12 / 1998
L’ Association de Solidarité avec les Peuples d’Amérique Latine (ASPAL)est un réseau de commerce équitable en faveur des paysans-artisans latino-américains. Elle est née en 1979, au retour de coopérants français en Argentine, qui avaient subi une arrestation suite à leur engagement auprès des ligues agraires. Leur analyse concluait à la nécessité de soutenir les paysans les plus fragiles, notamment sur le plan organisationnel, et de leur fournir un soutien économique durable, sans que le financeur impose son point de vue ni ses priorités. Dès le début l’ASPAL souhaitait promouvoir une conception de la solidarité ne relevant pas du projet technique mais d’une relation humaine. Elle entendait par ailleurs s’inscrire dans l’économique. Elle a renforcé cet aspect de ses activités, au dépens d’une action plus politique. Son réseau de partenaires latino-américains s’est élargi ces dernières années et l’ASPAL s’efforce de mieux connaître le contexte latino-américain dans son ensemble, en créant des outils en ce sens.
L’ASPAL offre un débouché commercial à de petits artisans, à partir d’un réseau solidaire. Le lien avec les producteurs se fait à travers des organisations locales. L’ASPAL n’a donc pas de personnel sur place. Ainsi, au Pérou, un groupe paysan peut prendre contact avec le partenaire de l’ASPAL, la COSART, qui tente de définir son objectif. Cependant, au préalable, celle-ci demande au groupe de : s’organiser collectivement; rendre compte à sa communauté d’origine; produire de l’artisanat; améliorer ses techniques de production si nécessaire; consacrer une partie des gains à l’action collective; ne pas recevoir l’argent avant de travailler. Ce dernier point permet de tester la solidité du groupe. Parmi ces conditions se dégage donc le renforcement des solidarités de base, entre membres du groupe et avec son environnement. L’ASPAL ne sélectionne pas les groupes de producteurs, tâche qui revient à la COSART. Lorsque le groupe a un produit commercialisable, l’ASPAL teste l’échantillon et propose des alternatives s’il s’avère invendable.
En France, l’objectif de l’ASPAL est de vendre et informer. Depuis quelques années, l’ASPAL a élargi cet objectif à la généralisation du concept de commerce équitable, donc à une redéfinition des relations entre les peuples. Il ne s’agit plus d’aider tel ou tel groupe, ni de créer une relation privilégiée entre ces groupes et les membres de l’ASPAL.
La principale difficulté de l’ASPAL est culturelle. Dans une prespective de changement durable, les coordinations latino-américaines et l’ASPAL jouent le rôle d’interface entre les producteurs et le système capitaliste libéral, qui, de fait, domine l’économie mondiale. Ce rôle est à remplir non seulement pour la commercialisation des produits, mais surtout pour que les producteurs maîtrisent mieux les rouages de ce type d’économie. Or, par exemple, certains producteurs pratiquent presque exclusivement une économie de troc. Cette fonction d’interface est d’autant plus difficile à remplir qu’aux blocages culturels s’ajoutent des blocages politiques. Ainsi les coordinations latino-américaines cherchent à construire une alternative radicale au système capitaliste et en refusent donc tous les aspects, même s’ils sont incontournables, ou s’ils peuvent s’avérer profitables. Par ailleurs, il est plus facile en France de penser aux améliorations globales pouvant être apportés au fonctionnement. Les coordinations latino-américaines, quant à elles, fonctionnent avec des moyens insuffisants et subissent la violence de la situation des producteurs. Sur ce constat, L’ASPAL a entrepris de mieux s’informer sur le contexte latino-américain afin de coller à la réalité et à l’actualité, plutôt que de s’en tenir à l’image que chacun s’en fait. L’ASPAL a aussi entrepris un gros travail d’évaluation et de suivi à la suite d’une crise grave.
L’impact de l’action est toutefois conséquente. Les groupes de producteurs ont vu leur capacité organisationnelle se renforcer. Ils ont pu imposer de meilleurs prix pour leurs débouchés locaux. Concrètement, leur communauté a bénéficié de leurs progrès par le financement d’équipements : écoles, centres de soin, épiceries alternatives, systèmes de cultures. L’obligation de solidarité a permis d’enclencher des dynamiques très positives.
L’ASPAL compte élargir le nombre de ses partenaires et faire partager sa longue expérience tout comme son savoir-faire. Elle souhaite renforcer son partenariat avec les OSI de développement durable, en particulier celles qui travaillent dans le même domaine, espérant mieux promouvoir le concept de commerce équitable.
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Cette organisation issue comme tant d’autres de l’engagement de coopérants à leur retour, tente d’évoluer vers un lien de coopération moins affectif et moins paternaliste. Elle tente de tenir compte des réalités locales, et donner une dimension plus globale à son action. L’effort d’auto-évaluation et d’information est en ce sens très significatif. L’expérience de l’ASPAL met en évidence que, si proches soient les cultures européennes et latino-américaines, il ne faut pas négliger les différences et faire, toujours plus, l’effort de se connaître mutuellement. Yves Le Turdu, coordinateur de l’ASPAL, conclut: " La solidarité, ça ne se décrète pas, ça se vit: ce n’est pas toujours facile de se comprendre, même entre amis. Une solidarité qui privilégie l’humain sur le technique est aussi exigeante. On ne part pas quand une exportation est finie, comme on peut partir après la réalisation d’une étape d’un projet. Ici, la relation de partenariat prend davantage de sens. De même il est important d’établir une relation économique transparente pour que le partenaire du Sud sache que l’argent ne tombe pas du ciel en France, et qu’il faut chercher de part et d’autre les moyens d’optimiser notre fonctionnement.
Contact : ASPAL=Association de solidarité avec les peuples d’Amériqeu latine, 68bis rue de la Boëme, 16440 Mouthiers s/Boëme
Entrevista
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CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - Francia - cedal (@) globenet.org