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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Petites et grandes entreprises dans l’industrie russe contemporaine

Une interprétation politique des réformes industrielles

Oxana DUVALOVA

10 / 1996

Longtemps on a considéré dans la soviétologie classique que le tissu industriel russe était composé de monstres industriels, fruits de la gigantomanie stalinienne et de l’industrialisation à outrance de l’URSS dans les années 1930. Pour H.Kroll par exemple, "la structure monopolistique de l’industrie soviétique est l’une des raisons-clé de l’échec des tentatives de réformes de M.Gorbatchev et de la détérioration de l’économie depuis 1988". L’enjeu de cette question est important : c’est celui du succès des réformes pour la transition de la Russie à l’économie de marché.

Des études récentes ont montré qu’en réalité, les entreprises industrielles soviétiques n’étaient pas beaucoup plus grosses que les entreprises industrielles américaines et que, au contraire, sur une même période, les plus grosses entreprises de l’industrie américaine tendent à être plus importantes en termes de salariés, de parts de marché ou de production que les entreprises russes ou soviétiques. En effet, le tissu industriel américain est caractérisé d’un côté par la prédominance d’une multitude de micro-entreprises (moins de 5 salariés)et de l’autre par l’existence de très grandes entreprises industrielle (plus de 10 000 salariés). A l’inverse jusqu’au début des années 1990, le tissu industriel russe est marqué par la quasi-inexistence de cette catégorie de très petites entreprises, mais dominé de façon écrasante par les grandes entreprises (2000-5000 salariés)et les moyennes (de 500 à 2000 salariés). Il n’y a donc aucun fondement à dire que l’industrie soviétique ou russe est celle où la concnetration est la plus élevée au monde, la seul chose qu’on puisse dire c’est que la nature du tissu industriel russe se distingue fortement de celle des pays occidentaux développés et en particulier de celle des Etats-Unis ; il est plus localisé marqué par le regroupement matériel des unités de production, alors que la concentration aux Etats-Unis est plus immatérielle, plus financière, donc beaucoup plus invisible.

Rétrospectivement il est donc surprenant de constater avec quelle ardeur on a promu la dissolution des plus grandes entreprises russes : la grande entreprises métallurgique de l’Oural,Ouralmach, a ainsi été divisé en plus de 16 ateliers qui sont devenus des entreprises autonomes. Parallèlement on a fortement encouragé le développement de la petite entreprise privée grâce à des programmes de soutien financier adoptés au niveau du pouvoir fédéral, comme de tous les Sujets de la Fédération. Au niveau local, de multiples associations de petits entrepreneurs se sont constituées : dans l’oblast’ de Sverdlovsk c’est le cas du Centre pour l’entreprise, en grande partie soutenu par le gouvernement local, ou encore de la Chambre des Petits Entrepreneurs qui est une structure privée. L’objectif commun de ces structures est de favoriser le développement de la petite entreprise, mais par des moyens différents : en exerçant un rôle de lobbying auprès des autorités locales, en facilitant la gestion quotidienne des petits entrepreneurs...

Par ailleurs, de nombreux programmes occidentaux et en particulier américains (G.Soros, le gouvernement des Etats-Unis)ou européens (TACIS..)financent la formation des petits entrepreneurs russes grâce à des stages sur place ou dans des entreprises américaines. Il apparaît donc que le thème de la petite entreprise tient une place très importante dans le discours sur les réformes économiques mais aussi dans les tentatives locales de restructuration du tissu industriel. Cependant les résultats économiques d’une telle promotion sont mitigés : la plus grande partie des entreprises "des nouvelles formes de propriété" ne dépasse pas 6 mois d’existence, en outre, à l’exception de quelques réussites exemplaires, du fait de leur faible outillage et de leur niveau technologique, elles ne peuvent produire que des biens relativement peu élaborés. Il est donc manifesté que la politique industrielle de destucturation des plus grandes entreprises et de promotion des petites était plus assise sur des motifs politique (liberté d’entreprendre, constitution d’une classe moyenne d’entrepreneurs libéraux...)que sur la stricte rationalité économique.

Mots-clés

entrepreneur, création d’entreprise, industrie, politique industrielle


, Russie

Commentaire

La restructuration du tissu industriel russe est fondamentale car elle conditionne l’insertion de la Russie dans la division internationale du travail et dans le commerce mondialisé : mais comment doit-elle se faire et selon quels principes, c’est une question qui reste encore largement débattue.

Source

Articles et dossiers

Monopoly and transition to the market in. Soviet Economy, 1991/02/07 (Etats Unis), 2; The Myth of Monopoly : a New View of Industrial Structure in Russia, Policy Research Working Paper, 1331, août 1994, The World Bank, Washington, USA.

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