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Les agrocarburants actuels

09 / 2007

Les agrocarburants actuels en bref

Production 2005 :

Ethanol : 40 Mtonnes (26 Mtep)

Agrodiésel : 5 Mtonnes (4,5 Mtep)

Rendements :

Ethanol : 1 à 2 tep/hect pour les céréales, 3 à 4 tep/hect pour les plantes sucrières

Biodiesel : 1 tep/hect

Coûts :

Ethanol : 0,3 - 1 €/kep* (essence 0,28)

Agrodiesel : 0,3 - 0,60 €/kep (gazole 0,26)

Emplois : 6/GWh

Émissions de GES :

Ethanol : 65-115 gCO2/km

Agrodiesel : 26- 73 gCO2/km

*Kep : kiloéquivalent pétrole

Rapide historique

Le marché des agrocarburants de première génération est aujourd’hui en plein essor : après plus de 20 ans de développement industriel, la production mondiale de biocarburants affiche des taux de croissance particulièrement importants. Cette activité est aujourd’hui tirée par la volonté des états de réduire la dépendance au pétrole, leur souhait de promouvoir des énergies à faible contenu en carbone et, dans certaines régions la nécessité de trouver de nouveaux débouchés aux secteurs agricoles.

État de l’Art

Il existe aujourd’hui deux grands types d’agrocarburants : l’éthanol qui est utilisé dans des moteurs de type « essence » et les esters méthyliques d’huiles végétales (EMHV) destinés à un usage dans les moteurs de type « diesel ».

L’éthanol est aujourd’hui produit à partir de plantes sucrières (canne à sucre, betterave) et de plantes amylacées (blé, maïs). Ces différentes filières passent toutes par une étape de fermentation, qui transforme les sucres en éthanol, et une étape plus ou moins poussée de distillation qui sépare l’alcool de l’eau.

Il peut être utilisé pur, en mélange ou bien encore sous sa forme d’éther (ETBE), produit par réaction avec de l’isobutène issu des raffineries ou de la pétrochimie. Son usage pur ou à de très fortes concentrations (par exemple 85 % ou E85) nécessite une adaptation spécifique du véhicule. Ce dernier usage ce développe aujourd’hui de manière importante via le véhicule « flexfuel », capable de fonctionner avec un mélange essence/éthanol en toutes proportions.

Pour un usage banalisé, il est plus généralement utilisé à des teneurs comprises entre 5 et 10 % qui n’exigent aucune adaptation du moteur.

Les esters méthyliques d’huiles végétales (EMHV) sont produits à partir d’huiles végétales issues par exemple de colza, de tournesol, de soja ou de palme. Dans le cas où l’huile provient du broyage de graines (colza, soja, tournesol), un résidu solide (le tourteau) est produit (1 à 1,5 tonne de tourteau/tonne d’huile), réservé à l’alimentation animale. Mal adaptées à l’alimentation directe des moteurs diesel modernes des véhicules particuliers, les huiles végétales (cependant parfois utilisées directement dans les moteurs diesels, des tracteurs en particulier) sont transformées par une réaction de transestérification avec un alcool, aujourd’hui le méthanol, pour produire des esters méthyliques d’huiles végétales et de la glycérine (0,1 t de glycérine/t d’EMHV). L’EMVH peut être utilisé pur ou en mélange. L’utilisation pure nécessite des adaptations du véhicule. Aujourd’hui, l’EMHV est principalement utilisé en mélange à des teneurs variant de quelques % jusqu’à 30 % en flottes captives.

Les rendements à l’hectare des diverses filières actuelles sont 1 Tep/ha pour l’EMHV issu de colza ou de tournesol, 1 à 2 Tep/ha pour l’éthanol ex-blé ou maïs et, enfin, 3 à 4 Tep/ha pour l’éthanol ex-betterave et ex-canne à sucre.

Coûts

Les coûts des biocarburants se rapprochent de ceux de l’essence et du gazole avec l’augmentation du cours du baril. En particulier, les coûts particulièrement bas de l’éthanol au Brésil sont même dès aujourd’hui compétitifs avec les carburants pétroliers.

Tableau 1. Coûts de production de différents carburants

EtOH EuropeEtOH BrésilEtOH USAEMHV EuropeEssence 60 $/b*Gazole 60 $/b*
0,4-0,6 €/l0,2 $/l0,3 $/l0,35-0,65 €/l0,32 €/l0,36 €/l
19-29 €/GJ10 $/GJ14 $/GJ10,5-20 €/GJ9 €/GJ10 €/GJ

Source : AIE/IFP ; *prix des carburants pour la France hors taxe décembre 2006 ; 1 ¤ = 1,30 $

Ce coût de production est très dépendant du prix de la matière première qui représente entre 50 % et 90 % du coût final. Ainsi, les évolutions des cours du blé, du maïs, des huiles végétales ou même des graines de colza qui peuvent subir de fortes variations, notamment en fonction du niveau des récoltes, ont une influence importante sur la compétitivité relative des agrocarburants par rapport aux produits pétroliers. Ceci d’autant plus que leur marché peut représenter une part importante de la valorisation de ces matières premières, alors même qu’ils ne représentent souvent que quelques % de la consommation d’énergie du secteur des transports (exception faite du Brésil) : 20 % de la production de maïs aux États-Unis sont aujourd’hui «brûlés» en éthanol ; 50 % de la production européenne de colza sont aujourd’hui transformés en agrodiesel.

Dans la grande majorité des cas, un soutien adapté de la part des pouvoirs publics reste indispensable aujourd’hui pour soutenir le marché (pour 2006, ce soutien a été estimé entre 5 et 7 milliards de dollars aux États-Unis) (1). Ceci est d’autant plus vrai qu’aujourd’hui, du fait d’une demande importante, les cours (c’est-à-dire les prix) de l’éthanol aux États-Unis et au Brésil, ou de l’EMHV en Europe sont particulièrement élevés : aux États-Unis, le prix de l’éthanol a atteint 3 $/gal en novembre 2006 (0,60 $/l, soit près de 730 $/t, le double des coûts de production annoncés) ; au Brésil, le prix de l’éthanol est d’environ 0,40 $/l (près du double du coût de production annoncé) ; en Europe, l’EMHV atteint 700 €/t du fait de la flambée des cours de l’huile de colza (cotée à près de 800 $/t à Rotterdam (2) en novembre 2006) et l’éthanol carburant 0,60 €/l (750 ¤/t ou un peu plus de 11 00,00 €/tep).

Production

La production des agrocarburants dans le monde, qui a atteint un total de 22 Mtep en 2005, augmente actuellement de manière importante. Elle reste essentiellement portée par trois grandes régions : les États-Unis, le Brésil et l’Europe, même si de nombreux autres pays s’intéressent à ces carburants d’origine végétale. Sur les cinq dernières années, la croissance mondiale de la production d’agrocarburants a été de l’ordre de 15 %/an. La hausse s’est même accélérée très récemment : entre 2004 et 2005, la production d’agrodiesel a crû de plus de 60 %.

Figure 1. Évolution de la production de biocarburants dans le monde, en Mt

Évolution de la production de biocarburants dans le monde, en Mt

Source : F.O. Licht, Christoph Berg, présentation au World Biofuels 2006, Séville mai 2006

Cette production reste néanmoins très modeste par rapport à la production de carburants pétroliers (de l’ordre de 1 % en 2005). C’est l’usage de l’éthanol, essentiellement produit et consommé aux États-Unis et au Brésil, qui est largement majoritaire. La consommation d’EMHV, qui reste encore une spécificité européenne, est environ 10 fois inférieure : en 2006, la production d’éthanol devrait atteindre 40 Mt, l’usage carburant comptant pour près de 80 % de la production totale d’éthanol, soit près de 32 Mt (21 Mtep). Celle d’agrodiesel devrait être supérieure à 5 Mt (4,5 Mtep).

Emplois

L’Ademe (3) prévoit la création de 20000 emplois pour l’objectif gouvernemental de 5,75 % d’agrocarburants en 2010 (environ 3 Mtep) soit environ 6 emplois par GWh.

Émissions de GES

L’intérêt environnemental et énergétique de la production d’agrocarburants de première génération suscite des polémiques, tant sur leur contribution à la réduction des émissions de gaz carbonique et de ponction des énergies fossiles ou sur les consommations d’eau, d’engrais et de pesticides associés que sur les problèmes de concurrence avec les cultures dédiées à l’alimentation.

Pour les émissions de GES, les fourchettes de résultats des différentes études sont larges, pour deux raisons principales (voir fiche Les énergies renouvelables et les émissions de gaz à effet de serre (GES)) : les règles d’affectation des émissions aux différents coproduits des carburants et la nature des énergies mises à contribution pour transformer la biomasse en carburant.

Pour l’éthanol les émissions se situent dans la fourchette 65-115 gCO2/km (par rapport à 164 g pour un véhicule de même puissance à essence), pour l’agrodiesel dans la fourchette 26-73 gCO2/km (par rapport à 156 g pour un véhicule diesel de même puissance).

L’emploi d’agrocarburants de première génération ne présente donc qu’un intérêt très relatif en termes d’économies d’émissions de GES, dans un certain nombre de cas, en particulier en Europe.

Potentiels

Le tableau suivant donne une idée des limites que rencontreraient en termes de concurrence d‘usage des terres des programmes ambitieux de substitution des carburants pétroliers par des carburants issus de biomasse à vocation alimentaire (céréales, plantes sucrières) en Europe et aux États-Unis dans des scénarios à l’horizon 2020.

Carburants et usage des terres aux États-Unis et en Europe à l’horizon 2020

 États-UnisÉtats-UnisEuropeEurope
 EthanolAgrodieselEthanolAgrodiesel
Consommation totale596239164206
Substitution %10 %10 %10 %10 %
Substitution en volume million de litres84,127,123,223,3
Rendement à l’hectare (litres)4 7007005 9001 600
Besoins en terre cultivables adaptées à cette production (Mha)1840415
% des terres adaptées à cette production14 %30 %8 %30 %

Source biofuels

Pour produire les carburants de substitution nécessaires au déplacement de 10 % de carburant pétrolier avec de l’éthanol, il faudrait donc consacrer 8 % des terres adaptées à cette culture en Europe et 14 % aux États-Unis en 2020. Il en faudrait 30 % pour les deux régions dans le cas de l’agrodiesel. A remarquer que la production correspondante, d’environ 60 Mtep, est du même ordre que l’augmentation de consommation de carburant attendue entre 2010 et 2020 pour l’ensemble des deux régions (55 Mtep).

Perspectives

La mise au point d’agrocarburants de deuxième génération, à base de lignocellulose, évitant les concurrences d’usage des terres avec les cultures à vocation alimentaire, offre des perspectives de développement plus vastes dans de nombreuses régions (voir fiche Les agrocarburants de deuxième génération).

1 Biofuels at what cost ? Government support for ethanol and biodiesel in the United States, D. Koplow, October 2006
2 Par comparaison, un pétrole à 70 $/bl équivaut à environ 500 $/t.
3 Stratégie et études, Ademe et vous, avril 2007

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