Louis Bikomen, docteur ès sciences économiques et chargé de travaux dirigés à l’Université de Yaoundé II signe des "Libres propos" dans le premier numéro de la revue "Afrique Education", propos qui visent à "comprendre l’échec des politiques agricoles et le malaise qui frappe les écoles nationales d’agronomie dans un continent essentiellement agricole et rural." Pour illustrer son propos, l’auteur cite les statistiques de l’annuaire 1992 de la CNUCED. 168 millions d’Africains souffrent de malnutrition chronique dont 40 de faim. L’âge moyen des agriculteurs est de 47 ans, l’exode rural jette les jeunes à la ville. 80% des cultures sont le fruit de la seule énergie humaine (pour les 4/5èmes celle des femmes)et 3% celles des machines agricoles. Les importations alimentaires vont doubler d’ici 2010. Pourtant, il existe un grand nombre d’établissements de formation dans le domaine de l’agriculture (élevage, eaux et forêts, médecine vétérinaire..). L’auteur attribue cet état de chose aux mauvais choix faits depuis les années 60 d’où "contradiction entre un besoin crucial de structures productivistes et le mauvais usage qui est fait des équipements et des ressources humaines". Au Cameroun par exemple, le ministère de l’Elevage, des Pêches et des Industries animales réclame des vétérinaires que lui refuse le ministère de l’Agriculture . Au Burkina Faso, le ministère de l’Enseignement est chargé de la recherche scientifique mais son autorité n’est pas reconnue par les autres départements ministériels techniques. Les jeunes ingénieurs agronomes, ne trouvant pas de fermes rentables, gérées par de vrais agriculteurs, deviennent des bureaucrates. L’auteur critique les cultures de rente destinées à l’exportation et déplore que les cultures vivrières ne figurent même pas aux programmes des écoles d’ingénieurs comme il fustige les plans d’aménagement structurel du FMI et de la BM. Notant que le café fournit l’essentiel des devises du Burundi (80%), de la Tanzanie (70%), du Rwanda (65%)et de l’Ethiopie (40%), il conclut:"..Un pays qui se cantonne dans l’exportation du cacao ou du café compromet sérieusement ses possibiltés de développement."
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Dans beaucoup de pays du Sud, l’enseignement supérieur agricole est le parent pauvre à l’Université. Héritage colonial du mépris du petit paysan local et du "fellah"? Origine urbaine des élites dirigeantes notamment au Maghreb? Ainsi, en Tunisie, on a amputé la magnifique et centenaire école d’agriculture de sa ferme pour construire un complexe sportif de prestige à l’occasion des Jeux Méditerranéens de 1968. Avec René Dumont, il faut noter aussi que nombre d’ingénieurs affectionnent les postes dans les bureaux douillets à air conditionné de la ville!
Il s’agit d’une nouvelle revue spécialisée publiée en France par des Africains.
Articles et dossiers
BIKOMEN, Louis in. AFRIQUE EDUCATION, 1993/08/00 (France), n°1