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Les implications économiques du problème de la drogue sur le continent latino-américain en 1992

Bernard OZANAM

07 / 1997

Par les ravages qu’elle provoque, la drogue est un problème fondamental de la société occidentale dans son ensemble. Parmi les accusés, les pays latino-américains figurent en bonne place. Ne sont-ils pas les principaux pourvoyeurs de cocaïne ?

Comme le rappelle Alain Labrousse (1), l’Occident a déclaré "une guerre sans merci aux narco-traficants", pensant ainsi éradiquer le fléau. Mais force est de constater avec l’auteur que la "narco-économie" gagne du terrain. En 1989, trois pays latino-américains étaient concernés par cette dernière : la Bolivie, le Pérou et la Colombie. Aujourd’hui, peu ou prou, elle a gagné l’ensemble du continent.

En même temps qu’elle s’étend, la narco-économie s’organise à l’échelle du continent. On distingue les pays producteurs, ceux plus spécialisés dans le blanchiment des narcodollars, enfin les pays exportateurs. Les pays les plus touchés sont les plus anciennement concernés, dès avant 1989. En Bolivie, nous rappelle Alain Labrousse, la drogue représente entre 1/3 et 50 % des exportations du pays, 50.000 ha sont concernés par la culture de la coca et 10 % de la population en vit directement. Ce dernier chiffre peut paraître modéré. Mais A. Labrousse ajoute que c’est l’ensemble de la population qui est concernée par les retombées de la narco-économie.

Le Pérou est encore plus frappé par cette dernière. La culture de la coca représente 150.000 ha et un chiffre d’affaires de 1.000 millions de dollars. Le phénomène se complique du fait du contrôle des principales zones de production par le "Sentier lumineux".

En Colombie, on a espéré le retour des capitaux avec la redition des narcodollars en 1990. L’échec des négociations sur le retour des capitaux a entraîné l’évasion d’Escobar de sa prison.

A côté de ces pays, les pays de la Plata (Argentine, Uruguay)se sont spécialisés dans le blanchiment de l’argent du trafic.

Le Chili et le Brésil sont, eux, concernés par la transformation et l’écoulement de la drogue. Les débouchés du trafic étant les pays européens : Suède, Allemagne et Portugal.

L’Amérique Centrale, enfin, est atteinte. A Panama, la drogue est vendue dans les bars. Le Mexique, lui, est concerné à la fois par le blanchiment mais aussi par la culture du pavot, les Mexicains enseignant même aux paysans les techniques de culture.

A quoi doit-on cette extension de la narco-économie ? Un élément de réponse nous est fourni dans la proposition que fit Escobar lors de son arrestation pour ne pas être extradé vers les Etats-Unis. Il proposait de payer la dette colombienne. La dette est, en effet, la base du problème. Non pas en elle-même, mais à cause des politiques économiques qu’elle a engendrées. En effet, confrontés à une crise économique sans précédent, qui a ruiné leurs économies, les pays latino-américians ont bientôt été incapables de rembourser les capitaux prêtés par le FMI et la Banque Mondiale, ni même d’en payer les intérêts.

Afin d’éviter un écroulement du système financier international, les organismes économiques internationaux ont imposé aux pays latino-américains des politiques d’austérité de plus en plus lourdes sur des pays chaque fois plus affaiblis. Aujourd’hui ces pays n’ont plus les ressources pour faire face. Il faut donc trouver d’autres moyens pour financer le service de la dette, la drogue en est un particulièrement rentable.

Mots-clés

drogue, géopolitique de la drogue, dette extérieure, lutte contre les trafics, annulation de la dette extérieure


, Amérique Latine

Commentaire

Si l’on veut enrayer l’extension de la narco-économie en Amérique latine, il faut s’attaquer au problème de la dette. Il faut que les pays latino-américains et leurs bailleurs de fonds : organismes financiers internationaux et pays du Nord, acceptent de renégocier les modalités de la dette. C’est à cette seule condition que la lutte contre la narco-économie aura une chance réelle de succès.

Notes

(1)A. LABROUSSE est le fondateur de l’OGD=OBSERVATOIRE GEOPOLITIQUE DES DROGUES, BP 190, 75463 Paris cedex 10. Tel 01 40 36 63 81. Fax 01 40 38 11 65. E mail 100347.3673@compuserve.com. On peut aussi consulter les fiches de l’OGD dans la base de données Dph (129 fiches en octobre 1997).

Entretien avec LABROUSSE, Alain

Source

Articles et dossiers

MARTINEZ, Jacqueline, CEDAL FRANCE=CENTRE D'ETUDE DU DEVELOPPEMENT EN AMERIQUE LATINE, Les ONG françaises et l'Amérique latine : nouveaux discours, nouvelles pratiques, CEDAL FRANCE in. COMUNICANDO (France), 20, spécial 1492-1992, vol.1

CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - France - cedal (@) globenet.org

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