Textes et photographies, journal de bord d’un voyage de 70 000 kilomètres d’Odessa à Saint Pétersbourg
05 / 1996
Deux journalistes suisses décident de raconter l’Europe en arpentant ses marges. Longeant, en voiture, les côtes du vieux continent, depuis la mer Noire jusqu’à la Baltique, passant par Istanbul, la Sicile, Algésiras, Brest, Dublin ou les ports jumeaux d’Amsterdam et de Rotterdam, ils explorent la dernière frontière de l’Union européenne : la mer.
Le premier constat ressort avec vigueur de leurs notes de voyage et de leurs clichés : leur vision de la périphérie de l’Europe n’est pas gaie. Rompant avec l’image décontractée des vacances sur la côte ou la nonchalance des ports, ils nous offrent leur vision d’une Europe des marges, des marées noires et de la contrebande, des métiers en voie de disparition et de l’immigration clandestine. Le déchargement des cargos de 500 000 tonnes, le maniement des pétroliers géants, la population des dockers, des ouvriers des chantiers navals et des petits pêcheurs prennent le pas sur les rares images des stations balnéaires ou de bourgeois oiseux de la côte monégasque.
Deuxième constat, un peu dépité : l’Europe des mers, celle qui rassemblerait dans une culture maritime commune, des Européens si différents, n’existe pas. Même si les pêcheurs et les marins ont un air de famille et un état d’esprit parfois similaire, il serait abusif de leur attribuer un territoire unique. D’autant plus que les côtes sont aussi des espaces de transit et de trafic, qui ont parfois du mal à conserver leur identité.
L’Europe des marges n’est pas celle de l’immobilisme. La localisation des activités économiques autour de grands axes transnationaux, les déplacements de la population vers la mer et le soleil et l’activité générée par un trafic commercial grandissant ouvrent des perspectives à certaines régions. Les grands ports européens sont engagés dans une concurrence féroce et une course à l’agrandissement. La prospérité du rivage se fait et se défait à grande vitesse. L’accès à la mer, pour la Serbie, a bien été un but de guerre. Cela montre l’importance des côtes et de l’accès au commerce international pour l’économie d’un pays. Mais le dynamisme économique n’est pas indice de prospérité : "Réflexe typique des peuples en difficulté, ils s’imaginent que leur passé fut des plus glorieux. Pour les gens du rivage, c’est pourtant vrai". Abandon et marginalisation semblent en effet menacer ces lieux dès lors que la bonne fortune ne leur sourit plus, laissant ouvriers et pêcheurs livrés à eux-mêmes. L’Europe, nourrie de la mer, ne doit pas lui tourner le dos et renier ses rivages. Les autorités politiques doivent - pardonnez l’expression - se jeter à l’eau et se rappeler que le continent est aussi fait de son domaine maritime.
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, Europa
Libro
LERESCHE, Yves, MICHEL, Serge, L'Europe par ses côtes, SYROS ALTERNATIVESFPH, 1996 (France)
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