Une recherche sur les tontiniers/collecteurs au Bénin et au Togo a permis de mesurer l’importance et le dynamisme de ces opérateurs qui sillonnent les marchés urbains en réalisant collecte de l’épargne et remise d’avances à la clientèle directement sur le lieu de ses activités. Leur origine paraît être le pays Yoruba, au Nigéria, d’où ils auraient essaimé vers le Bénin, le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Gabon et le Congo. Leur activité est progressivement devenue celle de véritables banquiers ambulants.
Leur nombre est important, puisque l’on compte 440 banquiers au Bénin (dont 180 à Cotonou, et 260 dans les villes secondaires), et environ 160 au Togo (dont 60 à Lomé, et 100 dans les villes secondaires). Leur activité paraît liée à la crise économique et au développement de l’économie informelle ces dernières années.
Cette activité connaît à la fois un développement et une diversification, passant d’une fonction initiale de « garde monnaie » qui reste prépondérante à celle de fournisseur d’avances (de plus en plus demandées, et de plus en plus tôt dans le cycle d’épargne) et de crédits (fonds de roulement pour le commerce, achat de taxi, démarrage d’une activité de cambiste, amélioration de l’habitat), et cela sous la pression de la clientèle et de la concurrence. Ils sont ainsi devenus de véritables banquiers qui conjuguent épargne, avances et crédits.
Le volume de l’activité financière est loin d’être négligeable : des extrapolations conduisent à estimer une épargne annuelle collectée de l’ordre de 3,2 milliards FCFA pour le Togo (20,2 millions par banquier), et 9 milliards pour le Bénin (20,4 millions par banquier).
Le banquier ambulant est un travailleur indépendant dans la majorité des cas (86 % au Bénin, 93 % au Togo). A Cotonou quatre établissements emploient des collecteurs salariés.
La clientèle est d’abord celle des femmes commerçantes : à Cotonou, la clientèle féminine représente 79 % du total, 69 % à Abomey Bohicon ; au Togo, elle représente jusqu’à 90 %. Mais elle comprend aussi des artisans, fonctionnaires, écoliers et étudiants.
Si l’on trouve des mises minimales de 25 à 50 FCFA, la mise généralement pratiquée est de 100 FCFA dans 72 % des cas à Cotonou. A Lomé, les mises les plus fréquentes sont de 200 FCFA (35 % des cas), 300 FCFA (30 % des cas) et 500 FCFA (15 % des cas).
Le système de gestion est simple (cartes ou livrets à cases) et permet un enregistrement rapide des opérations auprès de la clientèle. Il est souple et, dans l’ensemble, les litiges sont rares et se règlent le plus souvent à l’amiable. Le risque le plus grand reste la fuite du banquier (malversation ou incapacité à rembourser l’épargne à la suite d’erreurs ou d’avances imprudentes) et il y a demande des banquiers ambulants à organiser la profession pour limiter ce risque.
Le coût d’intermédiation financière varie d’un produit à l’autre. La collecte de l’épargne fait l’objet d’un prélèvement mensuel de 3,3 % (en général la première mise sur 30) dans un contexte d’inflation différencié (3 % au Bénin, 15 % au Togo). Par contre, les avances en cours de cycle d’épargne sont gratuites. Le crédit donne lieu à des taux de prélèvement variables, de 5 % par mois (Bénin) à 10 et même 30 % par mois au Togo. Les activités d’avances et de crédit semblent plus répandues au Bénin.
Les banquiers ambulants, malgré la crise du secteur bancaire au Bénin (1988/1989), entretiennent des relations avec le secteur bancaire classique pour le dépôt de leurs excédents de trésorerie, 93 % des banquiers au Togo (83 % avec une banque, 10 % avec la CNE) et 76 % des banquiers au Bénin.
Leur dynamisme se manifeste par la création de structures de représentation, avec la MUSOTAL (Mutuelle de solidarité des tontiniers ambulants du Togo) et la vision à terme d’une structure professionnelle nationale, et l’ATOCO (Association des tontiniers de Cotonou) au Bénin en relation avec la banque tontinière OPERATIONS 71 de Cotonou qui leur offre la possibilité du refinancement (crédits) qu’ils ne peuvent avoir auprès du secteur bancaire classique.
Ils expriment le souhait d’une reconnaissance de leur profession par l’administration quitte à accepter en contrepartie une fiscalisation raisonnable de leur activité qu’ils veulent négocier. Ils voudraient également mieux organiser leurs activités et les protéger -contre la fuite de banquiers ambulants indélicats, le vol par des clients, etc.- en mettant en place une carte professionnelle, mais ils indiquent ne pas savoir comment s’y prendre.
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, Benín, Togo, Lomé, Cotonou
Microfinances pour le développement : diversité et enjeux des crédits alternatifs
Dynamisme et adaptation aux besoins de la clientèle (par le contact direct de la clientèle sur les lieux d’activités, l’évolution des produits avec avances et crédits) caractérisent les banquiers ambulants. La contrainte majeure reste la capacité d’épargne de leur clientèle, et l’accès de quelques-uns au crédit bancaire (Bénin) montre la voie à l’accroissement de leur rôle en tant qu’intermédiaires financiers dans le financement des petites activités économiques si l’accès à des ressources complémentaires était résolu.
Informe
IRAM=INSTITUT DE RECHERCHE ET D’APPLICATIONS DES METHODES DE DEVELOPPEMENT, Les banquiers ambulants au Bénin et au Togo, IRAM, 1992/04/00 (France)
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