La Fédération Artisans du Monde en France laisse une grande marge de manouvre aux créateurs de magasins à son enseigne. Ceux-ci, en majorité bénévoles, sont surtout tenus de suivre les principes de sa charte, et notamment de soutenir les partenaires producteurs par la vente de produits équitables, la participation à des campagnes de sensibilisation, etc. Le financement, la gestion et le type de structure sont libres.
La Fédération procure des indications sous la forme de trois fiches. La fiche Rechercher une boutique donne notamment des conseils juridiques pour la signature d’un bail commercial. Dans les deux autres fiches, la Fédération recommande d’établir un budget prévisionnel et un budget lancement boutique. Pour démarrer l’activité sous enseigne Artisans du Monde, il faut prévoir un budget minimum de 50 000 francs correspondant au stock. A cela, il faut ajouter le prix du local ou son loyer : une somme importante et difficile à réunir pour beaucoup de postulants.
Les aides sont peu nombreuses. L’accès aux financements traditionnels proposés par les organismes de crédit ou bailleurs de fonds est difficile à cause du manque de garanties et de la faible activité de ces petites structures. C’est pourquoi, depuis 1990, la Fédération Artisans du Monde gère un fonds de solidarité. Il est destiné à cofinancer la création de nouvelles associations ou à aider à court terme une boutique (pour l’achat de stocks avant Noël par exemple). La Fédération a dégagé une enveloppe de plus de 80 000 francs pour ces prêts dont le taux est de 3,5 %.
Un fonds mutuel bancaire
En 1997, Artisans du Monde a mis en place un fonds mutuel bancaire destiné à aider la création de boutiques ou leur développement (relocalisation, informatisation, aménagement...). Il s’agit d’un dépôt de garantie de 250 000 francs placé à la Banque Française de Crédit Coopératif (BFCC), laquelle s’engage à prêter, sauf veto de sa part, 750 000 francs aux projets retenus par le comité de crédit de la Fédération. Ce prêt est donc uniquement géré par la BFCC, contrairement au fonds de solidarité.
Pour demander ce cofinancement, l’association candidate doit présenter un projet d’investissement (prix du pas de porte ou du loyer, devis de travaux...)et un plan de financement. Le comité de crédit, composé de bénévoles et de permanents, examine alors le dossier et décide d’accorder ou non un prêt d’un montant de 20 à 100 000 francs au taux du marché, remboursable sur 3 à 7 ans. Le risque est partagé par la Fédération Artisans du Monde et la BFCC.
Des apports personnels
Ce cofinancement n’étant qu’une aide partielle et limitée, les créateurs d’une boutique doivent souvent chercher ailleurs la majeure partie des fonds. La solution la plus fréquente consiste en des apports personnels effectués par le groupe qui se lance dans le commerce équitable. Dons, prêts, prêts gratuits, bons d’achat... le cercle des amis et des connaissances est également mis à contribution.
La solidarité entre boutiques permet également des prêts et des aides pour lancer une nouvelle boutique. D’autres organisations, comme Emmaüs, le Comité catholique contre la faim et pour le développement ou la Fédération des Ouvres Laïques viennent souvent en aide aux créateurs (soutien logistique, dons...).
En tant qu’association Artisans du Monde, les créateurs d’une boutique peuvent aussi prétendre à une subvention municipale, mais celle-ci est d’un montant restreint. La mairie met parfois à disposition des locaux commerciaux à loyer réduit ou gratuit. Enfin, le mécénat et le parrainage d’une boutique sont difficiles, car le retour en terme de notoriété est infime pour l’entreprise qui mène ce genre d’action.
La grande marge de manouvre laissée par la fédération concerne en outre le type de structure mise en place pour gérer la boutique. Toutes les formes juridiques sont possibles du moment qu’il y a à la base une association Artisans du Monde à but non lucratif. Ainsi, la boutique installée rue Blomet à Paris est la propriété d’une Société Civile Immobilière et est gérée par une SARL filiale d’une association Artisans du Monde, toutes trois créées pour l’occasion avec les apports personnels de leurs créateurs. Il est également possible d’employer des objecteurs de conscience ou des salariés, dans la limite des moyens de l’association ou de l’entreprise. Autre solution possible : ne pas avoir de magasin, comme à Asnières (Hauts-de-Seine)où la vente s’effectue de façon ambulante à l’aide d’une camionnette.
Les boutiques n’ont comme obligation qu’un compte-rendu trimestriel de leur chiffre d’affaires à la Fédération. Elles en versent un pourcentage fixe à Artisans du Monde (2 % les deux premières années puis 4 %) auquel s’ajoute une cotisation statutaire annuelle.
L’exemple du CTM-MAG
La difficulté pour trouver des fonds autres que personnels et privés est donc réelle. Il n’existe à l’heure actuelle aucune structure d’aide spécifique pour le financement du commerce équitable en France. Cependant, des organisations comme les Cigale (Clubs d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne), la NEF (Nouvelle Economie Fraternelle)ou plus récemment la Caisse Solidaire de Roubaix soutiennent des actions de solidarité.
La réponse italienne à ce problème est à signaler. La coopérative de commerce équitable CTM (Cooperazione Terzo Mondo)s’est adjointe un organisme financier indépendant le CTM-MAG (Mutua Auto Gestione). Son objectif est de collecter des fonds pour soutenir et développer le commerce équitable italien. Le CTM-MAG rémunère les dépôts en permettant aux souscripteurs d’agir concrètement en faveur du commerce équitable, tout en bénéficiant de réductions d’impôts. Il investit la majorité des fonds dans le préfinancement de produits du CTM dans le Tiers Monde et dans le capital de lancement de boutiques.
Grâce au soutien de cette banque éthique, l’Italie a connu un développement très rapide de ses Magasins du Monde. Alors que le commerce équitable n’y a fait son apparition qu’au début des années 80, l’Italie dispose aujourd’hui de plus de 200 boutiques. En France, Artisans du Monde a été créé en 1974 et compte 75 magasins. Le manque de capital est sans doute le principal obstacle au développement des boutiques. En Allemagne et aux Pays-Bas, où le commerce équitable est très développé, des institutions financières (l’Ökobank et le FMO)soutiennent aussi de nombreuses implantations.
Pour une aide européenne
L’EFTA, association européenne du commerce équitable, recommandait, en 1994, la création d’une banque éthique qui aiderait et conseillerait financièrement les organisations de producteurs et les boutiques. Cette banque aurait des branches dans chaque Etat membre. A l’heure actuelle, cette proposition n’a pas été prise en considération par les institutions communautaires.
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Texto original
SOLAGRAL (Solidarité agricole et alimentaire) - n’existe plus