03 / 1996
Orly, ville située dans le Val de Marne (Ile de France)a vu l’émergence des Réseaux d’Echanges Réciproques de Savoirs dans les années 70. C’est un système pédagogique fondé sur le principe de la réciprocité : chacun est reconnu par ses savoirs, savoirs-faire, chacun peut dire ses ignorances ; chacun devient offreur et demandeur de savoirs. Le RESO (Réseau d’Echanges de Savoirs d’Orly)est ouvert à tous, il n’y a pas de cotisations financières, seuls les savoirs circulent. Ce RESO fonctionne dans un quartier où se vivent de grandes difficultés économiques, sociales et culturelles.
Vingt-et-un participants au RESO ont élaboré et réalisé un séjour de huit jours de vacances à Marcenay en Bourgogne. Ce projet a été construit avec la démarche des échanges de savoirs dans toutes ses étapes.
L’évaluation à chaud par tous les acteurs tenait en deux mots :"génial, super". Pour dépasser ces impressions et construire une véritable évaluation, nous avons proposé la technique d’atelier d’écriture. L’intérêt était double :
- dédramatiser l’acte d’écrire par le biais de petits exercices d’écriture très ludiques et très diversifiés.
- Faire un bilan en création collective.
Des résistances sont apparues : c’est scolaire, je n’aime pas écrire. Ce qui a finalement décidé le groupe, c’est l’argument suivant : nous construisons ensemble ce RESO, nous avons organisé ce séjour, pourquoi ne pas en faire la mémoire ensemble ? C’est finir ensemble ce que l’on a commencé ensemble. Claire, qui durant l’année aidait cinq personnes à s’approprier ou se réapproprier l’orthographe, s’est proposée pour être co-animatrice avec moi. Chacun a compris que ce temps était aussi important que leur participation à la vie du RESO, que personne n’avait le droit d’écrire à sa place, que nous étions dans le modèle "du faire ensemble". L’expérience commune nous permettait de nous croire capables de réaliser ce compte-rendu. L’atelier d’écriture est un outil ludique où chacun peut se découvrir "écrivant". Loulou, enseignant à la retraite, renâclait : "tu vas nous faire des exercices, des échauffements, nous ne sommes plus à l’école". Finalement c’était les plus lettrés qui restaient difficiles à convaincre. Ils avaient peur pour ceux qui savaient moins bien écrire.
14 personnes dont 2 adolescents et 2 enfants ont écrit. Chacun est entré à pas feutrés dans l’écrit et spontanément l’entraide s’organisa, on pouvait être la main de l’autre, c’est à dire écrire textuellement ce qu’un autre dictait. Avant d’écrire le bilan, nous avons fait des jeux d’écriture interactifs : chacun écrit à la suite les uns des autres un mot ou une phrase, jeux d’écriture autour des couleurs. Puis écriture du bilan : la consigne était : "écrivez ce que vous avez vu, ce que vous n’avez pas vu à Marcenay, ce que vous avez entendu, ce que vous n’avez pas entendu à Marcenay, ce que vous avez aimé, ce que vous n’avez pas aimé pendant le séjour". Deuxième temps d’écriture : vous pouvez décrire soit une situation d’échange de savoir vécu, soit un lieu du séjour qui vous a particulièrement séduit. Malgré le bruit, malgré la peur, tout le monde a écrit, certains se faisant aider par leur voisin. A côté de moi, j’avais Loïc (7 ans)qui à chaque mot me demandait : "c’est un pont ou deux ponts que je dois mettre ? ". De sa main droite, il formait ses lettres, et de sa main gauche, il suçait son pouce. Frédéric (15 ans)en grande difficulté scolaire chahutait avec Guillaume (13 ans). Julien (12 ans)lui, s’appliquait. Tous les textes ont été lus, même ceux de Guillaume et Frédéric qui pourtant étaient raturés. Dans un atelier d’écriture, il est important que le texte de chacun soit lu pour entraîner des réactions constructives, positives ; pour permettre une réassurance et donner envie de retravailler son texte. Ce que l’on appelle les retours. Ils se font toujours sur la forme, jamais sur le fond, et il est interdit de jouer les "psychologues-analystes amateurs". Ces retours sur les textes nous ont permis de demander à Frédéric d’écrire son apprentissage du canoë et comment il l’avait transmis à d’autres. Trois jours plus tard, Frédéric nous a apporté un texte d’une page.
Le plus surprenant reste l’appropriation de la technique de l’atelier d’écriture qui a supplanté le séjour lui-même, le désir d’écrire est permanent chez les participants du RESO.
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Le MRERS est une association créée par Claire et Marc HEBER SUFFRIN en 1985 et qui fonctionne sur un mode de réciprocité ouverte, chaque participant étant à la fois offreur et demandeur de savoirs. Les fiches ont été produites dans les ateliers d’écriture de ce réseau.
Texto original ; Relato de experiencia
(France)
MRERS (Mouvement des Réseaux d’Echanges Réciproques de Savoirs) - B.P. 56. 91002 Evry Cedex, FRANCE - Tel 01 60 79 10 11 - Francia - www.mirers.org - mrers (@) wanadoo.fr