09 / 2005
Les stratégies technologiques
Le second paramètre d’évolution des flux et stocks de matières nucléaires dangereuses, à évolution donnée de la production nucléaire, est la nature des technologies nucléaires mises en œuvre d’ici la fin du siècle. Pour illustrer la diversité des stratégies techniques envisageables, nous avons retenu ici trois types de filières nucléaires :
Les filières de réacteurs à eau, comme les réacteurs français actuels. À combustible UOX ou MOX, ils ont en commun des températures modestes, des neutrons lents et des rendements limités (de 33 à 36 %), qui conduisent à la constitution de stocks croissants de plutonium, d’actinides mineurs et de produits de fission dans les combustibles usés. Ces réacteurs sont aujourd’hui massivement déployés, et leur évolution est déjà prête, comme le projet EPR (European pressurised water reactor).
Les filières à plus haute température qui bénéficient d’un meilleur rendement thermodynamique (jusqu’à 50 %), telles que le HTR (high temperature reactor) actuellement à l’étude. Ces réacteurs, plus petits, sont notamment développés pour incinérer le plutonium militaire et/ou produire directement de l’hydrogène. Le retraitement de leur combustible n’est pas envisagé. Prévus pour une disponibilité industrielle vers 2020-2030, ils peuvent consommer du plutonium, produisent relativement peu d’actinides mineurs et, grâce à leur rendement plus élevé produisent peu de produits de fission.
Enfin, des réacteurs également à haute température, plus éloignés en termes de R&D, regroupés sous les nouvelles filières RNR (réacteurs à neutrons rapides). Ils n’existent aujourd’hui que sur le papier, et pourraient être disponibles vers 2040 ou 2050. Leur combustible devra par conception pouvoir être retraité. Les performances visées devraient idéalement permettre de consommer non seulement le plutonium mais aussi des actinides mineurs tout en réduisant la production de produits de fission.
Filières retenues et fonctionnement attendu des réacteurs correspondants
(a) Le mode de fonctionnement (et le bilan) peut pour chacune des filières varier selon le type de combustible utilisé et les objectifs. Ces variations peuvent être très fortes : les RNR peuvent par exemple être utilisés pour générer du plutonium. On indique ici quel fonctionnement est retenu pour le calcul des bilans de scénarios.
(b) On retient l’hypothèse d’une reconduction dans un parc EPR du fonctionnement des réacteurs « moxés », (une utilisation de 70 % d’UOX et 30 % de MOX) et une progression des taux de combustion pour atteindre à terme 64 GWj/t pour l’UOX et 55 GWj/t pour le MOX.
Source : Rapport annexe Charpin-Dessus-Pellat, « La prospective technologique de la filière nucléaire », 2000
Les scénarios retenus
Pour illustrer la nature et l’ampleur des enjeux dans quelques situations caractéristiques, nous avons choisi 6 scénarios croisant des hypothèses diverses de production d’électricité et de technologies mises en œuvre. Leurs principales caractéristiques apparaissent dans le tableau ci-dessous :
Caractéristiques principales des scénarios
(a) Nouveaux réacteurs introduits en remplacement ou complément du parc ; entre parenthèses date où commence l’introduction. Le parc installé en 2050 représente 85 GWe (gigawatts électriques) pour 600 TWh (térawatt-heures), 47 GWe pour 350 TWh, et 12 GWepour les réacteurs HTR.Par comparaison, le parc de 58 réacteurs exploité par EDF actuellement représente 63 GWe et génère environ 450 Twh.
deux scénarios de poursuite de l’option nucléaire (renouvellement et accroissement du parc de réacteurs), soit dans une continuité technologique [➊] soit avec une rupture par introduction d’une nouvelle filière RNR [➋];
un scénario de maintien de l’option nucléaire (renouvellement partiel avec repli du parc), et la même rupture technologique que précédemment [➌];
trois scénarios de sortie de l’option nucléaire (non renouvellement à la fin de vie du parc actuel, on opte ainsi pour une évaluation conservatrice des bilans de scénarios d’arrêt du nucléaire, basés sur la même hypothèse de durée de vie du parc que les scénarios de renouvellement, soit 45 ans par réacteur en moyenne). Ils se distinguent sur la gestion du combustible : continuité de la gestion actuelle [➃], introduction d’une rupture technologique [➄], ou abandon de la stratégie de retraitement [➅].
Cette sélection ne s’appuie pas sur un critère de probabilité d’occurrence ou de représentativité des multiples options envisageables. Les scénarios choisis ont seulement vocation à illustrer les principaux enjeux des décisions à prendre sur la production et les technologies nucléaires, en comparant l’évolution des matières nucléaires dangereuses à gérer pendant un siècle dans quelques situations caractéristiques.
déchet nucléaire, énergie nucléaire, innovation technologique, production d’énergie
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Les déchets nucléaires (HS Global Chance, septembre 2005)
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