Du zinc pour soigner les enfants dénutris

Maigreur, retard de taille, fonte musculaire constituent quelques-uns des signes cliniques, dits «anthropométriques», de la dénutrition. Il en est d’autres, comme les retards intellectuels ou encore l’atrophie du thymus, petite glande située derrière le sternum et considérée comme le chef d’orchestre du système immunitaire. Cet impact des carences alimentaires sur l’immunité entraîne un risque accru de mortalité par infection. Ainsi, selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé), près de sept millions d’enfants dans les pays en développement meurent chaque année, victimes de l’interaction entre la malnutrition et les maladies parasitaires et infectieuses, dont certaines d’entre elles auraient pu être évitées, telles la rougeole, la diarrhée ou les infections respiratoires.

Très grave, l’immunodéficience acquise, corollaire de la malnutrition, est aussi très longue à soigner : ainsi que l’ont montré des chercheurs de l’Orstom (Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération)travaillant en Bolivie, les enfants dénutris restent immunodéprimés au-delà de leur récupération clinico-anthropométrique. Ceci expliquerait le nombre élevé des rechutes lorsque l’on ne tient compte que des seuls paramètres anthropométriques, gain de poids notamment, comme signes cliniques de la guérison.

Comment restaurer le fonctionnement du système immunitaire, gravement perturbé à la suite de carences alimentaires ? Les chercheurs du laboratoire de nutrition tropicale de l’Orstom, centre collaborateur de l’OMS, viennent de confirmer l¹intérêt du zinc dans le traitement de l¹enfant dénutri et de mettre en évidence qu¹un apport de zinc accélère la restauration des fonctions immunitaires chez les enfants souffrant de dénutrition. Ces résultats ont été obtenus à la suite d’une étude menée au Crin (Centre de réhabilitation immuno-nutritionnel)de l’hôpital materno-infantile German-Urquidi de Cochabamba en Bolivie en collaboration avec l’IBBA de la Paz (Instituto Boliviano de Altura), avec le soutien de l’Ambassade de France en Bolivie et d’une organisation non gouvernementale «Aux quatre coins du monde».

Cette étude a porté sur une soixantaine d’enfants soignés à l’hôpital German-Urquidi pour dénutrition grave. La moitié, qui a bénéficié d’un traitement enrichi d’un supplément de zinc (2 mg par kilo), a pu récupérer ses défenses immunitaires au terme d’un mois de soins alors que deux mois ont été nécessaires à ceux dont le traitement diététique était dépourvu de zinc. Chez les enfants des deux groupes, les signes clinico-anthropométriques de la dénutrition ont disparu après un mois de traitement.

Il apparaît donc que l’apport de zinc, qui stimule les défenses immunitaires, permet de faire coïncider la durée de la récupération immunitaire et celle d¹un retour à la normale des signes clinico-anthropométriques. Les traitements enrichis de zinc, peu onéreux (coût du supplément en zinc : 1 dollar par mois et par enfant)conduisent ainsi à raccourcir d’un mois le traitement hospitalier des malnutritions sévères, réduisant de moitié le coût de l’hospitalisation.