Vidéo et télévision alternative en France

La Fédération nationale Les vidéos des pays et des quartiers (France)milite depuis près de dix ans pour le développement d’une télévision alternative qui intègre à la fois une communication de proximité et une nécessaire "écologie audiovisuelle". Parmi la vingtaine de membres de cette fédération, trois organisations illustrent bien la diversité et l’exemplarité de ce combat.

TÉLÉ MILLEVACHES

...est une association sans but lucratif, créée en avril 1986, autour d’un magazine vidéo d’information locale dans le but de diffuser de l’information et de développer les échanges entre gens dispersés sur un vaste territoire. Télé Millevaches fait figure de pionnière en ce qui concerne la communication en milieu rural. Avec l’aide de deux professionnels salariés, d’un journaliste et de stagiaires, dix bénévoles assurent la réalisation de reportages et animent le comité de rédaction du magazine. Depuis 1986, plus de cent numéros d’une durée d’environ 1h30 ont déjà été réalisés. Ce magazine est diffusé sur cassettes VHS dans près de 100 lieux publics de la région soit des cafés, des salles de fête, etc.

Cette initiative a récemment bénéficié de l’aide de l’Union Européenne et pensait pouvoir mettre en oeuvre un projet de diffusion particulièrement novateur. Il s’agissait de télécharger durant la nuit, en dehors des périodes normales d’émissions, les 100 magnétoscopes de diffusion dispersés dans cette vaste région en envoyant un signal crypté sur le canal hertzien de la 3e chaîne nationale française. Ce projet particulièrement intéressant se heurte pour le moment au refus catégorique de la chaîne nationale en question. Donc, Télé Millevaches continue à faire, chaque mois, 100 copies VHS et à les acheminer dans 100 lieux de diffusion.

CANAL NORD

...est la première et la plus connue des "télévisions de quartier" françaises mais elle n’est pas une télévision comme les autres. D’une part, elle diffuse sur une zone très particulière, soit trois quartiers défavorisés de la ville d’Amiens en Picardie, un ensemble de 8 000 logements H.L.M. disposant d’antennes collectives. Présentement, les différents blocs d’immeubles sont illégalement interconnectés par voie hertzienne mais l’impact de l’expérience est tel et les services rendus si évidents que cette illégalité se prolonge sans trop de problème. D’autre part, il ne s’agit pas d’une diffusion permanente. Canal Nord organise 2 ou 3 "fêtes de la télévision" chaque année,qui comprennent environ 16 heures de programmes originaux diffusés sur une période de plusieurs jours.

Le contenu est lui aussi très original. Pour faire ses émissions, Canal Nord s’installe dans un appartement semblable aux 8 000 autres qui l’entourent créant ainsi un lieu d’expression, de communication sociale et de rencontre entre des gens et des ethnies qui ne se rencontrent jamais. Il s’agit de valoriser un quartier sur lequel les média ont tendance à porter un regard négatif. Canal Nord est aussi un lieu unique de formation pour les nombreux bénévoles et stagiaires qui viennent aider les 3 permanents qui y travaillent. Il est étonnant de constater que l’expérience n’ait pas été davantage reproduite ailleurs en France.

TRÉGOR VIDÉO

Afin d’expérimenter la technologie de la fibre optique, le Centre National d’Études des Télécommunications installé dans le Trégor, construisait, à la fin des années 70, un réseau grandeur nature s’étendant sur plusieurs communes. Ici pas d’abonnés mais un ensemble de 5 salles publiques reliées entre elles par le réseau de vidéocommunication du Trégor. Trégor Vidéo, allant au-delà de la simple animation du réseau, se mettait au service de la région. C’est un centre de production et de diffusion de programmes vidéo de proximité, et aussi un centre de ressources qui développe une importante activité de formation et en particulier, en partenariat avec l’éducation nationale, des classes de découverte scientifique en télécommunication. C’est sans doute là une activité unique en France.

à la fin de 1992, Trégor Vidéo montait un projet de diffusion hertzienne afin de toucher l’ensemble des habitants. Toutefois, ce projet a été refusé uniquement parce qu’il ne s’inscrivait pas dans le cadre d’un événement local important tel qu’un festival, une foire, etc. Pourtant, l’événement local était justement l’arrivée d’une nouvelle télévision plus proche des habitants!