Tamba YANCOUBA, Benoît LECOMTE
05 / 1998
Tamba YANCOUBA, directeur exécutif de la fondation FORAGE (Fondation des Organisations Rurales pour l’Agriculture et la Gestion Ecologique) :
"Il y a d’abord eu le regroupement de ressortissants des arrondissements de Bounkiling, de Kandé et de Marsassoum. Les gens de l’association étaient à Dakar, il n’y avait pas de travail direct avec la population. Il s’agissait d’un "parachutage". L’association des ressortissants du département de Sédhiou, avec l’implication des politiciens a eu de petits financements pour la santé, par exemple la construction de cases de santé. Les politiciens y avaient intérêt. Mais il faut laisser la politique, sinon les partenaires vont fuir et cela bloque le développement. Par exemple, il y avait un partenaire belge pour financer la formation des jeunes. Le coopérant a vérifié ce qui avait été dit dans le document et la réalité. Il a dit qu’il ne fallait pas espérer d’aide dans cette situation politicienne.
Il est nécessaire d’avoir un responsable au niveau de la base pour qu’il y ait restitution. "Les intellectuels sont à Dakar. Ils n’ont pas de responsabilité, ils ne connaissent pas la base, ils font n’importe quoi !" Il y a des problèmes de commissions, d’argent promis... Ils n’ont pas envie de quitter Dakar, sauf pour beaucoup d’argent mais l’association n’a pas de fonds. De plus, ils n’ont pas de poids sur la base, ils sont mal reçus. C’est un problème pour beaucoup d’associations. C’est une erreur de chercher des animateurs à Dakar. Finalement, il y a eu scission entre ceux qui reviennent de Dakar et travaillent à la base et les autres qui décidaient depuis là-bas; ce qui a provoqué la création de FORAGE. Ces gens se contentaient de dicter à la base ce qu’il fallait faire. Il n’y avait pas de suivi permanent au niveau de la base. C’était inefficace. Il était nécessaire de créer des structures de base qui continueraient, en l’absence des gens de Dakar, à travailler.
Pour aider le monde paysan à s’autofinancer et surtout à développer les initiatives locales, FORAGE a fait une recherche de formulaires dans les ambassades pour que les paysans viennent les remplir dans les sous-préfectures, et voir comment les paysans peuvent bénéficier d’appuis au niveau des ambassades. Mais c’est insuffisant et il est nécessaire de former les jeunes. Pour cela, FORAGE a pris contact avec CARITAS pour former une cinquantaine de jeunes pour rester au niveau de la base et aider les paysans pour la formation, ainsi qu’aider à l’auto-développement local. FORAGE recherche l’autonomie au lieu d’impliquer les responsables politiques dans son processus de développement. Les jeunes doivent prendre l’initiative eux-mêmes, avec certains appuis adultes. Les adultes sont avec FORAGE pour aider les jeunes et que les jeunes aident à toucher la population la plus démunie de la zone.
Il y a eu d’abord la constitution d’un "comité de réflexion de la base", puis l’écoute des ressortissants de la zone vivant à Dakar pour voir comment trouver des partenaires extérieures pour appuyer les initiatives de base. Puis il y a eu la création de FORAGE. C’est à dire le regroupement des groupes d’intérêt économique (GIE) de la zone. L’association n’est pas à but non-lucratif mais inscrite au tribunal comme un GIE qui doit promouvoir l’économie locale. Le choix de ce statut s’explique par le fait que pour créer des réserves, il faut promouvoir des activités rentables. FORAGE a mis sur pied un programme de commercialisation. Il y a de nombreux produits mais le problème prioritaire reste l’écoulement. Il est nécessaire d’appuyer les producteurs pour écouler leurs produits localement et sur les marchés extérieurs. FORAGE a tenté d’utiliser la cotisation des membres pour louer des camions de transporteurs. L’opération a compté jusqu’à 7 camions de chargement. Puis il y a eu le dépôt de documents de recherche de financement auprès de certains bailleurs extérieurs. L’idée était de créer des réserves et d’être forts pour créer un réseau de commercialisation dans la sous-région : faire des échanges entre le Sénégal, la Gambie, la Mauritanie et les 2 Guinées. Avant, il faut voir ce qu’il manque dans la zone puis dans les autres zones (par exemple en Guinée Bissau) pour échanger entre paysans. Le but est de renforcer l’économie locale et de devenir un ensemble de paysans fort avec une association entre eux permettant pour chacun l’accès aux banques, et une caution solidaire pour accéder à cette association."
organización campesina, historia, medio ambiente, éxodo rural, comercio, desarrollo local
, Senegal, Sédhiou
La fondation FORAGE est une Fédération sous-régionale d’Organisations Paysannes originale. En premier lieu, parce qu’elle a été fondée par des "ressortissants" (personnes nées dans cette zone de moyenne Casamance et habitant Dakar) et reprise par les villageois. En deuxième lieu, parce que ses activités sont pour l’essentiel le transport des productions et leur commerce. Cette dominante économique est exceptionnelle au Sénégal en 1998.
Entretien avec YANCOUBA Tamba réalisé en décembre 1997.
Entrevista
LECOMTE, Benoît
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