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De Kaboul à Marseille : voyage d’une Afghane

Récit d’un exil et vision d’un pays dans la tourmente

Pierre Yves GUIHENEUF

01 / 1998

"Tout ce qui est écrit est vrai". Nafi Nassim pose un préliminaire utile dans son "Avertissement au lecteur". Car ce récit de sa vie en Afghanistan, puis de sa fuite à travers l’Iran et le Pakistan pour arriver enfin en France, a quelque chose d’irréel.

Nafi Nassim, issue d’une famille cultivée et relativement aisée, connaît une enfance sans histoire, puis l’insouciance des jeunes étudiantes. Alors qu’elle est encore à l’école d’infirmières, elle épouse Sharif, un homme choisi pour elle par son père. Sharif lui permet de poursuivre ses études et, malgré ce mariage sans enthousiasme, la vie de Nafi s’organise sosu de bons auspices, entre la tradition des usages familiaux et l’autonomie revendiquée de la jeune femme, ouverte sur la modernité. Le couple a deux enfants, Djahed et Mariam.

Tout bascule en avril 1978, lors de la "révolution de Saur", le coup d’état de Taraki - pro-communiste - contre le gouvernement de Daoud. L’année suivante, les Soviétiques appelés en renfort investissent Kaboul. Sharif est soupçonnée de sympathie envers l’ancien régime et emprisonné avant de disparaître. "Le propre de la terreur, raconte Nafi, c’est qu’on ne sait pas ce qu’on vous reproche, ni quels crimes on vous impute, ni ce que les gens deviennent quand ils disparaissent, ni pourquoi les amis ne vous parlent plus. On constate, sans plus." L’étau se resserre : son frère disparaît à son tour, puis son fils est envoyé de force en formation en URSS. Nafi décide alors de fuir avec sa fille.

Grâce à une "passeuse", les deux femmes commencent un périlleux voyage en bus, puis en fourgon à bestiaux, enfin en tracteur, sans connaître leur destination. Lors du passage d’un poste frontière, l’une de leurs compagnes d’exil est tuée par un garde qui fait feu sur leur véhicule. Après diverses péripéties, elles parviennent à Téhéran, où vit un ami de la soeur de Nafi. Celle-ci lui confie sa fille, puis repart à Kaboul pour chercher sa mère, sa soeur et une amie russe. Le second voyage, aussi difficile, est compliqué encore par un accueil plus réservé des autorités iraniennes envers des réfugiés qui deviennent encombrants. Les fonctionnaires emprisonnent d’abord les voyageuses, puis consentent à les relâcher sur l’intervention insistante de l’ami iranien de la famille.

Celle-ci s’installe temporairement à Téhéran, où Nafi trouve un emploi d’infirmière. Mais sous la loi islamique, le travail n’est pas facile, notamment lorsqu’on interdit à une femme de procéder à certains soins sur des hommes et que les infirmiers qualifiés manquent... Nafi découvre aussi l’hypocrisie qui consiste à obliger les femmes à se couvrir pour ne pas "provoquer" le regard des hommes, alors que ceux-ci, avec ou sans tchador, ne sont pas avares de gestes déplacés dans les lieux publics.

Réfugiée tout juste tolérée en Iran, Nafi demande l’exil politique en France. Avec sa fille, elle obtient un visa de justesse, puis parvient à atteindre Marseille, où elle a gardé des amis. Son dipôme d’infirmière n’étant pas reconnu, elle doit reprendre des études.

Les nouvelles qu’elle reçoit de son fils Djahed son maigres. Celui-ci est en sécurité à Minks, où il étudie, jusqu’au moment où il est recruté par l’armée pour aller se battre contre les maquisards de son propre pays. Nafi décide alors d’aller le chercher. Laissant en France sa fille, qui prépare le bac, elle parvient au Pakistan grâce à des contacts avec des ONG et avec un parti d’opposition au régime afghan. Un court séjour à Peshawar lui permet de découvrir le monde complexe des organisations humanitaires, chez qui on compte à la fois des personnes qualifiées et déterminées et des amateurs en mal d’aventures, aux initiatives parfois criminelles. Elle connaît également le courage de certains résistants afghans et les détournements de l’aide internationale opérés par d’autres...

Après avoir essayé un contact indirect avec son fils, elle part elle-même à Kaboul. Sa maison, laissée vacante depuis sept ans, est délabrée et squattée par une nouvelle famille, mais Djahed y revient parfois en permission. Au bout de plusieurs jours d’une interminable attente, il revient s’y reposer entre deux missions. Retrouvailles émouvantes après des années de séparation. Aidés par des amis résistants, la mère et son fils parviennent à fuir l’Afghanistan et à rejoindre Mariam à Marseille.

L’histoire aurait pu se terminer là, Nafi ayant refait sa vie avec un compagnon français. Mais, quatorze ans après sa disparition, Sharif est identifié au Pakistan. Ayant cru lui aussi sa femme morte, il s’est remarié... Les anciens époux reprennent contact, puis chacun poursuit la route tracée par les événements.

Aujourd’hui, Nafi est naturalisée française ainsi que ses deux enfants. Soulagée que ses incroyables périples dans un pays en proie à la guerre civile se soient finalement bien terminés, elle déclare être heureuse que la France soit pour elle un pays d’asile. Mais, elle ne peut s’empêcher de constater que "ce serait encore mieux si personne n’avait besoin d’asile".

Palabras claves

guerra civil, refugiado político, refugiado, inmigrado


, Afganistán, Francia

dosier

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et les nouveaux défis du XXIe siècle

Fuente

Libro

NASSIM, Nafi, De Kaboul à Marseille, Indigo, 1998 (France)

GEYSER (Groupe d’Etudes et de Services pour l’Economie des Ressources) - Rue Grande, 04870 Saint Michel l’Observatoire, FRANCE - Francia - www.geyser.asso.fr - geyser (@) geyser.asso.fr

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