L’univers personnel et les problèmes familiaux dans l’exclusion

Suite à une recherche-action menée dans le bassin d’emploi de Cahors (département du Lot, France)entre 1987 et 1992 lors de laquelle 60 entretiens autobiographiques et les réponses à 80 questionnaires ont été recueillis, les résultats suivants ont pu être dégagés quant à la place tenue par l’univers personnel et les problèmes familiaux au regard de l’insertion et de l’exclusion.

Le vécu familial antérieur (niveau d’éducation des parents, situation familiale, origine étrangère...)est un facteur qui peut favoriser l’exclusion de l’individu. Il se dégage aussi une logique de reproduction sociale. Les deux tiers des interviewés ont connu une socialisation fortement perturbée (parmi ces derniers, la moitié a connu un placement en foyer).

Le vécu actuel est marqué par l’importance des relations familiales et/ou affectives pour "vivre quand même", pour affronter l’exclusion économique. On peut signaler que 40 % des interviewés ont connu des problèmes de santé (dont les 3/4 sont des problèmes psychiques): le lien entre parcours de vie et dégradation de la santé apparaît évident.

Le développement intellectuel est un enjeu : certaines personnes le considèrent comme une condition de maîtrise de leur vie d’autonomie, d’autres comme rendu possible par un réel projet professionnel.

Du point de vue affectif, nombreux sont les interviewés qui manifestent une instabilité certaine (peur, méfiance, repli sur ses enfants), une grande sensibilité au jugement de la société, l’humiliation de l’assistanat, etc.

En ce qui concerne leur vision de l’avenir, le couple et la vie communautaire apparaissent comme un rempart face à la solitude. La famille d’origine, souvent, permet un repli, constitue un refuge.

Les données recueillies suggèrent les points suivants :

- Orienter les situations personnelles et familiales pour favoriser l’insertion suppose au premier chef une stratégie de micro-développement par petits groupes en fonction des problèmes révélés, en tenant compte de l’incidence très forte des différences de catégories sociales et de milieux. On peut ainsi agir en amont de détériorations difficilement réversibles.

- Les modèles de vie personnelle et familiale renvoient à une mise en question de la société de consommation de masse, au soutien de stratégies alternatives pour la gestion des ressources et des budgets domestiques.

- La santé et l’équilibre physique et mental sont en relation étroite avec l’insertion ou l’exclusion, et le chômage pèse lourd en ce domaine. Là encore, une autre approche de la santé et du développement corporel visant à l’autorégulation de la personne est indispensable.

- Les conditions de logement font partie du "tableau clinique". Elles concernent notamment la nécessité d’une image valorisée de soi dans un espace réellement approprié pour pouvoir rencontrer les autres. L’exclusion et le chômage pénalisent les conditions de vie à ce niveau qui retentit à son tour sur eux...