Dépasser les stéréotypes dans une perspective de développement et de partenariat
03 / 2001
Contrairement à de nombreuses crises qui s’avèrent souvent bénéfiques, un génocide n’apporte jamais rien de bon : il corrompt le lien social en profondeur et la cicatrisation prendra plusieurs générations. Comme à la fin de la seconde guerre mondiale, on voudrait s’exclamer " plus jamais ça ! ".
En 1994, c’est l’horreur sur une partie de notre planète, au Rwanda, où les citoyens s’entretuent dans la plus grande confusion, pour des raisons soi-disant ethniques et présentées comme telles par la plupart des médias. Hutus et Tutsis se massacrent, entraînant des dizaines de milliers de morts et disparus et obligeant plus d’un million de personnes à l’exil.
Le document de travail "vers une nouvelle identité rwandaise" constitue les actes de la conférence de Bruxelles, organisée par l’association "Citoyens pour un Rwanda démocratique" née en Belgique (ancien pays colonisateur de cette partie de l’Afrique) à l’initiative de personnes horrifiées par le génocide mais aussi par l’indifférence qui régnait alors vis-à-vis de tels événements.
Ce document cherche à comprendre les causes d’une telle horreur, à préciser les responsabilités multiples et diverses, mais aussi à permettre de regarder le futur du Rwanda de façon positive et réaliste.
Il est en effet trop simple de limiter le génocide à un combat inter-ethnique, d’autant plus que Hutu et Tutsi ne sont pas des ethnies au sens traditionnel ou étymologique puisqu’ils parlent la même langue et ont approximativement les mêmes usages et coutumes. Il est d’ailleurs particulièrement difficile de reconnaître les uns parmi les autres malgré le fait que l’histoire récente du Rwanda soit marquée par le renforcement de telles identités à l’occasion des inscriptions à l’école, des quotas sur le marché du travail ou de façon plus ancienne à l’occasion de la révolution de 1959...
La société rwandaise (et par conséquence le génocide qu’elle a vu naître) ne peut pas se limiter à de telles séparations "ethniques". Le Rwanda était composé d’une quinzaine de clans qui mélangeaient les différentes origines. Il était aussi composé de différentes catégories socioprofessionnelles, dont certaines comme la petite bourgeoisie ont profité des événements des dernières décennies, ce qui a pu entraîner jalousie et envie.
En dehors des caractéristiques propres à la société rwandaise, il est important de noter la responsabilité de l’ancien colonisateur qui a trop souvent utilisé la séparation ethnique pour son propre intérêt dans la conduite des affaires et trop souvent attisé les passions même s’il ne les a pas lui-même créées de toutes pièces.
" ... Ce n’est pas l’ethnie qui produit la violence, mais bien une façon de la traduire, au profit des puissants, dans les rapports de force de plus en plus violents au cour desquels de plus en plus de laissés pour compte défendent des territoires d’inscription sociale de plus en plus étroits... "
Aujourd’hui, suite au génocide, le capital social (ensemble de relations sociales dont la propriété est de faciliter certaines actions individuelles ou collectives) est complètement détruit. La confiance entre les êtres a disparu ; les familles sont éclatées ; les villages, véritables entités géographiques qui unissaient les personnes d’origines différentes, n’ont plus de réalité ; les conflits intergénérationnels sont exacerbés, les enfants rejetant la société et regardant leurs aines avec mépris et incompréhension ; les nouveaux rapatriés ne sont plus reconnus par ceux qui sont restés.
La reconstitution du capital social, ne pourra se faire qu’avec le temps, grâce à la réhabilitation de valeurs traditionnelles et l’intégration de valeurs modernes comme la bonne Gouvernance, et la participation politique et économique des citoyens basée sur la décentralisation.
conflicto, genocidio, analisis, paz, cultura de paz, cultura de violencia, etnia, transición de la guerra a la paz, reconciliación nacional, identidad nacional
, Ruanda
A la lecture du document, on peut avoir une impression très mitigée sur son intérêt. Si l’analyse du passé nous permet de mieux comprendre à la fois la société rwandaise au moment des faits, sa déliquescence actuelle, et certaines causes du génocide, elle ne permet pas de comprendre toujours les raisons de l’ampleur du massacre.
On peut être rassuré par le "miracle" de la reconquête en un an des collines abandonnées du Rwanda, mais déçu par les trop rares propositions de reconstruction qui sont proposées.
Ce document n’est pas encore un document de prospective, ni même un document axé vers le futur, mais bien encore un document d’analyse du passé proche et lointain, comme si la phase expiatoire était loin d’être terminée...
Libro
Association des Citoyens pour un Rwanda démocratique, Vers une nouvelle identité rwandaise ?, Charles Léopold Mayer in. Document de travail, 1999 (France), 118, 60 p.
GEYSER (Groupe d’Etudes et de Services pour l’Economie des Ressources) - Rue Grande, 04870 Saint Michel l’Observatoire, FRANCE - Francia - www.geyser.asso.fr - geyser (@) geyser.asso.fr