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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Le symposium PRELUDE : recherches et actions, plantes médicinales africaines, santé humaine dans un contexte de développement durable

Georges THILL, Jean-Paul LEONIS

04 / 1995

Pourquoi un réseau comme PRELUDE traite-t-il du thème de la médecine traditionnelle?

L’histoire nous a légué de vénérables pharmacopées d’où la médecine moderne a retenu ce qui lui semblait rentable et bon.

Mais la médecine africaine est faite de phytothérapies locales, transmises oralement et qui parfois ont des résultats étonnants. Les praticiens sont appelés thérapeutes, guérisseurs, tradipraticiens ou herbalistes. A la différence de l’Asie et de l’Amérique latine, en Afrique le savoir populaire des plantes médicinales passe par la présence du guérisseur.

Ces praticiens africains, nous les avons côtoyés lors du symposium à Ouidah (Bénin)en mars 1995. Ils sont d’une utilité sociale indéniable. Leur âge dépasse souvent les cinquante ans (76%). Ils sont généralement masculins (85%)et leur savoir et savoir-faire sont souvent tenus secrets et transmis de père en fils (80%). Ils sont capables chacun de soigner de une à trois maladies (74%), de quatre à huit maladies (22%)ou davantage d’affections (4%). Certains d’entre eux ont une étonnante capacité d’observation des symptômes et une réelle connaissance des remèdes qu’ils utilisent; de même, ils ont un pouvoir de suggestion et de contre-suggestion important. Il n’y a guère de corrélation entre les praticiens d’une même ethnie ou d’une même région: on peut donc estimer que c’est surtout le hasard qui a fait qu’une même plante ait été découverte empiriquement pour traiter un même syndrome dans des régions ou pays différents, aux biotopes végétaux semblables.

Nous avons rencontré M. Ahidazan Djrade Albert, originaire d’une presqu’île au Tohonnou Tchiakpé-Codji près de Ouidah. Il nous a raconté dans sa langue fon comment il s’est décidé à devenir guérisseur. Son fils est tombé malade à l’âge de 10 ans et a refusé les soins traditionnels donnés chez lui, ils se rendirent alors d’un centre de santé à l’autre, ils ont même consulté un diététicien connu, Jean Pliya. En vain. Ce fils est resté malade jusqu’à l’âge de 34 ans et a fini par accepter de se soumettre aux soins phytothérapeutiques. En 5 mois il s’est vu guérir de son cancer du sang et de son anémie chronique.

M. Ahidazan est très connu dans son village et est considéré comme un homme riche, il a 3 épouses et 25 enfants, il est analphabète mais il envoie ses enfants faire des études.

Il dispose de la reconnaissance sociale de son environnement, mais, comme les autres tradipraticiens béninois, il demande à PRELUDE une reconnaissance scientifique et technique.

Les faiblesses des médecines traditionnelles disent leurs contempteurs, tiennent à ce qu’elles invoquent généralement comme cause des maladies des facteurs non matériels (ancêtres irrités, inimitiés personnelles, interdits violés, punitions pour comportement non conforme aux coutumes).

La question à se poser est de savoir comment maintenir la confiance qui s’établit avec ces initiés. Comment connaître leur savoir sans les offusquer.

M. Ahidazan nous a dit avoir plus confiance en nous, entendez ceux qui viennent d’ailleurs, que dans bien des chercheurs de chez lui. Selon son imaginaire: "Des livres se sont écrits, sur nous, sur notre savoir, et pour quelle reconnaissance?".

Mots-clés

médecine traditionnelle, transfert de connaissances, phytothérapie, valorisation des savoirs traditionnels, savoir traditionnel, médicament


, Bénin, Afrique subsaharienne, Ouidah

Commentaire

Puisque ces acteurs de la santé sont des seigneurs dans leur milieu, une consultation n’est pas payante, mais il faut laisser une offrande pour les services reçus. Il sera nécessaire de répondre à leur demande de formation et d’établir un climat de confiance entre praticiens traditionnels et médecine conventionnelle (la face cachée de l’histoire est que les médecins conventionnels viennent la nuit acheter des médicaments aux guérisseurs sans leur apporter de reconnaissance scientifique ou sociale). Si les deux médecines s’avèrent aptes à traiter des dysfonctions, des symptômes, pourquoi ne pas créer un "pool africain d’échange de savoirs"? En ce sens un symposium comme celui de Ouidah, de mars 95, où ce sont surtout des Africains: chercheurs, médecins, tradithérapeutes, qui ont pu se rencontrer et contrbiuer à ouvrir des champs nouveaux pour la santé.

Notes

Ahidazan Djrado Albert. B.P. 96. Ouidah. Bénin.

Entretien avec AHIDAZAN DJRADO, Albert

Source

Entretien

ALVAREZ, Marcia, PRELUDE

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