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Trempoline - L’habitat groupé comme outil de réinsertion pour un public de toxicomanes

Pascale THYS

17 juillet 2009

Contexte

L’asbl Trempoline qui existe depuis 1985 offre, entre autres, un programme thérapeutique résidentiel à des personnes toxicomanes. Sa mission première est « d’apprendre aux personnes toxicomanes à autogérer leur existence sans recourir aux produits psychotropes ni à d’autres conduites destructives ».

Le programme thérapeutique se compose de plusieurs phases étalées sur une période de plus ou moins 18 mois, ce qui permet la confrontation progressive aux difficultés et un apprentissage progressif de l’autonomie :

1. l’accueil des personnes en dépendance forte (venant soit de la rue, soit sortant de prison, ou encore suite à l’appel à l’aide de parents). Il dure environ 2 à 3 mois. Sa mission est de « créer le lien entre le résident et Trempoline, en accueillant respectueusement celui-ci dans un cadre sécurisant, pour lui permettre de se réapproprier des habiletés et de poursuivre son évolution personnelle en communauté thérapeutique » ;

2. la communauté thérapeutique, en internat, sur une période de 10 mois. Ses objectifs pour les résidents sont d’apprendre à gérer leurs émotions et besoins, de se connaître, de s’accepter et de savoir bien gérer les relations humaines ;

www.habitat-participation.be/dph/Trempoline.jpg

3. la réinsertion sociale. Cette phase, qui s’étale entre 6 à 8 mois souvent avec des prolongations du séjour, est un défi, un choc pour 60 à 70% des personnes. Elle prépare à la vie en société, elle permet une reprise de confiance en soi. Les personnes y arrivent avec un projet de vie à court, moyen et/ou long terme.

Deux lieux sont affectés à cette phase : une maison située à Lodelinsart, où les résidents sont encore « surveillés » et un habitat groupé à Gilly, où les résidents vivent en pré autonomie. C’est de cet habitat dont il est principalement question ici.

Le loyer maximum est de 125€ (excepté si cela représente plus de 20% de ce que la personne perçoit). Ce qui permet de mettre de côté de l’argent pour le jour où le résident habitera seul.

L’habitat de Gilly se compose de plusieurs pavillons dans lesquelles on retrouve des chambres individuelles et une cuisine, une salle de bain et un salon communs. Il y a aussi un grand jardin. Un appartement spécifique y est réservé pour les femmes avec enfants.

Cet habitat est entièrement pris en charge financièrement par Trempoline. Aucune subvention n’est reçue pour cette expérience, qui a débuté en 2002. Les bâtiments sont loués pour un prix modique à la Mission Catholique Italienne. Les coûts principaux sont constitués par les charges et l’aménagement.

Trempoline est aussi à la base d’une expérience unique en Communauté française, à savoir un habitat kangourou pour des mamans toxicomanes et leurs enfants. Elle est soutenue par la Fondation Roi Baudouin et le Ministre des affaires sociales et de la santé de la Région wallonne. Actuellement 4 familles y qui vivent.

Type de public

Adultes, entre 18 et 44 ans, (femmes et hommes) qui ont suivi un traitement de 12-14 mois à Trempoline, et qui sont capables de vivre sans consommer de la drogue.

Conditions d’accès et motivation

Il y a 3 conditions pour pouvoir habiter à Gilly :

1. avoir séjourné à la maison de Lodelinsart ;

2. s’inscrire dans une formation long terme (1-2 ans) ;

3. avoir une situation sociale minimale (avoir des revenus).

Cet habitat groupé est aussi une sorte de vase d’expansion de la maison de Lodelinsart qui accueille 10-12 personnes. Cela permet de ne pas « mettre à la porte » brutalement lorsqu’un résident n’est pas « prêt » à affronter la vie sociale en toute autonomie.

Mode de fonctionnement

Il y a un règlement d’ordre intérieur avec des règles de base très strictes (pas de violence, pas de drogue ni de médicament ni d’alcool) qui permettent, entre autres, un apprentissage de l’auto discipline. Le cadre de ce règlement est défini par Trempoline (« ceux qui ont l’autorité, la responsabilité juridique »), mais certaines règles peuvent être modifiées par les résidents.

Les résidents sont autonomes. Ils n’ont plus rien à apprendre en matière de vie en commun car ils en ont déjà eu une expérience via leur passage par Trempoline et la maison de Lodelinsart. Il s’agit ici plutôt d’une mise en situation avec la réalité inévitable où les résidents vont devoir faire des expériences (par exemple : apprendre à vivre avec ses voisins).

Ils font ce qu’ils veulent et vont où ils veulent (tout en respectant les horaires de leur formation). La télédistribution est payée par eux ; ils gèrent eux-mêmes le nettoyage ; …

Il y a une certaine autogestion réaliste de tout ce qui concerne leur besoins. Ils sont pro actifs.

Types d’accompagnement social

Au début du programme la personne dépendante est soumise à une prise en charge très parentale, tout en la responsabilisant. Ensuite il y a progressivement une responsabilisation de l’individu.

Dans la phase de réinsertion sociale chaque résident reçoit son dossier et doit lui-même le gérer et prendre les rendez-vous avec les services si nécessaire.

Pendant tout le programme, chaque mois une réunion avec la famille est organisée, afin de recréer un lien, un réseau d’appartenance familiale précieux pour l’avenir. Les personnes en phase de réinsertion peuvent demander à continuer ces réunions.

Mais très souvent, les personnes résidants à Gilly n’ont plus beaucoup de famille et donc ils s‘agit d’un travail de reconstruction.

Il existe un groupe d’anciens, le groupe ART (Anciens Résidents de Trempoline), qui se réunit une fois par mois et qui est ouvert à tous. Ce qui permet de parler de ses problèmes avec des personnes qui sont passées par les mêmes étapes.

Certains résidents participent à des groupes de paroles à la maison de Lodelinsart.

Pour les résidents de Gilly il s’agit surtout d’entretien individuel.

S’il y a besoin d’une thérapie, on essaye de trouver quelque chose à l’extérieur (« se détacher de la structure »).

La mixité entre les populations

Actuellement deux femmes et deux hommes vivent à Gilly.

Les couples sont interdit.

Type de solution

Il faut quitter l’habitat de Gilly après un maximum de 20 mois de présence. Toujours avec la perspective de faire place pour le suivant.

Outils et méthodes

Il y a un éducateur spécialisé avec une formation pluridisciplinaire (psychanalyse, thérapie systémique, …) qui s’occupe des habitants de Gilly.

Divers

Pour les responsables de l’expérience, l’habitat groupé de Gilly est un tremplin utile pour se lancer dans la vie, pour des personnes qui ne sont pas prêtes à vivre seules.

Ce type d’habitat, mais à plus long terme, serait peut-être une réponse pour les personnes qui rechutent, Mais d’un autre côté, on a constaté que l’autonomie est plus dure à trouver après près de 3 ans d’institution.

Le responsable de l’habitat de Gilly fait de temps en temps l’exercice avec des résidents pour voir ce qu’ils souhaitent pour leur habitat futur (lieu d’habitation, nombre de chambres, câble de la télédistribution, …) afin de leur montrer, entre autres, combien cela coûte. Pour lui, une solution pour abaisser les coûts tout en gardant un certain confort serait que des ex-résidents puissent habiter ensemble, ce qui démultiplierait les charges et permettrait de louer quelque chose de plus beau. Mais jusqu’à aujourd’hui aucun des résidents n’a encore choisi cette solution.

Pour le directeur de Trempoline, les échanges avec d’autres expériences dans d’autres pays est importante en matière de recherche des savoirs dans l’accompagnement de personnes fragilisées.

Mots-clés

lutte contre l’exclusion, solidarité, lien social, innovation sociale


, Belgique, Châtelet

dossier

L’habitat solidaire, ou habitat groupé avec des personnes en précarité sociale

Source

Entretien

Auteur

Personnes interviewées :

Georges van der Straten, directeur de Trempoline

Umberto Zambito, éducateur spécialisé

Coordonnées

Trempoline, asbl

Grand Rue, 3

6200 Châtelet

Tél. : 071/40.27.27

Fax : 071/38.78.86

Site internet : Asbl Trempoline

Mail : Asbl Trempoline

Octobre 2003

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