et particulièrement celui des porcs. Il existe un besoin réel et manifesté par rapport à cette activité. Cela se justifie par un engouement vif des populations autour d’elle au début du lancement du projet. Beaucoup d’espoirs ont été fondés sur cette activité et tous les moyens ont été mis à la disposition des bénéficiaires pour assurer une réussite sans tâche du volet élevage de porc parmi les actions du pôle.
Après quatre mois, les porcelets étaient déjà bien gros pour être mangeables. C’est bien cela qui fut fait car au moment de l’évaluation toutes les porcheries étaient vides. La première génération de porcs était passée dans la marmite. Cette situation ne manqua pas de déconcerter les responsables du pôle et de la délégation de la commission Européenne, au regard de tous les soins et de l’intérêt qu’ils y avaient placés. La conclusion logique fut tirée : le financement de l’élevage du porc est supprimé dans le pôle Sangmelima.
Sur le plan pratique, l’activité était bien menée et le résultat était bon, c’est l’esprit des bénéficiaires qui a fait capoter le projet. Le besoin auquel il cherchait à répondre resta sans solution. Après que les bénéficiaires de ce projet aient pris conscience du problème, ils ont commencé à assaillir le Coordinateur du projet de demandes de réhabilitation de leurs anciennes porcheries. Ce dernier se trouva dans l’impossibilité de financer une activité qui n’était plus au programme. Quand il fit état de cette situation aux responsables de la délégation, les résultats de l’évaluation des activités passées ont suffi pour qu’ils comprennent leur position : l’élevage des porcs est une activité non viable dans le pôle de Sangmelima. Voilà une situation où le Coordinateur du projet se trouvait devant un dilemme. D’une part, il y avait la pression trop forte des populations qui réclamaient avant tout la réhabilitation de leur porcherie, travail qu’elles ont déjà commencé à réaliser sur leur propre financement et dont-elles n’attendent qu’une petite subvention du pôle. D’autre part, il y a le bailleur de fonds qui ne veut plus engouffrer son argent dans un projet qui a déjà montré ses faiblesses. Il réussira après tout à obtenir de la délégation de l’Union Européenne un accord de réhabilitation des porcheries mais cette activité restera marginale par rapport aux priorités quelque soient les attentes des bénéficiaires.
politique internationale, coopération UE ACP, développement rural, projet de développement, élevage, porc
, Cameroun, Sangmelima
Il est difficile au regard de la diversité des situations et de la complexité des comportements sur le terrain d’interpréter l’attitude des populations par rapport à certaines actions. Les expériences de terrain ne sont pas immuables et pour que les actions posées dans le cadre d’un projet soient valorisées quelque soit leur issue, il faut comme le signale le Coordinateur de PPDR de Sangmelima"chercher à comprendre d’abord ce qui déplaît au paysan avant de chercher ce qui lui plaît". Les populations de Sangmelima aiment bien manger la viande de porc, mais leur plaît-il d’élever le porc sur l’instigation et la surveillance stricte d’autres personnes ?
Du fait de la complexité des expériences de terrain une marge de manoeuvres assez large permettrait à ceux qui pilotent les projets de les adapter aux défis à relever, seulement doit-on attendre d’eux un résultat à hauteur du degré de liberté de décision qu’ils ont pour piloter le projet. Il ne faut pas laisser à ceux qui exécutent un projet la liberté de justifier leur mauvais résultat sur le dos d’un manque de marge de manoeuvre que ne leur à pas donné la hiérarchie.
Entretien avec le Coordinateur du PPDR Sangmelima.
[Fiche produite dans le cadre du débat public "Acteurs et processus de la coopération", appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé (relations Union Européenne/Pays ACP). Lancé à l’initiative de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen et soutenu par la Commission Européenne, ce débat est animé par la FPH.]
Entretien
CANADEL (Centre d’Accompagnement de Nouvelles Alternatives de Développement Local) - BP 3799 Yaoundé. CAMEROUN. Tél. : (237)221 31 40 / 200 38 74 - Fax : (237) 220 55 20 - Cameroun - www.canadelcam.org - contact (@) canadelcam.org