Sur le plan économique et social, la pêche artisanale occupe une place importante en Afrique de l’Ouest. Cependant le secteur n’est pas toujours bien couvert par la presse comme il se doit.
Ce n’est qu’à partir de 1992 que quelques rares journalistes tels que Bocar Niang du journal Sud Quotidien du Sénégal ont commencé à s’y intéresser et ont d’ailleurs trouvé les activités de la pêche artisanale pertinentes pour une couverture médiatique.
En 1996, l’ADEPA a trouvé également qu’il y avait quelque chose à faire pour démarginaliser le secteur. C’est ainsi qu’elle a créé le réseau des journalistes de la pêche artisanale en Afrique de l’Ouest. Ce réseau qui se réunit une fois par an, a invité à sa rencontre de 1998, M. Bocar Niang pour partager son expérience avec les membres du réseau. Voici ce qu’il a déclaré sur le rôle de la presse dans le domaine de la pêche artisanale.
« La pêche occupe une place particulière dans l’économie sénégalaise. Avec 160 milliards de recettes à l’exportation, c’est le premier pourvoyeur de devises du Sénégal, devant le tourisme, l’arachide et les phosphates. Mais du fait aussi du nombre important de personnes qui en dépendent plus ou moins directement (environ 600 000 personnes). Dans ce contexte, la couverture de cette activité s’impose comme une priorité de premier plan pour les journalistes, en particulier pour les journalistes économiques.
Au Sénégal, elle est l’une des activités économiques les plus couvertes par la presse. C’est tellement vrai dans un journal comme « Sud » par exemple, que notre rédacteur en chef a dû, à un moment donné décréter une sorte de pause car il pensait que les autres secteurs économiques faisaient les frais de cette « overdose » d’informations sur la pêche.
Personnellement, c’est depuis 1992 que je m’intéresse particulièrement à ce secteur. Dans ce cadre, j’ai développé des relations de travail très étroites aussi bien avec la direction des pêches, le secteur industriel, qu’avec les organisations professionnelles (la Fenagie-pêche, le CNPS…). La difficulté majeure demeure une couverture honnête et impartiale, pour ne pas dire objective, du fait des divergences d’intérêts entre ces différents protagonistes.
J’ai été invité par exemple en 1993 aux Philippines par le CNSP à un congrès international des pêcheurs artisanaux et je développe des relations de travail très suivies avec les responsables de cette organisation qui regroupe environ 35 000 membres et demeure très en pointe dans la lutte pour la défense des intérêts de la filière artisanale de la pêche. N’empêche, je ne manque jamais, malgré ces relations de confiance, de toujours vérifier les informations émanant de cette organisation et de garder une liberté de commentaire totale par rapport à ses initiatives dont certaines sont parfois discutables.
Il en est de même de la Fenagie-pêche, jugée à tort ou à raison comme proche de l’administration et dont la représentativité sur le terrain semble assez forte. La Fenagie qui revendique autant de membres que le CNPS, chasse sur les mêmes terres que celui-ci d’où une certaine rivalité entre les deux organisations.
Il faut donc savoir garder un carnet d’adresses de qualité dans le secteur tout en respectant toujours les exigences éthiques qui s’imposent à notre métier. Du fait des enjeux, les tentatives de manipulations, et d’instrumentalisation ne manquent pas. D’où le devoir de vigilance des journalistes.
L’exigence d’une approche pédagogique pour expliquer les enjeux des activités de pêche s’impose également dans la façon de traiter l’information. Car tout compte fait, en revenant encore une fois sur l’exemple du Sénégal, on peut penser que sans la presse, la question de la surexploitation des ressources halieutiques n’aurait sans doute pas eu un écho si large, aussi bien au sein de l’administration que de l’opinion publique. Au point d’avoir bloqué pendant un an, la conclusion des derniers accords de pêche entre le Sénégal et l’Union Européenne ».
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, Afrique de l’Ouest
La pêche artisanale en Afrique de l’Ouest
Bocar NIANG est journaliste à Sud-Quotidien, BP 15052 Dakar-Sénégal. Tél. + 221 822 53 93 (b) ; 823 79 83 (d) - Fax. +221 822 52 90
Rapport de la session régionale annuelle du réseau des journalistes de la pêche artisanale en Afrique de l’Ouest, par Lucie ATTIKPA-TETEGAN, Expert en communication du Secrétariat Technique de l’ADEPA, Abidjan, avril 1998.