Au Burkina Faso, de très nombreux organismes proposent des crédits aux villageois sans tenir compte de l’utilisation qui peut en être faite et de ce que font déjà les uns et les autres
02 / 1999
Dans le nord-ouest du Burkina, une ONG Sahel Action a, au lendemain de la sécheresse de 1988/89, expérimenté puis lancé un système de crédit avec l’appui technique du CIRAD (Centre de coopération internationale en recheche agronomique pour le développement)et de la Caisse nationale de crédit agricole.
Les femmes qui remboursent mieux que les hommes ont été privilégiées et des systèmes de crédit sur mesure leur ont été proposés : le crédit à remboursement hebdomadaire qui convient bien au petit commerce, le ’crédit stockage de céréales’ pour acheter les céréales au moment de la récolte et les revendre plus tard et le ’crédit embouche’ pour acheter un mouton, l’engraisser et le revendre 6 mois plus tard.
Le système a bien fonctionné tant que le nombre de femmes accédant au crédit est resté limité. Mais en 1997 elles étaient 30 000 dans l’ensemble de la zone. Dans un seul village isolé, Kourra Bagré, 400 femmes ont contracté un crédit et la population ne peut plus absorber les marchandises mises en vente. "Les 400 femmes du village sont endettées, du coup personne n’achète ce que l’autre vend au marché", remarque un agent de recouvrement des prêts. "Chacun est devenu commerçant", constate simplement une femme, qui se demande comment elle pourra vendre le bélier qu’elle engraisse maintenant que tout le monde fait de l’embouche.
"Toutes les femmes exercent les mêmes activités. Pour pouvoir vendre, les femmes sont obligées de diminuer leur marge bénéficiaire. Leur trésorerie s’en ressent et il y a une tendance naturelle à demander plus de crédit. C’est un cercle vicieux dans lequel les gens se surendettent, avec des activités de moins en moins rentables. Tout le monde est essoufflé par le crédit et la pression sociale qui doit pousser à honorer ses engagements se desserre. Le système est gelé", diagnostique Jacques Marzin,conseiller technique à Sahel Action.
Les retards de paiement se sont accumulés et la très mauvaise récolte de 1997 a accentué le phénomène. Des villages entiers croulent maintenant sous les dettes : 4 millions de F cfa pour le seul village de Kourra Bagré. A la grande honte des villageois traumatisés par ce surendettement.
Ce phénomène se retrouve ailleurs au Burkina car le crédit rural est à la mode et les intervenants se sont multipliés. De 5 institutions en 1988, le pays en compte aujourd’hui 60. Chaque organisme ou bailleur de fonds a sa manière de faire. Certains prêtent aux pauvres sans intérêts, d’autres veulent responsabiliser les populations et faire du crédit un outil de développement. En fait, la confusion règne et les villageois s’endettent à plusieurs sources en même temps sans qu’il y ait de contrôle régulateur.
Le crédit ne suffit pas à développer, il faut trouver quelles activités rentables développer avec ces prêts, en particulier des productions qui puissent être vendues à l’extérieur pour accroître la masse monétaire dans le village.
cooperación, crédito rural, sector informal
, Burkina Faso, Ouahigouya
Mettre la coopération européenne au service des acteurs et des processus de développement
Dans le domaine du crédit, le manque de coordination entre intervenants dans une même zone finit par être nuisible aux populations. En outre, le crédit à lui seul ne développe pas comme on l’a cru trop souvent ces dernières années.
[Fiche produite dans le cadre du débat public "Acteurs et processus de la coopération", appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé (relations Union Européenne/Pays ACP). Lancé à l’initiative de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen et soutenu par la Commission Européenne, ce débat est animé par la FPH.]
Artículos y dossiers
DADJO, Crépin Hilaire, SYFIA, Trop de crédit tue le crédit, PERISCOOP in. Bulletin de presse SYFIA, 1998/02 (France), 109
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