(Association Nouvelle Frontière)
07 / 2005
L’association Nouvelle Frontière lutte pour les droits des personnes incarcérées ou en mesure alternative à l’incarcération. C’est l’une des seules associations italiennes dont le président est un détenu en mesure alternative à la prison. La législation italienne sur les associations interdit qu’une structure soit présidée par une personne ayant fait l’objet d’une condamnation. Le président de Nouvelle Frontière a profité des failles du système, du manque de coordination entre certains services et est parvenu à faire officiellement enregistrer l’association. Nouvelle Frontière est composée uniquement de personnes bénévoles, anciens détenus, personnes en mesures alternatives à la prison ou souhaitant simplement lutter pour les droits des personnes incarcérées.
L’association intervient dans divers domaines :
Organisation de permanences juridiques pour les personnes faisant l’objet d’une condamnation
Sur le plan juridique, Nouvelle Frontière propose des permanences d’information pour les personnes en cours de procédure de justice, en mesures alternatives à la prison ou susceptibles de bénéficier de ce type de mesures. L’objectif est avant tout d’informer les prévenus sur l’existence d’une législation leur permettant de purger leur peine à l’extérieur de la prison lorsqu’elles remplissent certaines conditions : être condamné à une peine n’excédant pas 3 ans de prison, s’insérer dans un programme de réhabilitation et bénéficier d’un contrat de travail couvrant la durée de la mesure alternative. Cette réglementation est, selon Nouvelle Frontière, peu adaptée à la réalité italienne, vu le taux de chômage existant dans le sud de l’Italie et la difficulté d’autant plus forte pour des personnes condamnées à trouver un emploi avec un contrat de travail durable. 19 000 personnes seraient aujourd’hui susceptibles de bénéficier de ces mesures si elles trouvaient un emploi.
Les permanences sont réalisées à la fois par des avocats et des assistantes sociales du Ministère de la justice (chargées de suivre les programmes de réhabilitation). Une collaboration est instituée entre l’association et les avocats puisque c’est l’association qui se charge de constituer le dossier de défense avec le prévenu pour le communiquer et le travailler ensuite avec l’avocat.
Les actions collectives d’occupation de bâtiments publics
Sur le plan social, Nouvelle Frontière permet aux personnes en mesures alternatives à la prison de trouver un contrat de travail en créant des coopératives sociales. Les militants mènent ainsi de nombreuses luttes d’occupation des ressources publiques inutilisées (bâtiments et espaces publics) pour pouvoir les récupérer et y développer des activités. Ces occupations n’impliquent pas les membres de l’association en mesure alternative car les risques encourus sont trop grands. Ce sont généralement des occupations de courte durée, renouvelées jusqu’à ce que les pouvoirs publics cèdent. Lors d’une première occupation, l’association essaie d’engager des négociations avec l’administration. Si cela ne fonctionne pas, elle tente alors d’utiliser les médias pour diffuser l’information et s’associe à d’autres associations (associations de locataires, guichet social de la paroisse,…) pour que l’action ait plus d’impact. Une centaine de personnes participe généralement aux occupations. Une coopérative sociale est ainsi née dans le quartier de Torre Bellamonaca à la suite d’une occupation pour entretenir les espaces verts de ce dernier.
L’action politique
Nouvelle Frontière mène également des actions visant à influencer les législations liées à la situation des prisonniers. Ses membres ont par exemple lutté pour que la loi sur « l’indulto » (mesure de grâce) soit applicable aux personnes condamnées à moins de 2 années d’emprisonnement. Afin d’obliger ceux-ci à prendre position, ils interpellent fréquemment les parlementaires en leur posant des questions écrites sur la situation des prisons, les violations de droits qui peuvent survenir à l’encontre de prisonniers, etc.
L’organisation collective des personnes incarcérées
Nouvelle Frontière participe également à l’organisation collective des prisonniers au sein des prisons, défendant l’idée que le droit doit aussi entrer dans ces lieux dont il est trop souvent exclu. L’association a notamment appuyé une lutte judiciaire obligeant l’administration centrale à appliquer strictement la loi prévoyant que le travail au sein des prisons devait être rémunéré à 70 % du salaire minimum. Les prisonniers, rémunérés à un salaire inférieur aux 70 % se sont organisés sous forme de syndicat et ont obtenu une condamnation de l’administration pénitentiaire en première instance.
exclusion sociale, information juridique, mobilisation populaire
, Italie
Pratiques du droit, productions du droit : initiatives populaires, 2005
Entretien
Réalisé en mai 2005 : Association Nouvelle Frontière, Toni Aquilini
Juristes Solidarités - Espace Comme vous Emoi, 5 rue de la Révolution, 93100 Montreuil, FRANCE - Tél. : 33 (0)1 48 51 39 91 - France - www.agirledroit.org/fr - jur-sol (@) globenet.org