04 / 1998
Les politiques intégrationistes vis-à-vis des populations indigènes, appliquées dans une grande partie du monde jusqu’aux années 1950, ont progressivement été remplacées par des politiques fondées sur la reconnaissance de la spécificité de chaque peuple. Aujourd’hui il existe un certain consensus autour des droits de ces populations : protection de leurs terres, promotion de leurs langues et cultures, ainsi que des droits économiques, sociaux et politiques.
Plus difficile a été cependant l’acceptation par les États des droits aux territoires ancestraux revendiqués aujourd’hui par les peuples indigènes, aux ressources naturelles du sol et du sous-sol. Ces territoires se trouvent souvent au pouvoir d’individus ou de groupes économiques non-indigènes. En outre, la reconnaissance des ces territoires par l’État, implique dans la plupart des cas la mise en question de la division administrative et territoriale du pays.
Plus difficile encore a été la reconnaissance du droit des communautés indigènes à gérer ses affaires dans leurs territoires, en accord avec leurs traditions et dans le cadre de leurs propres institutions. La demande d’autonomie ou d’autogouvernement est perçue généralement par les États comme attentatoire à l’unité nationale et comme une limitation de leur souveraineté. Or, la revendication territoriale et la demande d’autonomie sont devenues les deux revendications principales des mouvements indigènes dans les forums nationaux et internationaux.
Toutefois, on a pu constater ces dernières années certaines avancées dans ce domaine. Au niveau du droit international, la Déclaration de la Barbade II, en 1987, rédigée par des représentants des mouvements indigènes ; la Déclaration de San José sur ethnocide et ethno-développement, en 1981, par un groupe d’experts de l’Unesco ; la création, en 1981, par la Sous-commission pour la prévention de la discrimination et la protection des minorités des Nations Unies, du Groupe de travail sur les populations indigènes ; l’approbation, en 1989, de la Convention 169 de l’OIT sur les peuples indigènes et tribaux ; la réunion à Nuuk, au Groënland, en 1991, de la conférence sur l’autonomie et l’autogouvernement des indigènes, qui précise, dans ces conclusions, que "les peuples indigènes ont le droit à la libre détermination dans le cadre des accords internationaux sur les droits de l’homme et du droit international"
Au niveau interne des États, des progrès importants ont été accomplis dans un certain nombre de pays. C’est le cas du Nicaragua, dont la Constitution de 1986 proclame le caractère multi-ethnique de la nation, et dont le Parlement a voté, en 1987, le Statut d’autonomie des régions de la Côte atlantique. C’est aussi le cas du Groënland, dotée depuis 1978 d’un régime d’autonomie très large dans le cadre du Royaume du Danemark. C’est encore le cas du Canada, qui se reconnaît comme une société pluri-ethnique et pluri-culturelle, et dont le gouvernement et les peuples indigènes sont parvenus à plusieurs accords importants : l’accord de James Bay, en 1975 ; l’accord Inuvialit, en 1984 ; et surtout l’accord d’autonomie du territoire du Nunavut, en 1993, avec la création d’un gouvernement territorial, et qui reconnaît les droits territoriaux de 17.500 Inuit sur 350.000 kilomètres carrées de terres.
derechos humanos, propriedad territorial, autonomía, reivindicación de derechos, reivindicación étnica, minoría nacional
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Si les travaux comparatifs concernant les expériences d’autonomie territoriale en Europe sont relativement abondants, ce n’est pas de même, en revanche, pour ce qui concerne les populations indigènes des Amériques. Certes, les exemples d’autonomie territoriale de populations indigènes ne sont guère nombreux ; de surcroît, ils sont relativement récents et ne concernent que des populations peu nombreuses. En ce qui concerne l’Amérique latine en particulier, la seule expérience tentée, celle de l’autonomie de la Côte atlantique au Nicaragua, a été en grande partie vidée de toute porté réelle du fait de la situation politique et économique du pays.
Et pourtant, il est certain que d’autres expériences suivront, puisque l’autonomie territoriale et politique apparaît de plus en plus comme la revendication centrale des mouvements et des organisations représentatives des peuples indigènes du continent. Les expériences déjà en cours, même si elles sont d’une ampleur limitée, doivent donc être prises en compte. Ce travail, fait par un juriste, y contribue de manière claire et pédagogique.
C.Cratchley est un sociologue chilien, spécialiste des questions touchant les minorités ethniques.
Artículos y dossiers
AYLWIN,José, Pueblos indígenas, territorio y autonomía, Instituto de Estudios Indígenas, Universidad de La Frontera in. Pentukun, 1995 (Chili), 3