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Le processus de création de l’unité de défense des droits économiques, sociaux et culturels dans l’agriculture

Abdelhadi Bennis

11 / 2009

Plusieurs éléments fondamentaux sont à relever pour définir le cadre de travail.

  • Le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, tenu en 1992, a lancé le concept du Développement Durable intégrant les trois composantes économique, socioculturelle et environnementale. Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ont confirmé ce concept. Le Maroc y a adhéré et a pris des initiatives dans plusieurs domaines. Malgré les efforts entrepris, le pays reste aujourd’hui face à des défis majeurs relatifs à la compétitivité de son économie dans le cadre de la mondialisation, à la performance de ses politiques d’enseignement et de santé, à la gestion rationnelle de son environnement naturel, et surtout à la performance de son système de Gouvernance. Les expériences ont montré qu’en absence d’approche intégrée, toute stratégie d’action est vouée à l’échec.

    Dans le cadre de la stratégie de développement durable du Maroc, beaucoup d’études, de plans ont été élaborés, beaucoup d’institutions ont été créées, beaucoup de lois ont été adoptées, mais les impacts sur le terrain n’ont pas été bien visibles. Cela pose problème du mode de gouvernance alors même que la tendance est à parler de décentralisation et de travail de terrain.

  • Le milieu rural et le domaine de l’agriculture sont des aspects primordiaux dans le développement économique et social du Maroc. Le milieu rural qui regroupe près de la moitié de la population du pays, enregistre les taux les plus élevés des déficits sociaux, en termes de pauvreté, d’analphabétisme, de santé, de disparité entre hommes et femmes etc. Le secteur agricole qui représente le pivot de la vie dans ce milieu, souffre en plus, des aléas climatiques dont les menaces seront plus graves dans l’avenir, d’après les experts climatologues.

    Parallèlement à cette situation, l’avènement du Plan Maroc Vert en 2008 a produit beaucoup d’attentes. Pourtant le contenu détient des failles importantes. Le pilier 2 du Plan sur les Droits économiques et sociaux ne permet pas d’être effectivement appliqué au regard du budget alloué en comparaison au budget lié à l’agriculture moderne. De surcroit, les problèmes rencontrés par les petits agriculteurs ne sont pas réglés et les intérêts des ouvriers ne sont pas pris en compte.

    Le Conseil Economique et Social est appelé à se pencher sur l’ensemble de ces défis et à prêter une attention particulière au secteur agricole, car il s’agit de la sécurité alimentaire, domaine particulièrement sensible pour les marocains. Le Plan Maroc Vert, élaboré par le gouvernement, constitue une base de travail dont il faut appuyer les forces et pallier les faiblesses.

L’expérience de l’Unité de défense des droits économiques et sociaux dans l’agriculture

  • 1. La création de l’Unité via le programme Justice Economique d’Oxfam International

Oxfam International est particulièrement sensible au Développement Durable de l’agriculture sur la base du principe que la croissance de la production soit accompagnée de mesures du développement humain, au profit des classes démunies, et de la non-dégradation des ressources naturelles.

Pour la première fois, ses trois filiales Intermon Oxfam, Oxfam Novib et Oxfam Québec ont convenu d’intervenir ensemble dans un seul objectif qui est de développer un programme de Justice Economique dans l’agriculture, touchant les travailleurs(es) agricoles et les petits(es) agriculteurs(trices). Leur démarche est participative et met la société civile et la population cible au centre de la conception et de la mise en œuvre de son programme.

Oxfam International a lancé un appel aux ONG et aux syndicats. Un groupe dit «  Unité pour la défense des droits socio-économiques dans l’agriculture » a été instituée ; il regroupe, d’une part, 8 ONG et réseaux d’ONG dont 4 œuvrent dans le domaine des droits humains et des femmes et 4 dans le domaine du développement, et 2 syndicats. On souligne l’originalité de la constitution de l’Unité qui se distingue par la diversité des profils des membres qui ont souvent des démarches d’intervention différentes et qui n’ont que peu l’occasion de travailler ensemble.

Le groupe qui a bénéficié de l’expertise international d’Oxfam travaille depuis plus d’un an, de manière totalement bénévole. Il a réalisé les études de diagnostic de base pour arrêter les principes d’intervention. Il a à sont actif le bilan suivant :

  • L’étude des zones d’intervention qui a abouti au choix de la zone de Larache.

  • L’étude du domaine d’intervention qui a abouti au choix de celui de la fraise d’exportation.

  • L’étude du groupe cible qui a abouti à donner priorité aux travailleurs(es) agricoles, permanents(es), saisonniers(es) et journaliers(es), et particulièrement l’élément féminin.

  • L’étude de l’objectif la campagne qui a abouti au choix de l’inscription à la CNSS. On souligne que cette inscription permet aux adhérents(es) de bénéficier des services garantis par la CNSS après l’accomplissement de certains critères.

  • Des études complémentaires sont prévues notamment en ce qui concerne le comportement des différents acteurs par rapport à la CNSS.

Sur la base des résultats de ces études, l’Unité a élaboré les grands axes de son plan d’action avec les modalités d’intervention et les résultats attendus.

Un titre et un slogan ont été donnés à la campagne qui sera lancée.

  • Le titre de la campagne :

En français « Ensemble pour la protection effective des travailleuses agricoles »

En arabe : «جميعا من أجل حماية فعلية للعاملات الزراعيات »

  • Le slogan de la campagne :

En français : « La protection sociale : début de la dignité »

En arabe : « الحماية الاجتماعية من الكرامة الإنسانية »

  • 2. Le plan d’action, le souci d’engager toutes les parties prenantes

Ce plan s’articule autour des axes suivants :

  • L’information, la sensibilisation et la formation des travailleurs (ses) agricoles sur leur droit à l’inscription à la CNSS et sur les modalités d’y accéder.

  • La sensibilisation des employeurs et leur incitation à accorder aux travailleurs (ses) leurs droits prévus par la réglementation, particulièrement leur inscription à la CNSS.

  • L’accompagnement de la CNSS pour renforcer ses actions d’incitation des travailleurs à s’inscrire notamment à travers la diffusion des informations et la facilitation des procédures.

  • L’incitation du Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle à s’acquitter convenablement de sa mission de veille au respect des dispositions légales, notamment en affectant à la zone les moyens humains et matériels nécessaires.

  • La mise au point d’un programme de formation pour tous les acteurs concernés chacun selon ses besoins.

  • La mise au point d’un programme de médiatisation, avec la production et la diffusion de supports audiovisuels adaptés aux besoins des groupes cibles. Une caravane mobile sera notamment mise en place.

Afin de mener à bien la diversité des actions, l’Unité s’organise comme suit :

  • Un comité de pilotage constitué des organisations membres de l’Unité a été institué, sa coordination est assurée par Intermon Oxfam

  • Un comité de mise en œuvre a été institué à Larache pour l’exécution du programme.

Impact attendu et principaux enseignements

Le programme, lancé par Oxfam et des acteurs de la société civile marocaine, dans le cadre de « la Justice Economique » dans l’agriculture marocaine, souhaite démontrer à travers un projet pilote que l’instauration de cette justice est possible, moyennant une vision partagée, une démarche scientifiquement conçue et une mobilisation concertée des populations concernées et des acteurs de développement impliqués. Il est espéré que ce projet puisse servir d’exemple et faire tâche d’huile pour toucher d’autres domaines agricoles et d’autres régions. Cette expérience, même à ses débuts, confirme que le travail de terrain, avec les bénéficiaires, est incontournable pour légitimer et élaborer une stratégie d’action et une vision adéquate avec les réalités. Il est essentiel de réaffirmer la priorité de travailler, de manière collective, sur le milieu rural et le domaine de l’agriculture.

La société civile organisée est un élément essentiel au bon déroulement du projet. Il importe que la société civile marocaine s’organise. La création d’un Conseil national de la société civile devient une priorité et une nécessité pour que des initiatives telles que celle de l’Unité de défense des droits économiques et sociaux dans l’agriculture puissent être dupliquées.

Il y a lieu de souligner que les actions du FMAS et d’Oxfam sont en parfaite harmonie. D’une part, elles se rejoignent dans leurs finalités qui résident dans l’amélioration des conditions de vie des populations démunies et dans le renforcement des systèmes institutionnels pour y parvenir, et d’autre part, elles se complètent dans la mesure où l’action d’Oxfam est locale et celle du FMAS est nationale.

Mots-clés

droits économiques, sociaux et culturels, développement économique, agriculture, conditions de travail, développement durable


, Maroc

Commentaire

Intervention lors du séminaire sur le Conseil Economique et Social au Maroc et les défis des DESC-Rabat, les 13 et 14 novembre 2009.

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