Recueil d’articles, l’ouvrage a pour axe l’analyse historique du "cas" espagnol, et en particulier l’interprétation des relations entre la Catalogne comme nation et l’Espagne comme État plurinational.
Le nationalisme est la doctrine qui propose le développement autodéterminé d’une collectivité donnée, elle-même définie en fonction de caractéristiques externes plus ou moins objectives, et qui est représentée comme la nation. La référence nationale est devenue l’un des facteurs le plus importants dans le comportement social et politique ; elle est présente aujourd’hui dans toutes les régions du monde et pratiquement dans tous les systèmes politiques. Dans ce cadre on assiste actuellement à la réapparition de la question nationale dans les pays développés, avec des objectifs différents (revendication culturelle et linguistique des minorités ethniques, partage ou participation du pouvoir, séparatisme), mais aussi avec de moyens (pacifiques ou violents)et idéologies (progressistes ou conservatrices)opposées.
L’évolution du catalanisme depuis le début de ce siècle constitue un bon exemple de la diversité politique de la revendication nationaliste. En 1931, au moment de la création de la IIème République, les régionalistes conservateurs sont à la défensive, et les indépendantistes très minoritaires. En revanche, les catalanistes fédéralistes et autonomistes sont largement dominants. Le parti hégémonique pendant la période est l’Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), dans lequel cohabitent des tendances séparatistes avec des tendances qui veulent réformer l’État en alliance avec les démocrates espagnols. Or, malgré la force du courant nationaliste en Catalogne, celui-ci n’a pas développé une théorie cohérente et approfondie de la nation et du nationalisme. Aussi, la mise en place de l’autonomie pendant la IIème République est abordée d’un point de vue pragmatique, avec une regrettable absence d’analyse juridico-constitutionelle.
Une situation similaire existe actuellement avec les positions de Convergència Democràtica de Catalunya (CDC), parti au pouvoir dans la Generalitat depuis 1980. Pour ce parti, qui aspire à monopoliser la représentation politique de la Catalogne, la question de l’articulation entre la Generalitat et l’État espagnol est secondaire, un problème purement technique et juridique. L’essentiel, pour lui, c’est d’ "être" nationaliste. Par ailleurs, l’État espagnol des autonomies lui convient parfaitement, car celui-ci est un cadre ouvert et mal défini qui lui permet, par une stratégie de mobilisation/négociation permanente, d’obtenir de nouvelles parcelles de pouvoir pour la Generalitat. Mieux encore, face aux réactions ou pesanteurs centralistes et jacobins des gouvernements de Madrid, la CDC défend le statut d’autonomie de Catalogne dans sa forme actuelle, le considérant comme un "instrument de reconstruction nationale".
Une étude sur les rapports entre les nationalismes gallois et écossais et l’État britannique permet une très intéressante comparaison entre la Grande Bretagne et l’Espagne. Tous deux États unitaires, ils doivent faire face aux défis centrifuges des nationalismes périphériques ; confrontés à une nécessaire décentralisation de l’État, ils doivent en même temps céder des compétences à la Communauté européenne. Or si l’Espagne a fait un important chemin sur la voie de la décentralisation, celle-ci s’est vue bloquée en Grande Bretagne à la suite de l’échec, en 1979, des référendums sur la "dévolution" concernant l’Écosse et le Pays de Galles.
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, España, Catalogne
À partir du cas espagnol, et en particulier du nationalisme catalan, l’auteur aborde toute une série de questions qui se posent non seulement en Espagne, mais aussi dans d’autres pays, confrontés également aux revendications des nationalismes périphériques : plurinationalité et souveraineté, autodétermination et démocratie, autonomie, fédéralisme, indépendance. L’analyse comparative avec la Grande Bretagne montre bien le rapport entre la puissance des nationalismes périphériques et la décentralisation de l’État. En effet, l’échec des référendums de 1979 en Grande Bretagne est due avant tout à la faiblesse des forces politiques nationalistes écossaises et galloises. En Espagne, en revanche, nous voyons que les nationalismes non seulement ont résisté à la longue dictature franquiste, mais qu’ils sont majoritaires dans les Communautés autonomes de Catalogne et du Pays basque.
Malgré l’échec de la "dévolution" de 1979, l’auteur considère que les perspectives d’un développement ultérieur de l’autonomie politique ne sont pas fermés en Grande Bretagne, car il s’agit de l’un des derniers États unitaires importants à ne pas avoir introduit la décentralisation politique dans son organisation interne. La récente approbation par référendum des statuts d’autonomie du Pays de Galles et de l’Écosse lui ont donné raison.
C.Cratchley est un sociologue chilien, spécialiste des questions touchant les minorités ethniques.
Libro
AGUILERA DE PRAT, Cesáreo R., Nationalismos y autonomías, PPU, 1993 (Espagne)