09 / 1995
"La pénurie croissante d’eaux douces et de qualité a été et sera à la base d’un nombre croissant de ce que l’on a qualifié "conflits verts".
A l’échelle nationale, certains estiment qu’en Algérie et en Egypte, deux pays qui connaissent de grandes difficultés d’approvisionnement en eaux, l’émergence de mouvements religieux radicaux, comme le FIS ou les Frères musulmans, est directement liée à la dégradation de la vie quotidienne due au manque d’eau.
En 1985 déjà, Boutros Boutros-Ghali, à l’époque ministre des Affaires étrangères de l’Egypte, déclarait que la prochaine guerre dans son pays serait due aux eaux du Nil -le plus long fleuve du monde, 6 648 km- et non pas à la politique. A bien des égards, l’Egypte constitue un cas extrême. La pluie y est rarissime et la vie des 57 millions d’habitants repose presque exclusivement sur les eaux du Nil dont aucune source -il faut le rappeler- ne se trouve sur le territoire égyptien. Avec une population qui augmente d’un million tous les dix mois, le pays connaîtra d’ici dix ans une situation où la demande dépassera les réserves disponibles. Les intentions soudanaises et éthiopiennes de construire des barrages sur les principaux affluents du Nil -le Nil Blanc au Soudan, le Nil Bleu en Ethiopie- n’ont jamais été prises au sérieux par l’Egypte qui connaît la pauvreté extrême de ces deux pays. Mais demain ? Les relations de l’Egypte avec le Soudan et l’Ethiopie seront plus que jamais dominées par la question du contrôle des eaux du Nil.
Par ailleurs, il est indéniable -encore que fort peu connu- que le contrôle du Jourdain entre le lac de Tibériade et la mer Morte, mais surtout celui des nappes aquifères situées en Cisjordanie, ont figuré, en 1967, parmi les objectifs de la guerre des Six-jours. La pénurie croissante d’eau douce dans l’Etat d’Israël est la raison majeure, sinon unique, du refus obstiné de négocier la restitution ou l’autonomie des territoires occupés. La récente signature d’un accord de paix entre l’OLP et l’Etat d’Israël ne remet pas en cause cette assertion. Ni la bande de Gaza, ni Jéricho ne contiennent de nappes phréatiques importantes. Je croirai à la volonté de paix de l’Etat d’Israël lorsque celui-ci transférera le contrôle des nappes phréatiques aux Syriens, sur les hauteurs du Golan, aux Palestiniens, dans l’ensemble de la Cisjordanie.
Il en fut tout différemment pour le désert du Sinaï qui contenait du pétrole et qui a été restitué. En ces lieux, le pétrole est bien moins précieux que l’eau."
conflit international, politique régionale, politique de l’eau, coopération
, Égypte, Israël, Palestine, Cisjordanie, Bande de Gaza, Jericho
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Articles et dossiers
LINTS, Frédéric, L'état de la planète ! Y a t-il des solutions ? in. Echos du Cota, 1994/12 (Belgique), N° 65
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