Christophe VADON, Madeleine BARRY
07 / 1998
Madeleine BARRY, Enseignante à la retraite, Présidente de l’AFBO explique ceci : "Aujourd’hui, l’AFBO a de nombreuses activités : restaurant, séchage de fruits...Cela s’est développé petit à petit, d’abord avec l’alphabétisation puis avec l’activité de culture maraîchère (juste après 1977). Les femmes étaient des paysannes, il fallait respecter ce qu’elles voulaient faire, c’est à dire du maraîchage. Et avec l’alphabétisation et la gestion, elles savent ce qu’elles veulent faire, par exemple une activité artisanale (tissage), qui nécessite des connaissances techniques. Les femmes sont organisées au sein de groupements. Les besoins sont différents selon les groupements : moulin, eau, maraîchage...
Il y a beaucoup de besoins, mais avant tout, il est nécessaire de rendre les femmes plus responsables. Je leur dis qu’il s’agit d’apporter de la lumière dans ce que vous faites. Les femmes doivent être responsables pour pouvoir gérer. Par exemple pour le moulin. Comment trouver les moyens pour l’avoir ? Chaque femme qui adhère à l’AFBO donne 500 CFA (5 FF). C’était insuffisant ; alors les femmes ont organisé des kermesses pour écouler des produits qu’elles faisaient. Les recettes ont permis l’obtention du moulin au tout premier village pour lequel il était nécessaire, le moulin existant le plus proche étant à 13 km. L’encadrement des groupements est fait par des agents techniques agricoles. Jusque là, ces agents encadraient les groupements masculins, dans les villages. Dans le village du moulin, les maris étaient encadrés, les femmes ont voulu remettre sa gestion aux hommes. Quand il y a eu des recettes, les hommes les ont gardées. A la fin du mois, avec le bilan recettes/dépenses, les femmes se sont rendues compte qu’elles avaient été trompées, car il y avait 45 000 F CFA au lieu de 60 000 dans la caisse. Le vol était de 15 000 F CFA. Les femmes ont alors pris en main la gestion du moulin. Cela a été une bonne expérience pour comprendre la gestion et le reste. L problème, c’est que les femmes ne savent pas lire et écrire. "Si nous gardons la somme, disaient-elles, il y a des risques de vol". La réflexion pour trouver une solution à ce problème les a menées à l’alphabétisation.
Dans chaque village, un centre d’alphabétisation a été mis en place. Aujourd’hui, fin 1997, les cours d’alphabétisation concernent 1247 femmes. Au départ, il y avait seulement deux animatrices et cinq villages. La formation des animatrices peut durer deux ans. Le programme d’alphabétisation a été lancé en 1984, 7 ans après la création de l’AFBO, car cela a été un dur combat avec les hommes. Aujourd’hui, il existe 17 centres. Chaque village a un centre d’alphabétisation. Parmi les 1247 femmes qui suivent le programme, 248 ont reçu des formations spécifiques, c’est à dire qu’elles peuvent gérer. Elles font la gestion et réunissent les membres une fois par semaine pour faire un compte-rendu. Cela permet de trouver des solutions au fur et à mesure si quelque chose ne marche pas.
L’AFBO s’est également engagée dans des actions pour l’alimentation, depuis 2 ans. L’association fait une action de formation d’une semaine. Par exemple, les séances de préparation de bouillies, où l’on explique aux mamans comment bien nourrir leur enfant, permettent d’éviter la malnutrition. L’AFBO s’intéresse également à l’éducation des enfants. Dans la Province, le taux de scolarisation très faible. Il est nécessaire de contribuer à sa progression. Il existe aussi un comité de gestion des crédits pour les femmes qui octroie de petites sommes, de 5 000 à 18 000 CFA (50 à 180 FF), pour celles qui veulent faire du petit commerce. L’AFBO s’occupe également de la gestion d’un restaurant. Toutes ces activités on lieu en ville. Au niveau du village, l’activité est la culture maraîchère. Les 2/3 des adhérentes vivent en milieu rural. L’évaluation de toutes les activités est annuelle. Par exemple, pour l’alphabétisation, l’évaluateur vient de la coopération suisse. Il évalue les programmes et fait un résumé.
L’AFBO a peu de rapports avec l’administration. Cependant, comme il est difficile d’obtenir des parcelles de terrain, par exemple, pour construire l’école, il a été nécessaire de demander à la mairie. Et puis, on fait appel à nous dans le cadre de certaines réunions. L’AFBO utilise également certains services étatiques, notamment pour la formation technique. Elle fait appel à des techniciens, en les payant. L’association a seulement quelques formatrices, qui ont été formées à la DPEB (Direction Provinciale de l’Enseignement de Base). Il y a un recyclage tous les deux ans.
organización campesina, mujer, educación permanente, alfabetización
, Burkina Faso, Ouahigouya
Interne Ressources Humaines
Les activités d’une organisation de femmes (2/3 rurales, 1/3 urbaines) sont non seulement diverses mais liées entre elles. Par exemple, l’alphabétisation est demandée quand les femmes constatent que leur moulin est mal géré par les hommes. La progression et la diversification des activités vont de pair avec l’exercice direct de la responsabilité par les femmes.
Entretien de Madeleine Barry réalisé par Christoph Vadon, en janvier 98.
Les fiches DPH préparées par l’équipe du GRAD à partir d’interviews auprès de responsables d’organisations paysannes en zone sahélienne, sans cesse renouvelées depuis 1995, sont un instrument commode pour suivre la progression du monde rural de cette région.
Entretien avec Madeleine Barry en janvier 98.
Entrevista
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