Le point de vue d’une équipe d’appui
05 / 2001
Des membres de l’ONG Voisins Mondiaux, une ONG des USA qui travaille en milieu rural dans la région de Ségou, témoignent :
"On a constaté qu’une fois que la femme est dans de bonnes conditions, cela libère l’homme. Cela c’est une constatation générale. Ici dans notre société la femme est à la charge de l’homme, cela c’est culturel, donc si la femme est aidée je pense que l’homme aussi sera aidé.
Je pense que quand les ONG ont commencé à venir dans les villages, elles se sont surtout basées sur les hommes, et cela depuis longtemps. Même si on prenait les besoins des femmes, on s’intéressait aux hommes pour résoudre les problèmes des femmes. Alors que si on voit les activités économiques du village ou bien même d’un pays, je crois que les femmes participent dans la majorité des cas. Si on prend le commerce, si on prend même l’agriculture, avant on croyait que c’était les hommes seulement, alors que la femme contribue beaucoup en agriculture. Par exemple elle travaille les champs de son mari, elle prépare les repas, en même temps elle fait du commerce, c’est elle qui <ENTRETIEN>t les enfants.
Si le taux d’alphabétisation est faible aujourd’hui, je crois que c’est dû à la non-alphabétisation des femmes. Si on prend la population des villages on peut dire que le taux d’analphabétisme et de 80 pour cent. Mais sur ces 80 pour cent, il y a combien de femmes ? Peut-être 50 pour cent sur les 80 pour cent. Donc je crois que depuis longtemps on ne s’est pas tellement intéressé à la femme. Et par exemple un homme, s’il fait de l’agriculture, il fait sa culture et après il s’en va en ville ou bien il se repose ou bien il fait de l’artisanat mais la femme, c’est les douze mois sur les douze mois. Que ce soit l’hivernage ou la période sèche, elle travaille, elle continue son travail, le commerce, la culture, tout. Donc je crois qu’il est très intéressant de les aider parce qu’elles ont plus d’activités que les hommes. C’est mon avis.
Vraiment on est resté beaucoup de temps sans s’intéresser aux femmes. Et pour que la balance soit redressée, un accent particulier doit être mis sur la femme. C’est cela qui explique qu’il faut plus d’actions pour les femmes. Mais je dirais aussi qu’il ne faut pas le faire selon l’approche femmes tout simplement mais peut-être qu’il faut le faire selon l’approche "genre". Ce n’est pas qu’il faut "femmes-femmes" (rires), mais plutôt "femmes-hommes défavorisés". Certaines ONG n’appuient que les femmes et ce n’est pas bon parce que dans le milieu pour atteindre la femme il faut passer par l’homme. Si on saute l’homme et qu’on reste sur la femme, on ne va pas aller loin, c’est une question de stratégie. Le développement est un tout, on ne peut pas faire de développement d’un seul côté, il faut prendre le développement dans sa globalité.
Au début de nos interventions le problème qui se posait c’était la présence des hommes et des femmes. Les femmes n’osaient pas être en désaccord avec les hommes, elles disaient ce que les hommes disaient. Alors qu’elles avaient des besoins différents. Avec nos interventions, les réunions de sensibilisation, les visites d’échanges etc, maintenant elles arrivent à s’exprimer même en présence des hommes. Parfois elles se plaignent du fait que les hommes prennent les décisions alors qu’elles-mêmes veulent le faire. Elles ne veulent plus que ce soit les hommes qui décident à leur place. Ceci est en grande partie dû aux visites d’échanges. Les visites d’échanges sont inter-villages et inter-OP aussi. Ce sont les groupements de femmes, d’un village à l’autre qui vont se rencontrer. Pour le moment je n’ai pas enregistré de réaction négative chez les hommes et, quand certains problèmes sont résolus, les hommes disent même que cela va les aider pour gagner plus. Donc elles sont l’appui des hommes. Une des difficultés pour les femmes, c’est de se rencontrer pour échanger. Souvent il y a des difficultés avec les moyens de déplacement. Pour le moment au niveau des organisations, ce qu’elles ont adopté comme moyen de transport c’est la charrette. Une autre difficulté spécifique pour les femmes, c’est leur temps de participation. On a constaté que dans la journée elles ont moins de temps pour la formation que les hommes. Parce que les femmes dans les villages doivent par exemple faire la cuisine, s’occuper des enfants et puis aller à la formation.
La solution qu’on a proposée, c’est de donner plus de temps aux femmes dans les formations qu’aux hommes. Une autre solution est de déplacer le lieu de la session. Parce que tant que les femmes sont au niveau de leur village elles sont obligées de préparer, de faire les travaux et les activités ménagères. Mais une fois qu’elles quittent le village, par exemple si elles viennent à Ségou, elles ne sont plus tenues de faire ces activités-là. Donc elles peuvent travailler sur la journée. Ce sont 2 stratégies possibles et chacune a ses avantages et ses inconvénients."
género, mujer, educación permanente, desigualdad social, desarrollo rural, ONG del Norte
, Mali, Ségou
Pour cette équipe malienne qui appuie des villages, il apparaît que "pour atteindre la femme, il faut passer par l’homme". Mais une fois que l’intérêt de ce dernier est éveillé, il convient de consacrer beaucoup plus de temps aux femmes par des formations à domicile et/ou par des sessions (loin des tâches quotidiennes qui mangent leur disponibilité) sous peine qu’il n’y ait jamais de rattrapage.
Fiche établie à partir d’un enregistrement des débats d’une réunion d’équipe. Voir les fiches extraites du même interview, n° GRAD : 465 et 467.
Entretien avec les membres de l’association VOISINS MONDIAUX.
Entrevista
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