10 / 1996
Le système d’enseignement public russe subit actuellement une désaffection de la part des enseignants. Mais le plus grave est que cela concerne en premier lieu les enseignants les plus jeunes et les plus compétents.Le nombre de postes vacants était officiellement de 76 000 en 1993, de 81.6 000 en 1994. En 1995 il a un peu diminué, mais artificiellement, grâce à l’afflux d’enseignants venus de Tchétchénie, du Tadjikistan et d’autres pays de la CEI. Cette pénurie d’enseignants en poste résulte de ce que beaucoup quittent l’école et rares sont les étudiants des Instituts Pédagogiques qui s’y destinent effectivement.
Ce phénomène a des causes en premier lieu matérielles : les fonctionnaires reçoivent un maigre salaire, qui plus est avec souvent des mois de retard et seulement partiellement. Mais le corps enseignant a subi une perte importante du prestige moral qui était associé dans la période soviétique à la fonction d’enseignement. Aujourd’hui les enseignants inspirent l’indifférence, voire la compassion, on admire beaucoup plus les banquiers et les hommes d’affaires, commerçants ou autres. C’est pourquoi, beaucoup d’enseignants se sont reconvertis dans la police, la banque, et dans les sociétés commerciales. L’hémoragie est sensible dès l’Institut Pédagogique, qui a pour vocation de former les futurs enseignants. Alors qu’à la fin du cycle secondaire, près de 20% des élèves veulent être enseignants, ils ne sont plus que 5% à le vouloir au bout des 5 années de formation de l’Institut Pédagogique. Parmi ces derniers, seuls 60% intégrent effectivement le système d’enseignement public.
Il faut reconnaître qu’aujourd’hui la formation en Institut Pédagoigque n’est plus adaptée à la variété des formes d’établissements scolaires et des besoins d’éducation. Le système d’enseignement n’est plus celui qu’il était auparavant, constitué d’un seul corps très homogène, avec un seul programme, une seule méthode, des élèves identiques et des matières similaires sur tout le territoire soviétique. Aujourd’hui les élèves veulent pouvoir choisir les matières et les langues qu’on va leur enseigner : bachkir, oudmourte, tatare...Par ailleurs, les établissements d’enseignement se sont diversifiés.Il faut donc préparer des enseignants à cette diversité nouvelle de l’éducation.
Cependant la réforme de la formation des enseignants ne peut à elle seule régler les problèmes matériels auxquels est confronté le système d’éducation public dans son entier. Des solutions locales ont été trouvées : à Moscou par exemple le Maire a instauré le principe de gratuité du logement pour les enseignants qui acceptent d’aller travailler dans les zones déshéritées. Mais dans de nombreuses régions, c’est aujourd’hui l’école privée qui comble les lacunes du système d’enseignement public. Leur développement est concentré dans les grandes villes (Moscou, Saint-Pétersbourg, Rostov)et dans les régions ayant une tradition d’autonomie par rapport au centre : Tatarstan, Bachkortostan par exemple. Mais aucun établissement privé n’était enregistré dans 25 autres régions et dans 18 autres, on en comptait moins de 2. L’inégalité face à l’enseignement privé n’est pas seulement régionale : le prix de l’enseignement est presque gratuit ou symbolique dans certains établissements, alors que dans d’autres, très prestigieux, il peut atteindre 1000 à 2000 dollars le mois. Par conséquent, la clientèle s’est considérablement modifiée : à la fin des années 1980, l’école privée était surtout fréquentée par les enfants de l’intelligentsia, qui y cherchaient une autre forme d’enseignement. Aujourd’hui seuls les banquiers, les chefs d’entreprise et les hommes d’affaire peuvent se permettre de payer de telles sommes. Entre ces deux pôles extrêmes existent toute une variété d’écoles privées dont la vocation peut être aussi bien expérimentale que linguistique avec l’apprentissage des langues nationales. Mais si l’école privée peut parfois combler les lacunes pédagogiques de l’école publique, de par la sélection sociale et financière qu’elle instaure, elle ne peut assurer la fonction principale de l’éducation qui est l’intégration sociale.
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, Rusia
le problème de l’école public est central dans le développement ultérieur de la Russie et dans la cohésion sociale. La débâcle à laquelle doit faire face l’école aujourd’hui place une partie très importante de la jeunesse ruuse en situation d’extrême fragilité psychologique. Le coût pourrait en être quasi-irreversible.
Les titres des documents cités dans cette fiche ont été traduits du russe ou transcrits en caractères latins. Pour toute recherche, s’informer auprès de France-Oural.
Artículos y dossiers
Ilssont partis sans avoir fini leurs études in. Rossijskaja Gazeta, 1996/02/02 (RUSSIE)
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