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La pauvreté accroît la vulnérabilité des populations face aux catastrophes naturelles qui aggravent à leur tour la pauvreté

Tom ROBERTS

01 / 1994

La transformation d’un phénomène naturel en catastrophe dépend en grande partie du niveau de vie des pays et des populations concernées.

"A l’intérieur même d’un pays du Tiers-Monde, ce sont les groupes sociaux les plus misérables qui sont les plus exposés aux catastrophes", notent A. Wijkman et L.Timberlake. Ainsi, la majorité des 10 000 victimes du tremblement de terre de Mexico en 1985 se trouvait dans les quartiers populaires, les plus affectés par le séisme"

La situation est semblable au plan international, entre pays riches et pays pauvres : un tremblement de terre en Californie aura des effets limités alors que les conséquences seront dramatiques au Mexique ou en Iran.

Les cas du Japon et du Pérou, deux pays situés dans des zones de forte sismicité sont éloquents : entre 1960 et 1981, le Japon a subi 43 tremblements de terre et autres catastrophes naturelles ayant causé au total 2 700 morts soit 63 victimes par événement. Durant la même période, au Pérou, on dénombre 31 catastrophes, qui ont causé 91 000 victimes, soit en moyenne 2 900 par événement !

De tels exemples sont nombreux et tendent à démontrer que la fréquence des catastrophes naturelles qui frappent les pays du Tiers Monde et leurs habitants les plus pauvres ainsi que la gravité des dommages qu’elles provoquent ne résulte pas d’une sorte de malchance qui concentrerait sur le sud les "colères" de la terre et du ciel. L’inégalité face aux risques entre pays du Nord et du Sud et, au sein de ces pays, entre couches privilégiées et défavorisées s’expliquent par des niveaux différents de développement économique.

Ce "mal-développement" est un des facteurs principaux de la vulnérabilité des populations qui sont souvent contraintes à s’installer sur les terres les moins sûres, qui ont l’avantage d’être gratuites ou dont le loyer est modique. Il peut s’agir soit de zones inondables, soit de sites menacés par des glissements de terrains en cas de séisme ou de pluies diluviennes (versant de montagnes déboisées...), soit encore d’endroits dangereux situés à proximité de volcans mais dont les sols sont particulièrement riches.

Prenons un exemple qui éclaire le lien entre mal-développement, gestion de l’environnement et vulnérabilité : au Honduras, 4% environ de la population possèdent 65% des terres cultivables. Les Compagnies bananières détiennent souvent les meilleures de celles-ci. De ce fait, la population doit s’installer sur les versants des vallées et déboiser pour cultiver des céréales. Cette déforestation, aggravée par l’exploitation commerciale du bois, a provoqué un grave phénomène d’érosion et les rivières ont connu des crues plus fréquentes en raison des dépôts de sédiments. Lorsque le cyclone Fifi s’est abattu sur le pays en 1974, les fortes pluies ont transformé les versants en torrent de boue. Entre 4000 et 8000 personnes périrent et les dégâts sur le plan agricole ont été considérables.

L’habitat inadapté est aussi un facteur de vulnérabilité qui concerne essentiellement les populations défavorisées. En 1976, après le séisme du Guatemala, le directeur de l’USAID (agence dépendante du gouvernement des Etats Unis)notait : "L’impact destructeur du tremblement de terre a touché les maisons des pauvres. La majorité de la population du Guatemala habite dans des petites agglomérations ou dans la campagne, dans des maisons d’adobe. Plus de 150 000 sont tombées, estime le gouvernement".

Si un faible niveau de développement économique est la cause essentielle de la transformation de phénomènes naturels en catastrophes, ces dernières représentent à leur tour un frein considérable au développement des pays sinistrés. Il faut parfois plusieurs générations pour réparer les dommages provoqués par une catastrophe. Au Nicaragua, par exemple, les dégâts causés par le séisme de 1972 ont représenté 209% du PNB. Le tremblement de terre de Mexico, en 1985, a détruit, en une minute et demie, 15 000 immeubles, tué de 25 à 30 000 personnes, fait environ 500 000 sans-abri et provoqué 4,3 milliards de pertes. Le pays, parmi les plus endettés du monde, a vu brutalement s’alourdir sa dette de 15%.

C’est un cercle vicieux : la pauvreté accroît la vulnérabilité des populations face aux risques et les catastrophes aggravent la pauvreté !

Mots-clés

responsabilité citoyenne, politique de développement, paupérisation, catastrophe naturelle


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Commentaire

Le discours sur les liens existants entre l’urgence et le développement émerge progressivement depuis une quinzaine d’années. L’exemple des catastrophes naturelles illustre bien ces liens. Agir dans le domaine de l’urgence sans prendre en compte les contextes socio-économiques spécifiques ou les politiques de développement risque de se traduire par des actions aléatoires et peu efficaces face aux problèmes globaux.

Source

Littérature grise

AUI=Action d'Urgence Internationale, 1992/06

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