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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Le modèle japonais : perspectives d’avenir

Au Japon, l’économie nationale est soigneusement orchestrée, mais non planifiée

Pierre JUDET

09 / 1996

Le Japon a décidé d’être le N° 1, à partir d’un système empirique qui n’est ni idéologique ni

doctrinaire.

Le miracle japonais s’est déroulé au sein d’institutions traditionnelles existantes ; le centre d’intérêt n’étant pas une révolution politique et sociale mais un développement économique pragmatique.

L’Occident s’accroche au mythe selon lequel le miracle japonais ne peut durer car :

- il est fondé sur une main d’oeuvre bon marché... Mais une main d’oeuvre qui est bon marché au sens où sa qualité est plus élevée qu’ailleurs pour le même prix ;

- il est fondé sur l’exportation... Mais on oublie que les exportations représentaient 9,1 % du produit national brut en 1968, contre 20,8 % en 1931 ;

- il est fait d’imitation... Mais la Recherche-Développement est de plus en plus dynamique. Ce qui se traduit par la vente de brevets, l’assistance technique...

La réussite japonaise repose sur son caractère spécifique : une révolution pragmatique sans idéologie, faite d’ouverture et d’expérimentation, de sens aigu du travail en équipe, de familisme, de commercialisme.

La capacité d’ajustement, la patience, la persévérance sont les signes distinctifs d’un système qui a su absorber la culture chinoise puis la culture occidentale sans perdre sa propre essence originale.

Dans ce système, l’Etat est une des nombreuses expressions de la vie communautaire, pas plus coupé de tous les autres membres de la société que le village, l’école ou l’usine. L’Etat est une partie du tout comme tout le reste. La société japonaise n’est pas une agglomération d’instructions antagonistes, s’excluant l’une l’autre mais un tout intégré dont chaque composante est une manifestation où chacun participe à élaboration de la tâche parfaitement appropriée à son caractère et à son rang propres au sein d’un ordre hiérarchique et harmonieux.

Il n’y a pas d’hostilité entre gouverneurs et entreprises : "Ici nous coopérons aimablement". L’industrie, lancée par le gouvernement, suscite entrepreneurs, compétences, capitaux. Il n’y a pas de doctrine élaborée sur la distinction entre entreprises privées et entreprises publiques. Les attaches entre Etat et monde des affaires sont si étroites qu’il n’était pas possible de déterminer où l’un finissait et où l’autre commençait et peu de Japonais avaient le temps ou voyaient la nécessité de tracer le ligne de démarcation.

Cela n’a rien à voir avec les relations qui existaient dans les pays socialistes où Etat et parti étaient les maîtres ; ni avec le système américain de la fin du XIX° siècle où l’Etat était au service des entreprises.

Au Japon, il est difficile de distinguer le maître du serviteur. L’économie nationale est soigneusement orchestrée, mais non planifiée.

Mots-clés

Etat, Etat et société civile, développement culturel, développement économique, coût de production, croissance économique, système de valeurs, culture et développement, identité culturelle, dimension culturelle du développement, rôle de l’Etat, intervention de l’Etat


, Japon

Commentaire

Ce texte date de 25 ans mais il est toujours d’actualité ; ses analyses demeurent précieuses pour la compréhension du monde japonais et de l’Asie de l’Est.

Source

Articles et dossiers

GREGORY, Gene in. Futuribles, 1971/02/01 (France), 22

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