La légumineuse arborescente "Acacia albida" est qualifiée d’"arbre miracle du Sahel" à cause de ses multiples fonctions : il abrite sous son couvert les cultures vivrières, il sert au reboisement et fournit du fourrage. En 1991, le laboratoire de microbiologie des sols de l’ORSTOM de Dakar avait révélé l’existence, autour des racines de cet arbre, d’importantes populations de bactéries symbiotiques fixatrices d’azote, et ce jusqu’à 35 m de profondeur! Récemment, des recherches, en collaboration avec le même laboratoire, la station d’agronomie de l’INRA de Dijon et le laboratoire de phytonique de l’université d’Angers, ont mis en évidence une autre forme de symbiose : les mycorhizes, qui résultent de l’association entre des champignons vivant dans le sol et les racines des plantes. Chez l’acacia, cette symbiose existe depuis le niveau superficiel du sol jusqu’aux nappes phréatiques profondes; cette extension exceptionnelle est une nouveauté. Des études, très poussées, ont montré que ce phénomène a un impact non seulement sur l’acacia mais sur tout l’écosystème : la croissance des plantes cultivées (arachide, mil, riz...)est plus importante sous la frondaison des acacias. On peut supposer que le sol est plus riche en éléments minéraux, et donc plus fertile. Les mycorhizes, en puisant les éléments minéraux en profondeur, augmentent la teneur minérale des acacias, en particulier en phosphore, en cuivre et en zinc. A la saison des pluies, la décomposition des feuilles tombées au sol fournit ces éléments aux niveaux superficiels du sol. De plus, les plantes annuelles cultivées à cet endroit bénéficient directement de la présence des champignons symbiotiques qui peuvent coloniser leurs propres racines. Les mycorhizes associées à l’acacia possèdent donc une grande aptitude à restaurer la végétation des sols appauvris. On a aussi constaté que les plantes mycorhizées présentent des qualités agronomiques telles qu’une meilleure résistance aux pathogènes et au stress hydrique. L’étude de la symbiose mycorhizienne s’inscrit dans le cadre des études de l’Observatoire du Sahara et du Sahel, organisme de lutte contre la désertification créé en 1989 à Paris et qui associe 20 pays africains. Les chercheurs pensent que les champignons mycorhiziens performants constituent un allié sûr pour l’agriculture de demain dans ces régions d’Afrique, et qu’ils pourront remplacer les coûteux engrais.
Pour utiliser à grande échelle les champignons mycorhiziens associés à "Acacia albida", il faut produire massivement les spore afin de disposer d’un inoculum pour induire une mycorhization des plantes cultivées. Des fragments de mycorhizes sont, après divers traitements, encapsulées dans des billes d’alginate de sodium, et sont capables de germer et de produire in vitro des hyphes et des spores, rétablissant ainsi la symbiose mycorhizienne en présence de l’hôte végétal. L’inoculum immobilisé dans les billes garde son potentiel après plusieurs mois de conservation à +4°C.
fertilisation du sol, lutte contre la désertification
, Afrique, Sahel
Voilà un arbre du Sahel, indigène, capable d’aider au développement des populations de cette région. Il présente le grand avantage, en améliorant la fertilité des sols, de pouvoir, à terme, se substituer aux engrais qu’il faut importer avec toujours plus de devises. Tout en aidant à lutter contre la désertification, il permettra, grâce aux inoculums, d’augmenter la production des cultures vivirères.
Articles et dossiers
DIOP, Tahir A.; PLENCHETTE, Christian; STRULLU, Désiré G.; GUEYE, Mamadou; DREYFUS, Bernard L. in. LA RECHERCHE, 1994/10 (France), 269