Comment le changement climatique est un objet de négociation pour les entreprises européennes
Véronique Rigot, CNCD 11.11.11
12 / 2010
Dans les négociations internationales, chacun joue de ses intérêts. Une étude (1) récemment publiée explique pourquoi et comment les entreprises européennes financent ceux qui nient les changements climatiques. Retour sur les fondements de la controverse climatique.
Le jeudi 2 décembre était décerné à Bruxelles le prix du pire lobby climatique. Ce prix fait écho à une étude très récemment publiée par le Réseau Action Climat européen (CAN-Europe) qui explique pourquoi et comment les entreprises européennes financent ceux qui nient les changements climatiques et notamment les voix américaines opposées à une législation. Une balade dans les allées du « Cancun -messe », l’espace d’exposition de la Conférence des Nations Unies sur le climat, vous permettrait de recevoir des informations surprenantes… « Savez-vous qu’il y a des technologies pour inverser le réchauffement global ? », « le dioxyde de carbone, c’est la vie », etc. De nombreux spots (2) énonçant des « vérités » simples circulent également sur le web : « le CO2 n’est pas polluant », etc. S’il est indéniable qu’il n’y a pas de vie sans le cycle du carbone, et que le forçage des végétaux au CO2 est une technique agronomique connue depuis longtemps, il est tout aussi prouvé que l’accumulation du CO2 (et des autres gaz) dans l’atmosphère est responsable de l’accentuation de l’effet de serre, qui, s’il est indispensable à la vie sur la planète, risque également de l’anéantir si son effet est trop accentué. Tout est question d’équilibre, et toute information scientifique mériterait d’être replacée dans son contexte global.
Bref retour en arrière : dès la mi-2009, les médias ont relayé une large controverse médiatique. Depuis trop longtemps, tous les avis semblaient converger dans un seul et même sens : l’heure est grave, il faut un accord international. Les attentes pour Copenhague étaient démesurées et le terrain était alors prêt pour une crise de confiance.
D’abord, il y a eu le piratage de milliers de courriels et de documents scientifiques du Climatic Research Unit de l’University of East Anglia : le « climate gate » a contribué à semer le trouble dans les esprits à la veille de la Conférence de Copenhague. Ensuite, il y a eu l’échec de Copenhague lui-même : les Nations Unies en situation d’extrême faiblesse, incapables de réaliser les ambitions partagées par les peuples du monde entier, supplantées dans la dernière ligne droite par un petit groupe de pays puissants qui signent un « accord » pour sauver la face, Copenhague fut témoin de l’échec du multilatéralisme.
Le GIEC, bouc-émissaire
Un échec politique certes, mais aussi un échec médiatique, où l’attention démesurée pour le sommet a mis une pression stérile sur les négociateurs et leurs responsables politiques, pression qui s’est ensuite retournée contre un bouc-émissaire, le Groupe intergouvernemental des experts sur l’évolution du Mais contrairement à ce que prétendent certains climato-sceptiques, on a du mal à imaginer que les groupes de pressions les plus puissants dans ce débat soient ceux qui ont intérêt à renforcer la lutte contre les changements climatiques. Si le résumé varie parfois sensiblement du rapport détaillé, c’est plutôt dans le sens de minimiser la menace.
Offensive des climato-sceptiques
La controverse climatique a été largement alimentée par certaines figures médiatiques telles Claude Allègre, en France. Géochimiste de formation, ancien ministre de l’Education et membre de l’Académie des sciences, il a publié « L’imposture climatique », contestant le lien entre CO2 et changements climatiques, considérant que les nuages ou l’activité solaire ont des impacts plus déterminants, et dénonçant la mobilisation planétaire autour d’un « mythe sans fondement ». Fin octobre 2010, l’Académie des sciences française publiait un rapport (3)réfutant les thèses de Claude Allègre, réaffirmant que « la hausse du CO2, liée aux activités humaines, est la cause principale du réchauffement », et réaffirmant clairement les grandes conclusions du GIEC. Elle clôturait ainsi officiellement la polémique.
Certains climato-sceptiques sont encouragés par les groupes d’influence qui n’ont pas intérêt à voir le « business as usual » changer
Au Danemark et dans le monde anglo-saxon, c’est un autre type de climato-sceptiques qui a recueilli l’attention : Bjorn Lomborg (4), statisticien danois, professeur à la Copenhagen Business School, est l’auteur du livre « The Skeptikal Environmentalist » (5) qui questionne l’urgence d’agir contre le réchauffement global. S’il ne nie pas le réchauffement global (dont le débat est, selon lui, alimenté par la peur), il fait l’apologie de la recherche et de la géo-ingénierie et vante les solutions technologiques. Pour lui, nous pouvons continuer le « business as usual » car nous trouverons les solutions opportunes en temps voulu.
L’ombre des lobbies
Nul doute que certains climato-sceptiques sont encouragés par les groupes d’influence qui n’ont pas intérêt à voir le « business as usual » changer. Il en va ainsi des parlementaires américains qui reçoivent des financements de grandes entreprises européennes, afin de renforcer leurs voix contre la législation climatique (dont le projet de loi est actuellement en cours d’examen au Sénat). Le CAN-Europe explique pourquoi et comment les entreprises européennes financent ceux qui nient les changements climatiques et les voix américaines opposées à une législation (6).
L’influence des lobbies des grandes industries (chimie et pétrochimie, agroalimentaire, automobile, métallurgie, textile,…) est en effet une réalité à laquelle aucun pays n’échappe, pas même la Belgique. Ainsi, la proximité du parti de la ministre flamande de l’Environnement Joke Schauvliege et du Premier ministre Yves Leterme, avec certaines fédérations patronales flamandes liées aux grandes industries chimique ou automobile, n’est pas gage d’une grande indépendance dans la décision politique. Des lobbies à la controverse climatique, il n’y a donc qu’un pas. Un petit pas d’homme qui empêche de grandes avancées pour les 3/4 de l’Humanité qui subissent de plein fouet les effets des changements climatiques…
responsabilité sociale des entreprises, changement climatique, négociation internationale, multinationale, influence des médias
Pour une gestion durable et équitable des ressources naturelles
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Ingénieurs sans frontières www.isf-france.org
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Réseau ressources Naturelles en RDC www.rrnrdc.org
Ritimo www.ritimo.org
Walhi-Friends of the Earth Indonésie www.walhi.or.id
Autres sites internet d’information sur ces sujets
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