04 / 1998
L’ouvrage traite des droits linguistiques et du droit à l’éducation, notamment en ce qui concerne l’enseignement primaire et secondaire dans cinq États plurilingues. Le contenu linguistique des droits à l’instruction et à l’éducation coïncide, tel qu’ils sont reconnus dans les Constitutions des États étudiés, avec le contenu reconnu à ces droits dans le droit international.
L’étude des droits linguistiques et du droit fondamental à l’éducation exige de déterminer le contenu linguistique de ce dernier. Le contenu proprement linguistique du droit à l’instruction et à l’éducation correspond, tout simplement, au droit de l’enfant à être scolarisé dans une langue que lui soit compréhensible. Cependant, ce droit ne signifie nullement que les enfants ont le droit de recevoir l’enseignement dans leurs langues maternelles. Les droits à l’instruction et à l’éducation garantissent l’accès à l’enseignement, quelque soit la langue utilisée, du moment que celui-ci est compréhensible et qu’il permet d’assimiler les contenus et les connaissances des programmes. Aussi, un modèle dans lequel l’enfant est scolarisé dans une langue autre que sa langue maternelle n’est pas forcement contradictoire avec les droits à l’instruction et à l’éducation. Les droits à l’instruction et à l’éducation ne garantissent pas davantage le droit à choisir la langue d’enseignement, car ce droit, ainsi que le droit à un enseignement dans la langue maternelle, ne découlent pas du droit à l’éducation.
Les mêmes conclusions peuvent être tirées par rapport au droit des enfants au développement intégral de la personne humaine. Celui-ci ne garantit pas non plus le droit à choisir la langue d’enseignement, pas plus que l’enseignement dans la langue maternelle. Ce que le droit au développement intégral de la personne humaine pourrait impliquer, c’est le droit des enfants appartenant à des minorités linguistiques à recevoir l’enseignement de leur langue propre lorsqu’ils sont scolarisés dans le territoire historique de leur communauté.
Les contenus linguistiques découlant des droits à l’instruction, du droit à l’éducation et de la garantie au développement intégral de la personne humaine sont, somme toute, d’une portée assez limités. Des principes et des valeurs constitutionnels tels que la liberté avec son dérivé qui est la liberté de la langue , la démocratie, la protection du pluralisme culturel et linguistique, la protection des minorités, l’égalité et la non-discrimination, la territorialité linguistique, permettent, en revanche, de déterminer la constitutionnalité et la légalité des modèles linguistiques et d’enseignement. C’est cette démarche qui a été adoptée par les tribunaux qui ont eu à trancher sur ce genre de question, notamment par la Cour européenne des droits de l’Homme.
Étant donné que chaque situation sociolinguistique exige un système d’enseignement particulier et différencié, il faut éviter que des conventions internationales imposent un modèle linguistique et d’enseignement unique. C’est ce qui pourrait arriver si une convention devait reconnaître le caractère général et sans nuances du droit à la libre élection de la langue d’enseignement, ou le droit de chaque groupe linguistique en contact avec un autre de recevoir l’ensemble de l’enseignement dans sa langue.
multilinguisme, droit à l’éducation, langue maternelle, droits des minorités, enseignement, politique de l’éducation, linguistique
Les propositions de l’auteur sont en contradiction avec la Convention sur la lutte contre la discrimination dans l’enseignement, car l’exercice des droits qu’il propose ne dépend pas de l’initiative privée de la minorité, mais il s’agit de vrais droits, qui obligent les pouvoirs publics à fournir les services nécessaires pour leur mise en oeuvre. De plus, cette convention ne reconnaît pas explicitement le droit des enfants appartenant à une minorité à recevoir une partie de l’enseignement dans leur langue.
L’enseignement étant l’un des mécanismes les plus efficaces dans les processus d’assimilation des minorités linguistiques, il est clair que le problème des rapports entre droits linguistiques et droit à l’éducation est essentiel. En proposant qu’une future convention devrait établir le droit des enfants appartenant à une minorité linguistique à recevoir l’enseignement de leur langue, qu’une partie de l’enseignement soit effectué dans celle-ci, et à acquérir un bon niveau dans la langue de la majorité, l’auteur montre bien les difficultés pratiques inhérentes à l’élaboration d’un droit des minorités. Car, de par sa propre nature, les droits des minorités ne sont pas réductibles aux seuls droits démocratiques.
C.Cratchley est un sociologue chilien, spécialiste des questions touchant les minorités ethniques.
Livre
MILIAN I MASSANA, Antoni, Generalitat de Catalunya, Institut d'Estudis Autonòmics, DRETS LINGÜÍSTICS I DRET FONAMENTAL A L'EDUCACIÓ : UN ESTUDI COMPARAT : ITÀLIA, BÈLGICA, SUÏSSA, EL CANADÀ I ESPANYA, Generalitat de Catalunya, Institut d'Estudis Autonòmics, 1992