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Quel avenir pour les services de proximité ?

La confusion persistante entre emplois de proximité et réinsertion tend paradoxalement à empêcher un véritable développement de ce secteur

Elisabeth BOURGUINAT

10 / 1998

Le développement des services de proximité est une des solutions les plus fréquemment avancées pour lutter contre le chômage : il s’agit d’emplois locaux - non susceptibles de délocalisation - et nombre d’entre eux sont des services à la personne, fort consommateurs de temps. Mais la mise en ouvre concrète de cette solution pose de nombreux problèmes, recensés par Mari-Noëlle Jego-Laveissière (ingénieur des Télécommunications)et Matthieu Schuler (Ingénieur des Mines).

Ceux-ci rappellent que la notion d’emploi recouvre en fait trois éléments : l’activité, qui est toute forme d’occupation du temps de l’homme ; la création de valeur qu’induit cette activité sous forme monétaire ; le cadre juridique et réglementaire dans lequel cette activité s’inscrit.

Il est clair qu’il existe d’énormes gisements d’activités correspondant à des services de proximité ; en revanche, il est difficile de les rendre solvables, et à supposer que l’Etat en finance une grande partie, il reste à déterminer s’il vaut mieux qu’il soutienne l’offre (sous forme de subventions)ou la demande (sous forme de primes, du type des primes encourageant l’achat d’automobiles neuves): la première solution crée des distorsions de concurrence et le secteur marchand se trouve lésé ; la deuxième a un coût pharaonique. Enfin, le cadre juridique de ce type d’emplois reste encore beaucoup trop complexe par rapport à la nature des services demandés, et beaucoup reculent devant le nombre de formulaires à remplir avant de pouvoir recourir à ces services.

Mais la question décisive consiste à savoir qui a envie de recourir à ces services et qui a envie de les assurer.

En effet, personne n’utilisera durablement ces services au seul motif qu’ils créent des emplois ; il est impératif qu’un service corresponde à une véritable attente. Or les services qui répondent à de véritables nécessités - et que les orateurs regroupent sous le modèle de la " cantine " - sont généralement pris en charge par la collectivité et subventionnés ; ils pourraient être développés, mais toujours aux frais de l’Etat ou des collectivités locales.

D’autres types de services, du type Pizza Hut (livraison de pizzas à domicile)ou Midas (entretien automobile rapide), peuvent être imaginés, mais ils doivent faire l’objet d’une politique marketing très forte pour faire naître le désir de services nouveaux ; or les petites structures associatives n’ont guère les moyens d’assurer une véritable promotion des services qu’elles offrent, et peu de grands groupes s’intéressent au développement de ce type d’activités.

Et lorsque le CNPF a, récemment, émis des propositions, elles étaient assorties de demandes de subventions ! Ceci reflète la tendance, très répandue, à confondre emplois de proximité et réinsertion, en se fondant sur une équation facile mais largement trompeuse : l’association Accueil et Service, qui aide des personnes âgées dépendantes à rester chez elles en les accompagnant dans leur vie quotidienne, a ainsi dû reformuler son objectif initial de réinsertion des exclus : la situation d’exclu n’était guère compatible avec les qualités et l’équilibre nécessaires pour assurer la relation avec les personnes âgées.

Tout se passe comme si l’on voyait bien quelles ressources les services de proximité offrent en termes d’emplois, mais que l’on n’avait pas encore pris la mesure des marchés qui existent ou peuvent être suscités en ce domaine, et que l’on continuait obstinément à les ranger dans le secteur social. Et pourtant, qui envisagerait de subventionner Pizza Hut ou Midas ?

Un changement d’optique s’impose également du côté des prestataires de ces services. Du fait du rôle très large joué par les associations et les bénévoles dans les services de proximité, du fait aussi de la confusion entre services de proximité et réinsertion, leur image est un peu celle de " bras cassés ". Ce genre de profession attire d’autant moins de candidats qu’en France, la notion de " service " est culturellement dévalorisée : le service à autrui est ressenti comme dégradant, avilissant.

L’association Accueil et Service a montré de quelle importance était la valorisation et la professionnalisation des personnels ; celles-ci ne peuvent être assurées que par le biais d’une institution mandataire qui sert de relais entre le client et le prestataire. Dans cette association, par exemple, le service est organisé de telle sorte que chaque personne âgée voie plusieurs intervenants différents, d’abord pour élargir ses relations, mais aussi pour casser les relations exclusives et éventuellement " abusives " qui risqueraient d’apparaître ; dans la relation domestique traditionnelle, ce type de garantie ne peut être apporté. Or la valorisation de l’employé semble être la seule façon de transformer les " petits boulots " en véritables emplois, et de casser l’image d’un secteur dont la seule finalité serait d’occuper un public en difficulté.

Palabras claves

servicio de proximidad, empleo, empresa, subvención, relaciones sociales, desempleo, lucha contra el desempleo, solidaridad


, Francia

Comentarios

Les multiples confusions que génère la réflexion sur les services de proximité sont très significatives de notre difficulté à concevoir une nouvelle définition du travail. La raréfaction de celui-ci a rendu cruellement sensible tout ce que l’on perd en perdant son emploi : non seulement des revenus, mais aussi du lien social et parfois le sens même de l’existence, puisqu’on se sent désormais inutile pour la société.

Financer l’emploi pour l’emploi conduit à maintenir des gens dans le statut d’assistés et ne répare que très imparfaitement le lien social et la perte du sens ; par ailleurs, il est évident que le secteur marchand ne pourra prendre en charge que des prestations et des clientèles très ciblées. Pour répondre aux besoins insatisfaits tout en fournissant du travail à ceux qui n’en ont pas - et vivent de toute façon des deniers publics - ne serait-il pas temps de moderniser et de redéfinir la notion de service public ?

Fuente

Actas de coloquio, encuentro, seminario,…

JEGO LAVEISSIERE, Marie Noëlle, SCHULER, Mathieu, LEFEBVRE, Pascal, Ecole de Paris de Management, Besoin d'emplois, envie de services : quel avenir pour les services de proximité ? , Association des Amis de l in. Les Annales de l'Ecole de Paris, 1997 (France), III, Le mémoire présenté par les deux orateurs a été piloté par Michel Berry, il est disponible à l'Ecole de Paris.

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