12 / 1998
Depuis dix ans, des agriculteurs et les acteurs du développement rural de la Mayenne (Ouest de la France)et de l’Etat du Santa Catarina (Sud du Brésil)se rencontrent régulièrement et échangent leurs expériences en matière de développement rural, grâce à la collaboration de deux ONG, l’ALDIS (Action Locale pour un Développement Solidaire)et le CEPAGRO (Centro de Estudo e de Promoçao da Agricultura de Grupo).
Les premiers contacts entre Brésiliens et Mayennais se sont faits en 1986, lors de la venue d’un Brésilien en stage dans la région française. Ces relations, au départ personnelles, se sont formalisées en s’intégrant dans un programme gouvernemental de coopération franco-brésilien. Il s’agit d’un programme de développement de la petite agriculture familiale au Brésil, géré par le GRET en France et EMBRATER au Brésil selon des accords cadres. En 1990, les structures brésiliennes furent modifiées, une nouvelle ONG, CEPAGRO fut créée.
Le CEPAGRO est une ONG d’appui et non de représentation, formée de diverses organisations agricoles catarinenses. Elle fut créée en 1990, à l’initiative d’un groupe de petits producteurs et de techniciens intéressés par la promotion de l’agriculture de groupe. Ses secteurs d’activités sont la formation de formateurs, les petites agro-industries, le tourisme rural, le développement rural intégré, le crédit, les échanges techniques internationaux et la divulgation d’un bulletin. L’ALDIS est, quant à elle, une ONG mayennaise créée en 1984 à l’initiative d’agriculteurs et de ruraux sensibles aux problèmes Nord-Sud. Elle s’est fixé pour objectif d’intégrer une dimension internationale dans le développement local, de prendre en compte les ressources naturelles, d’informer et de sensibiliser. Elle agit aussi bien au niveau local qu’international (Cameroun, Pologne, Inde, Brésil).
L’enjeu de ce partenariat est d’accompagner la mise en place et le développement de projets initiés par la population locale et les organisations de base et d’appuyer la formation des acteurs (agents de développement, animateurs de groupe, agriculteurs et responsables professionnels). Des objectifs plus spécifiques ont été élaborés, notamment en matière juridique, de formation et d’organisation, avec le souci permanent de respect de l’environnement.
Cette coopération se concrétise par des missions d’échanges de personnes et d’idées sur des thèmes définis annuellement par l’ALDIS et CEPAGRO. Ces échanges se font dans le cadre de formation ou de séminaires de courte durée sur un thème bien défini et de stages de longue durée pour des animateurs ou formateurs. Cela concerne à 45 % des paysans mais il y a aussi des techniciens ou des responsables politiques.
Début 1996, 167 personnes avaient pu bénéficier de formations techniques, concernant par exemple l’élevage porcin, la gestion d’exploitation agricole. Des formations globales sont également dispensées. Elles intégrent entre autre la dimension d’organisation, la formation par alternance. Dans ce cadre, divers acteurs du développement local sont sollicités, comme par exemple la fédération départementale des CUMA, pour l’agriculture de groupe ou les Maisons Familiales Rurales, pour la formation d’agriculteurs par alternance.
Cette coopération est fondée sur le principe d’échanges humains. En aucun cas, il n’y a des financements d’actions de la part des Français. Il s’agit d’échanger des expériences et de voir, s’il y a lieu, comment elles peuvent être réutilisées au Brésil, et réciproquement en France. Certains projets mis en oeuvre par les Brésiliens découlent de ces échanges, comme par exemple la création d’une mini-industrie laitière, ou encore le développement des Casa Familiares Rurais dans le Santa Catarina, fortement incité par le CEPAGRO.
Comme l’a mis en évidence l’évaluation réalisée par le GRET sur le programme global franco brésilien, des projets concrets ont également vu le jour à la suite de ces échanges, dans le domaine de la formation par alternance, de l’organisation de groupes de petits producteurs, du développement du tourisme rural. Peu ont abouti sur les questions juridiques et foncières pour lesquelles les débats sont plus difficiles.
En revanche, l’impact est moins fort en France, où les responsables de l’ALDIS n’ont pas réussi à mobiliser les politiques locaux pour appuyer leurs projets. Toutefois, ces échanges enrichissent les individus, et des projets de coopération universitaire pourraient voir le jour. Un des axes de travail du CEPAGRO, la création de coopératives de crédit, est étudié afin d’être repris et développé en France, sous forme de collectes et d’applications locales l’épargne. L’évaluation du GRET a également et surtout mis en évidence l’impact de ces échanges au Brésil en matière de reconnaissance institutionnelle : le CEPAGRO a obtenu une reconnaissance officielle pour son savoir-faire de technicien et de formateur.
Cette coopération, rendue possible dès le départ par les accords bilatéraux franco-brésiliens et par le soutien financier du Ministère des Affaires Etrangères, souffre cependant de cette dépendance financière. En effet, les accords cadres GRET / FINEP n’ont pas été renouvelés en 1994, ce qui pose de graves difficultés financières à l’ALDIS. Cette dernière a obtenu un apport ponctuel de la ville de Laval, resté sans suite faute de volonté politique. Il ne reste que de faibles moyens humains à l’ALDIS. Le bénévolat et le militantisme sont fortement sollicités afin d’accueillir dans de bonnes conditions des Brésiliens. La participation des agriculteurs de la région est à ce titre exemplaire, ils ont toujours assuré l’accueil de leurs partenaires. De même,au Brésil, l’accueil est assuré par les associations membres du CEPAGRO.
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Comme le souligne le secrétaire exécutif du CEPAGRO, cette coopération fut riche pour les idées, mais jamais pour les financements. Or, le peu de moyens financiers indépendants des deux partenaires risque d’être fatal à cette coopération innovatrice en matière d’échanges. Son originalité vient de sa nature, ce n’est pas une coopération technique, bien qu’elle touche des professionnels du même milieu, mais bien un échange d’expérience entre acteurs du développement rural français et brésiliens. Cette coopération entre l’ALDIS et CEPAGRO est basée sur un partenariat direct entre organisations de producteurs. La confrontation d’expériences entre techniciens, responsables politiques et autres acteurs du développement rural est source d’innovation et conduit les deux parties à s’interroger sur leurs propres expériences et à modifier leur cadre de référence.
Contact : ALDIS=ACTION LOCALE POUR UN DEVELOPPEMENT SOLIDAIRE, 12,rue Sarchu Servinière - 53000 Laval. Tel : 01.43.56.24.72
Jean Yves Griot est administrateur de l’Aldis.
Entretien avec GRIOT, Jean Yves
Entrevista
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CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - Francia - cedal (@) globenet.org