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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

La crise de l’économicisme mécaniste

Thierry VERHELST

10 / 1993

Une rencontre entre théoriciens et praticiens sur le thème "L’économie populaire (dite informelle): constitue-t-elle un modèle ou une impasse ?" fut organisée par le Réseau Cultures en septembre 1993 à Bruxelles. L’économiste Marocain, Hassan Zaoual, enseignant à l’Université de Lille, y exposa ses vues sur la crise de l’économicisme mécaniste comme suit :"Pourquoi et combien a-t-on pris l’habitude, depuis le Siècle des Lumières et l’avènement du capitalisme, de considérer l’Economie comme un ensemble de mécanismes et de lois relevant d’une science distincte ? Avant cette période, l’Economie était étudiée dans le cadre des Sciences Politiques et Morales. Cette coupure entre l’Economie et d’autres disciplines fut inaugurée notamment par François Quesnay, médecin autant qu’économiste, qui introduisit dans son "Tableau Economique" l’idée de l’Economie comme un circuit régi par des mécanismes qui lui sont propres. Tel l’organisme humain, l’Economie relèverait d’un ordre naturel et même d’une loi naturelle identifiable et donc maîtrisable comme le sont les lois de la physique ou de la chimie. Cete vision mécaniste (la réalité est comme un mécanisme, avec ses relations de cause à effets)influença profondément les économistes libéraux dont le père fondateur de l’Economie Politique, Adam Smith. Les néo-libéraux actuels retiennent surtout son dernier ouvrage, "La richesse des nations", consacré aux lois censées scientifiques et universelles de l’Economie, avec le jeu de la "Main invisible" transformant l’ensemble des actions intéressées des citoyens calculateurs (homo economicus)en harmonie socio-économique. Par contre, sa "Théorie des Sentiments Moraux" est passée sous silence alors qu’apparaît dans cet ouvrage un Adam Smith économiste certes, mais aussi philosophe et moraliste ... Par le regard et la pratique économiciste actuels, l’homme est soumis à un savoir rigoureux certes mais réducteur. Depuis le 18ème siècle, l’Economie fut considérée en Occident comme une discipline autonome, "spère autoréférentielle" (c.à.d. qui trouve en elle-même ses propres références)et fondée sur une approche qui découpe un seul aspect de l’homme : son caractère marchand, intéressé, d’entrepreneur sur la base duquel l’homme, avant d’entreprendre, accomplit un calcul coût-bénéfices. Cette discipline est fortement marquée par le mythe occidental moderne de la maîtrise ("La connaissance nous rendra maîtres et possesseurs de la nature" disait déjà Descartes)ainsi que par le paradigme de l’homme atomisé et concurrentiel dont l’existence est due à la sélection naturelle (Darwin)et dont l’action est réglée par la division du travail, chacun produisant ou vendant ce pour quoi il dispose d’avantages comparatifs."

Mots-clés

économie, développement culturel


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Commentaire

Les échecs du développement au niveau "macro" comme au niveau de nombreux projets "micro" ainsi que les progrès de la Science la plus avancée (Astrophysique, Biochime, etc.)imposent une révision profonde du paradigme actuel : la vision d’une discipline économique autonome et mécaniste est dépassée. Aujourd’hui, le savoir est confronté au défi de la complexité, de l’interdépendance de toutes les facettes du réel. On ne peut plus comprendre ni agir sans une approche à la fois interdisciplinaire et interculturelle. L’Economie se doit aujourd’hui de renouer avec les valeurs humaines, l’éthique, le sens du bien commun ainsi qu’avec les cultures locales dans toute leur diversité.

Source

Compte rendu de colloque, conférence, séminaire,…

ZAOUAL, Hassan

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