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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Exemples de métriques pédestres développées dans les métropoles européennes : succès et limites

Sonia Lavadinho

2009

  • Trois remarques préliminaires :

• A propos des associations piétonnes : du chemin a été parcouru. Il existe aujourd’hui une association internationale des piétons Walk 21 qui a rédigé une charte internationale de la marche et elle invite l’Agence à la faire signer par la ville de Lyon et le Grand Lyon.

• L’objectif ce n’est pas de développer la marche en soi, c’est d’aller vers la ville multimodale.

• Un grand levier : les partenariats publics privés pour l’aménagement du cadre de vie quotidien ou pour la mise en place de dispositifs éphémères fortement incitatifs. Il n’y a pas besoin de beaucoup d’argent public pour faire bouger les choses. A Genève, ce sont les banques qui ont sponsorisé l’illumination des arbres. Une banque, un arbre. Cela ne coûte rien à la collectivité !

  • Le Projet COST :

Il est consultable sur le site Internet www.walkeurope.org. En cours depuis 2006 il porte jusqu’en 2010. Il opère un recensement de toutes les actions en faveur du piéton et de la marche urbaine à l’échelle d’une vingtaine de pays européens : un état de l’art très complet.

  • L’appui sur la loi :

La marche doit exister dans la loi et autrement que sous l’angle de la sécurité routière. En Suisse, il existe un projet législatif à l’échelle fédérale (nationale) : le Schéma directeur de locomotion piétonne. Ce document est en consultation depuis 2003, mais n’est toujours pas approuvé. C’est étonnant, même si les procédures de consultation sont longues en Suisse : il faut l’accord de tous les cantons et l’avis de toutes les communes. Particulièrement ambitieux, le projet législatif propose d’introduire la marche à pied parmi les piliers légaux de la mobilité, aux côtés de la voiture et des transports collectifs ! Cette démarche est tellement osée qu’elle n’a pas encore trouvé sa place. Pourtant la population est prête, les élus, sans doute aussi, mais les groupes d’intérêt liés à la voiture restent puissants et contrecarrent son adoption !

  • La question de l’échelle :

Il faut sortir de l’idée qu’il faut aménager une zone 30 par-ci, une zone 20 par-là. Il faut passer au stade supérieur, celui d’un projet à l’échelle de l’agglomération. En Suisse, plus aucun projet ne passe s’il n’intègre pas les modes doux.

  • Equipement et accessoirisation du piéton :

S. Lavadinho conseille de lire le livre de Bruno MARZLOFF le 5ème écran.

Il faut tirer parti de l’évolution des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui fait que l’information peut être accessible partout. Le piéton est de plus en plus accessoirisé (Ipod).

La ville elle-même doit aussi servir de support et faciliter l’accès à l’information de façon instantanée. Il faut suivre cette logique d’une information nomade. Les gens planifient de moins en moins leur trajet avant de sortir de chez eux. Il faut leur fournir un système d’information en temps réel pour palier aux changements imprévus de programmes, qu’ils soient liés à des impondérables, ou à un changement d’envie. Ces outils doivent être disponibles sur des plates formes numériques le long des itinéraires marchants.

  • La carte de proximité :

Il faut aller voir le site Internet : www.cartedeproximite.ch

Schéma : Carte de proximité

C’est une carte réalisée à l’échelle du quartier, elle émane d’acteurs du monde social. Elle répond au besoin de situer dans le quartier des informations locales : chemins, pédibus, commerces, médecins, vie de quartier, équipements culturels et sportifs.

Pour chaque type d’attracteur, il faut pouvoir disposer de ce type de carte de proximité, ou pouvoir faire apparaître les couches thématiques propres à chaque catégorie.

  • Comment parler des enjeux de la marche ? Les nouveaux regroupements instantanés

On peut intégrer la marche dans les guides de ville. C’est l’exemple de « Vivre à Genève ». On peut communiquer autour de l’intensité des pratiques et des phénomènes de foules.

La voiture n’a pas de problème avec l’absence de densité. En revanche, pour les modes doux et les transports collectifs, la densité d’usage est essentielle. Pas seulement une densité statique ! Il faut prendre en compte les « transitants », c’est l’idée d’intensité urbaine – de densité fluctuante. Elle est difficile à mesurer mais bien réelle. De plus en plus d’évènements non anticipés déplacent massivement les gens.

La ville évènementielle, la ville écran crée de la densité même là où elle n’existe pas. La mort de Mickael Jackson a généré des regroupements géants dans la rue, de façon totalement imprévue.

  • Créer de la visibilité :

Il y a les opérations réussies avec un fort pouvoir d’entraînement. Des opérations comme Vélo’v ou Vélib ont rendu visible le vélo.

Il faut oser les messages forts, se donner les moyens de parvenir à ses fins. Il est également important d’avoir un timing. L’exemple de Londres est à ce titre très bon : ambition de devenir la ville la plus marchable d’ici 2015 ! En 5 ans les Londoniens ont construits 3 passerelles piétonnes audessus de la Tamise !

Le Pont du Millénaire (Millenium Bridge), entre saint Paul et la New Tate, est aujourd’hui connu du monde entier. Il est situé stratégiquement entre deux attracteurs majeurs. C’est aujourd’hui le pont piéton le plus chargé d’Europe. Les passerelles sont le meilleur moyen de visibiliser les actions menées en faveur des piétons.

Il faut mettre en place une signalétique intuitive et uniforme. L’enjeu est de permettre à chacun de construire sa carte mentale. Pour ce faire il faut s’appuyer sur des points de repère du quotidien, des éléments qui structurent déjà nos cartes mentales (Mac Do, Fnac, grands magasins et pas seulement la cathédrale …). … On doit rechercher l’unification de la signalétique du métro avec celle des cheminements dans les quartiers.

Transport of London, devant la saturation de son réseau de métro, vend la marche comme complément idéal à son réseau. « Vous irez plus à pied !» C’est l’idée de cartographier des cercles d’accessibilité : quelles sont les équipements et services accessibles en 5/15 minutes. Il faut une manière intuitive de les visualiser en profitant notamment des points de repères dans la ville (une grande tour, …).

  • La preuve par l’usage

L’exemple de Saint-Gall avec le concept de City Lounge est intéressant. L’idée est de faire en sorte que l’espace public soit flexible, multi-usage. C’est une transformation de l’image de la rue par une peinture ludique avec juste un marquage pour les emplacements préférentiels de quelques stationnements pour la voiture. Après chacun négocie.

Il faut démontrer l’intérêt de la marche en faisant des expérimentations. L’enjeu c’est la preuve par l’usage. Les Ramblas à Barcelone fonctionnent parfaitement mais c’est aussi parce que l’espace le permet. Les Ramblas del Mar, le long du port, sont de véritables Hub de vie, les gens y font tout. Un lieu de vie où tout se passe, où on peut aller par tout et pour tout. Ce sont des lieux symboliques avec un fort pouvoir identifiant pour la Ville.

Lorsque vous proposez un projet il y a toujours des réticences. Si vous l’expérimenter, en faisant cela avec soin, les gens se l’approprient rapidement et réclament souvent son maintien. Une fois que la démarche a démontré son intérêt, il est plus facile de la renouveler. C’est l’exemple des Berges du Rhône, c’est une réussite donc maintenant on fait les Berges de Saône.

  • Agir au centre comme en périphérie, désenclaver les grands équipements

Il ne faut pas penser qu’au centre, je ne vois pas d’obstacle à ce qu’on crée des équipements de loisir ou économique en périphérie, mais le seul problème c’est que jusqu’ici on ne faisait jamais le plan d’accès piéton qui allait avec. Par exemple, il n’y a pas de cheminement prévu entre le tramway et le centre commercial de Portes des Alpes à Saint-Priest ! L’attracteur est là pourtant. Il n’est pas trop tard pour penser les itinéraires piétons qui le desserviront.

  • Penser et planifier à la bonne échelle, assurer les continuités et les interfaces

Pour rendre visible cette politique en faveur du piéton, il est essentiel qu’elle se pense à l’échelle de l’agglomération. L’exemple de Bilbao montre qu’il faut compter dix ans avant de voir les effets concrets de cette démarche de planification, mais au moins ensuite cette politique devient visible. On voit la différence entre une ville qui suit une démarche systématique et celle qui fait des aménagements sporadiques. Dans ce cadre, il est essentiel de prendre en compte les interfaces modales ! L’exemple de la Part Dieu est un désastre. Quand vous arrivez là et que c’est votre premier contact avec la ville de Lyon, vous ne savez pas où aller. Pourtant c’est une entrée de ville majeure. Tout de suite cela vous donne le sentiment que Lyon n’est pas une ville marchable.

Les Berges du Rhône révèlent le problème du traitement des interstices. Vous êtes dans une rue à proximité mais rien ne vous permet de le savoir. Cette discontinuité est un défaut récurrent dans de nombreuses villes. La faible visibilité donnée aux attracteurs et le manque de repères urbains vous dissuadent de choisir la marche pour vos déplacements !

dossier

De Londres à Bilbao : marche urbaine et nouveaux systèmes de mobilité

Commentaire

Tiré du compte rendu de la séance Repères européens, Urbalyon.

De Londres à Bilbao: marche urbaine et nouveaux systèmes de mobilité. Impacts sur l’aménagement et les politiques de déplacement dans les métropoles européennes (Séance organisée avec l’appui de Mme Sonia Lavadinho, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne)

22 octobre 2009

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