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TURQUIE : à quand la bio autonome ?

Christophe BEAU

05 / 1993

Une centaine de turcs : chercheurs et producteurs d’un côté. Une petite vingtaine de négociants et certificateurs européens à dominante germanique de l’autre. Bref, Agribio mediterraneo 92, relevait à Izmir d’une confrontation N-S en vraie grandeur. Eh oui. D’une part ceux qui cherchent des devises, des marchés, là où ils sont c’est-à-dire au Nord, et d’autre part ceux qui souhaitent alimenter chez eux la demande croissante de produits "propres".

L’agriculture biologique turque est à la recherche d’une certification reconnue au niveau européen. En résumé : vous voulez produire du produit de qualité bio pour nos consommateurs, nous allons organiser pour vous des règles de production, leur contrôle et des filières pour les écouler.

Cultures d’exportation.

Pour le moment en "bio", la Turquie produit essentiellement des fruits secs : raisins, figues, abricots, noisettes, pommes, amandes, sésame et pois chiches. Mais aussi coton et roses ! La culture la plus industrialisée au monde vire au vert ! Au total un millier de producteurs. Et une vingtaine d’entreprises opèrent à des degrés divers pour l’exportation de ces produits ; ce sont des sociétés de conditionnement et d’exportation pour une somme estimée à 15-20 millions de dollars. A ces sociétés correspondent des importateurs européens, chacun d’entre eux faisant appel à la société de contrôle de son habitude.

Ainsi neuf groupes de certification étrangers opèrent en Turquie. La prochaine étape sera la mise en place d’une certification natinale turque. Il y a en effet maintenant des gens capables et motivés. De plus, une certification locale reviendrait moins cher, serait sans doute plus efficace, plus écologique, et plus conforme à l’éthique déclarée de décentralisation.

Good Food Foundation : une vraie coopération N-S.

Au cours d’un débat entre sociétés turques d’exportation et importateurs d’Europe du Nord, il semblait évident que le marché est peu transparent. Les opérateurs turcs misent sur un marché en progression sensible et sont àla recherche de nouvelles opportunités commerciales, y compris sur le marché des fruits et légumes frais.

A l’opposé, les importateurs semblent être sur le recul, voir semblent décourager les initiatives par crainte de surproduction, et d’une qualité trop inégale pour les fruits secs probablement plus difficile encore à respecter pour le frais, en l’absence d’une chaîne du froid ! Alors comment faire pour établir un équilibre ?

Parmi les sociétés importatrices, "Good Food Foundation" mettait en valeur une démarche originale :

Associant 5 entreprises (anglaise, allemande, hollandaise, danoise et française : la société Wijaya), cette fondation, apparentée à un GIE met en commun des moyens de recherche ou d’investigation pour mettre en place des projets conformes à leurs intérêts en Turquie, en Inde, en Amérique Latine.

Chaque entreprise garde l’exclusivité de la distribution dans son pays, en s’engageant à promouvoir la gamme de ses partenaires.

Dans chaque pays un effort est fait pour déléguer l’assistance et la formation des producteurs. Good Food Foundation dispose ainsi de 4 techniciens turcs, dont 2 implantés dans la région d’Izmir.

A quand l’autonomie

Au moment où les services officiels de vulgarisation commencent à faire passer le message de l’intensification, la Turquie parviendra-t-elle à maîtriser de manière plus autonome le développement de son secteur "agrobiologique" ? : son profil technique, sa vulgarisation,... L’association turque d’agriculture écologique, ETO, par l’effort de rassemblement qu’elle représente, se pose actuellement en artisan de ce développement.

Mais ETO aura-t-elle les moyens de devenir l’organisme national de contrôle - certification, ou celle-ci restera-t-elle entre les mains d’organismes de contrôle étrangers, commandités par les sociétés d’importation ?

Quelle que soit la solution choisie, celle-ci est urgente, car à défaut de figurer sur la liste des pays tiers autorisés (où sont déjà inscrites la Suisse, l’Egypte et l’Argentine)la Turquie devra renoncer à l’exportation de produits bios.

Mots-clés

commercialisation, exportation, agriculture


, Turquie

Source

Articles et dossiers

BEAU, Christophe, 1992, n°3

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