Entretien avec des élus de Chambéry
09 / 1995
A l’initiative de Dominique LOCTIN, chef de projet du contrat de ville de Chambéry, rencontre et entretien croisé avec des élus de la ville : Thierry REPENTIN, adjoint à l’urbanisme et au contrat de ville ; Colette BONFILS, adjointe au logement ; Michel ROUX, à l’insertion et à l’emploi ; Marie-Claude TOUR, adjointe pour le quartier de Chambéry-le-Haut. Tous concernés par le contrat de ville, ils ont également vécu la période du DSQ de Chambéry-le-Haut et son évaluation.
Quels enseignements tirent-ils de l’évaluation du DSQ et comment envisagent-ils de l’aborder maintenant ?
* Thierry REPENTIN: - « En général les élus attendent de l’évaluation qu’elle les renseigne sur trois aspects : l’adéquation entre les attentes des habitants et les actions mises en uvre par la municipalité, le bien-fondé des investissements -le ratio investissements/population concernée- et enfin ce qui a marché ailleurs, dans d’autres quartiers, sur un aspect comparatif. »
* Colette BONFILS: - « Dans le secteur qui nous concerne, on a l’impression de faire beaucoup et d’avoir pourtant des retombées négatives de la part de gens qui nous disent « vous ne faites rien ». Mais je me demande quelle utilisation nous avons faite de l’évaluation du DSQ, en quoi nous nous en sommes servis pour guider l’action. Il faudrait pourtant que l’évaluation soit pragmatique et non pas intellectuelle. »
* Dominique LOCTIN rappelle que l’évaluation a eu des retombées pratiques immédiates puisqu’elle a servi à définir le mode d’organisation du contrat de ville).
* Michel ROUX rappelle quant à lui le foisonnement des évaluations conduites ces trois dernières années : l’évaluation du DSQ, celle du CCPD, celle du PLIE qui se déroule en continu ; d’autres à initiative nationale ou régionale ont inclus Chambéry parmi les sites d’étude : une évaluation sur dix années de dispositif « jeunes » , une autre sur les ZEP, la pré-évaluation de certains DSQ de la région en 1991. Unanimité pour souligner l’éclatement des commandes et en souhaiter une meilleure maîtrise : « nous avons besoin d’évaluations locales, avec un retour aux élus. »
METTRE EN PHASE LE DÉROULEMENT DE L’ÉVALUATION ET LA CONDUITE DE L’ACTION
Il faut dire aussi que ces évaluations ont débuté à l’automne 1993 alors que la déclaration d’intention du contrat de ville était déjà rédigée. De plus, les derniers résultats de l’évaluation sur « le ressenti des habitants, l’ambiance » se font attendre. Un retard qui permet d’alimenter le scepticisme ambiant sur l’utilité de l’évaluation. Déphasages préjudiciables : il convient d’anticiper le moment de la commande si l’on veut que l’évaluation serve la décision.
Michel ROUX - « Mais il me semble qu’au-delà de ces problèmes de délai d’exécution, nous ne sommes pas vraiment déterminés à nous saisir des résultats des évaluations. De plus, notre volonté politique de créer du débat public n’est pas très nette… Nous avons confié l’évaluation du DSQ et celle du CCPD au même cabinet. On dispose-là d’un matériau qui n’a pas toujours été pleinement utilisé. à l’inverse, j’ai l’exemple de l’évaluation du PLIE, qui se déroule en continu avec une réunion tous les deux mois. C’est une méthode qui permet d’avoir réellement des éléments pour piloter. De fait, le foisonnement des dispositifs, ce que Jean-Marie DELARUE appelle « l’effet mille-feuilles », renvoie à la question du pilotage municipal, de l’unité de décision. »
* Thierry REPENTIN: - « Je pense que l’évaluation doit être plus globale et capable d’inclure la part spécifique des PLIE, CCPD… dans la politique de la ville. Elle doit servir à la fois le conseil municipal et la population. On pourrait avoir des évaluations ponctuelles ou sectorielles, avec une évaluation plus générale qui récapitule, qui globalise. »
Parmi les évaluations thématiques, Marie-Claude TOUR cite « l’ambiance , c’est-à-dire la part qualitative des investissements et du fonctionnement… et aussi des éléments sur l’évolution des pratiques, des modes d’association et de regroupement des individus… »
On arrive ainsi à l’idée d’une instrumentation de l’évaluation au bénéfice de la collectivité locale ; ce que résume Dominique LOCTIN : « le contrat de ville est bien un dispositif partenarial, mais nous avons besoin avant tout d’une lisibilité ancrée sur le territoire municipal. » Ne pourrait-on imaginer une évaluation, qui, dans une forme à diffusion restreinte, donnerait des éléments d’orientation stratégique à la ville ? C’est le souhait émis par les élus.
ÉVALUATION, CONTRAT DE VILLE ET DROIT COMMUN
Pour les uns, c’est une question intellectuelle : « Dans le contrat de ville on a tout mis. C’est une question de priorités. On les établit de toute façon avec la programmation pluriannuelle. » Pour Dominique LOCTIN et Thierry REPENTIN, on ne discute pas assez des actions de droit commun et de celles qui ressortent du contrat de ville. Ce dernier ajoute :
« Le contrat de ville permet un affichage vis-à-vis de la population et des institutionnels. Il permet aussi la transformation des pratiques des élus et des services, un fonctionnement plus transversal, la pénétration des logiques de la population vers les élus sectoriels, ça sédimente les apports sectoriels. C’est de ce point de vue que l’évaluation doit apporter des indications. » Et Colette BONFILS de compléter :
« Avec le contrat de ville nous devons nous interroger sur la pérennité de la transformation des modes de fonctionnement des élus et des techniciens. C’est la question du long terme, qu’il faut tenir avec le court terme, la proximité, qui s’apprécie par la satisfaction des habitants. »
C’est à ce point que Marie-Claude TOUR fait part de son intention de proposer la création de commissions de quartier pour avoir la température du « ressenti », commissions dont la mise en uvre reste à définir.
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, France, Chambéry, Savoie
Articles et dossiers ; Entretien
CR-DSU, L’évaluation de la politique de la ville, CR-DSU in. Les Cahiers du CR-DSU, 1995/09 (France), n° 8
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