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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Une malle pleine de savoirs, une grande richesse pour le quartier

Mettre en place les conditions de l’échange : respect, convivialité, droit à l’erreur, c’est permettre à chacun de découvrir ses propres richesses et les richesses de l’autre

Eugénie THIERY

11 / 1995

Meaux, une ville à la campagne, au milieu de la Brie en France. Dans cette ville un quartier isolé bâti de tours très hautes, très grises. La volonté des administrations a rassemblé ici des personnes en grande difficulté, ce qui donne aux habitants de ce quartier une représentation tout à fait dévalorisante de leurs aptitudes à apprendre et à entreprendre. Dans ce quartier, il y a un lieu que l’on appelle Centre Social et qui existe pour permettre le développement d’activités collectives. Ce Centre Social avait proposé des actions de formations aux personnes qui étaient inscrites au chômage depuis longtemps ; mais certaines de ces personnes qui auraient pu bénéficier de cet apprentissage permettant d’améliorer leurs chances de retrouver un emploi n’avaient pas suffisamment confiance en leurs capacités et en celles des formateurs pour tenter une nouvelle expérience d’apprentissage. D’autre part les multiples cultures présentes dans ce quartier avaient engendré des cloisonnements entre elles et elles ne se reconnaissaient pas bien alors qu’elles se côtoyaient quotidiennement. J’ai donc proposé de mettre en place un Réseau d’Echanges Réciproques de Savoirs qui est une action fondée sur la conviction que chacun sait quelque chose et qu’en conséquence chacun peut être enseignant et enseigné et réciproquement.

Le Réseau d’Echanges Réciproques de Savoirs s’est développé et, grâce à sa dynamique, a pu mettre en place des échanges de savoirs collectifs. Pour qu’il y ait transmission, il fallait que les savoirs soient repérés, et cela donna à chacun l’occasion de se découvrir porteur de savoirs. Afin que les offreurs et les demandeurs échangent dans des conditions convenant à chacun, il était nécessaire de vivre la mise en relation et ce fut alors la découverte d’un système de relations paritaires et du principe de la réciprocité. Les divers ateliers (broderie, couture, cours de code, cuisine de tous les pays)ne sont pas des activités proposées par le Centre Social mais des activités mises en place à partir de la volonté exprimée des participants aux Réseaux d’Echanges Réciproques de Savoirs. Souhaitée, leur mise en place s’est construite avec et par les personnes qui allaient enseigner et s’apprendre mutuellement. Le processus d’ouverture de chaque atelier dans cette circonstance est tout aussi important que le fonctionnement de l’échange lui-même, car, à cette occasion, s’installe un apprentissage qui résulte de l’organisation ainsi qu’une culture de l’initiative collective et individuelle qui sera transférable dans d’autres temps de la vie économique et sociale.

Semaine après semaine, l’animation par ces échanges collectifs a donné une âme à la vie du centre social. Les échanges de cuisine ont permis la reconnaissance de cet aspect central dans la culture de Nezéhé qui a été appréciée pour sa méthode de feuilletage turque si fine, si complexe, mais si savoureuse. Kim An a offert chaque mardi son "savoir broder" tous les tissus et tous les fils. Voir son savoir reçu comme une richesse l’a valorisée. Cela a modifié son rapport à cette compétence, elle a osé demander la langue française pour pouvoir décoder les manuels de français. Ainsi ces ateliers sont devenus un lieu d’accueil et de convivialité pour les personnes s’approchant à petits pas de la démarche d’échange de savoirs. Ils ont permis, par la proposition tranquille, sans pression, faite à ces personnes, de devenir à leur tour offreurs et demandeurs dans le savoir de leur choix, de retrouver le goût d’apprendre et celui souvent neuf d’enseigner. Ils savaient que chacun pouvait s’essayer sans jugement dans le droit à l’essai et à l’erreur. Ils ont repris confiance et accepté de tenter l’aventure d’apprentissages plus longs et adaptés à leur projet de retour à la vie professionnelle.

Et moi, Eugénie THIERY, responsable des actions d’animation dans ce Centre Social, j’ai proposé alors ces ateliers comme des plates-formes d’envol pour des départs en formation, mais aussi pour des arrivées ou sorties de formation (en attendant de trouver du travail pour que le savoir ne se perde pas).

Mots-clés

échange de savoirs, réseau d’échange de savoirs, réseau de citoyens, réseau d’échange d’expériences, rapport au savoir


, France, Meaux

Commentaire

Dans beaucoup d’autres endroits en France, comme dans les ateliers du Centre Social Pierre Collinet à Meaux, des personnes ont retrouvé confiance en leurs capacités à transmettre et à apprendre simplement en rassemblant leurs savoirs. Tous ensemble, ces savoirs ont constitué une ressource d’une grande richesse et d’utilité véritablement sociale pour la communauté.

Notes

Le MRERS est une association créée par Claire et Marc HEBER SUFFRIN en 1985 et qui fonctionne sur un mode de réciprocité ouverte, chaque participant étant à la fois offreur et demandeur de savoirs. Les fiches ont été produites dans les ateliers d’écriture de ce réseau.

Source

Récit d’expérience ; Texte original

(France)

MRERS (Mouvement des Réseaux d’Echanges Réciproques de Savoirs) - B.P. 56. 91002 Evry Cedex, FRANCE - Tel 01 60 79 10 11 - France - www.mirers.org - mrers (@) wanadoo.fr

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