Au contraire des Etats-Unis qui prônent un Etat faible pour une société forte, l’Etat capitaliste développeur (CDS, Capitalist Development State)japonais est une sorte d’Etat révolutionnaire qui impose ses projets ou, tout au moins, joue un rôle de catalyseur
09 / 1996
Certains déplorent que le monde soit organisé en nations et non en un système unique et harmonieux sans frontière. On s’aperçoit après la chute du mur de Berlin qu’il est difficile d’assimiler le capitalisme japonais au capitalisme américain. Il est tout à fait illusoire de croire que de "plus en plus ils seront comme nous". Un système (japonais)où les dividendes sont inférieurs à 1% (3 à 4% à l’Ouest); où, entre 1986 et 1990 le stock de capital s’est accru de 42% au lieu de 22% aux USA est à l’évidence différent.
Le capitalisme japonais n’est pas un véritable capitalisme mais un capitalisme sous contrôle strict, un capitalisme du "rattrapage" marqué par des politiques industrielles axées sur la construction de nouveaux avantages comparatifs, où les entreprises sont moins orientées vers le profit que vers le gain de parts de marché. A la limite, les sociétés japonaises ne sont pas de type capitaliste. Comme une monarchie peut avoir un gouvernement démocratique, un pays peut avoir formellement un système capitaliste et n’être pas capitaliste. Un nouveau système s’est développé dans une coquille capitaliste.
Le développement japonais a bénéficié de l’impact des politiques industrielles dans le cadre de stratégies à long terme où une énorme masse d’épargne a été canalisée vers les "bonnes" industries.
C’est le Ministère de l’Industrie et du Commerce International qui a été le véritable cerveau ("administrative guidance"); quant au Ministère des Finances, il se compare lui-même à un bateau de guerre qui escorte un convoi de bateaux : les banques commerciales.
Au contraire des Etats-Unis qui prônent un Etat faible pour une société forte, l’Etat capitaliste développeur (CDS)japonais est une sorte d’Etat révolutionnaire qui impose ses projets ou, tout au moins, joue un rôle de catalyseur.
Selon Chalmers JOHNSON, la prochaine étape de l’histoire ne sera pas dominée par un Etat communiste ni probablement par un Etat capitaliste libéral. Il est plus probable qu’elle sera façonnée par un Etat capitaliste développeur.
Ce type de capitalisme asiatique compris comme une combinaison à la Japonaise d’un Etat fort de politiques industrielles, d’une économie de la production et d’une autonomie managériale semble appelé à tenir une place centrale dans l’enseignement que les économistes proposeront à leurs étudiants au cours du siècle prochain.
capitalisme, marché mondial, accès au marché, politique économique, politique industrielle, intervention de l’Etat
, Japon
Pour les économistes libéraux, ces analyses de Chalmers JOHNSON, constituent une véritable hérésie. Mais il semble bien que la "roue tourne" dans la mesure où, en 1997, le Rapport Annuel de la Banque Mondiale portera sur le rôle de l’Etat dans le développement.
Livre
JOHNSON, Chalmers, Japan. Who governs ? The rise of the developmental State, WW Norton and Company, 1995 (France)
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