La déclaration de Caracas
03 / 1996
Réunis à Caracas, capitale du Venezuela, du 25 au 29 novembre 1991, quinze hauts fonctionnaires vénézueliens et quinze responsables provenant de 10 autres pays de tous les continents ont adopté la déclaration suivante en vue de repenser la politique de la ville dans les quartiers les plus défavorisés. Elle énonce six principes :
1. Il faut considérer les quartiers d’habitat précaire comme des espaces où de nombreuses dynamiques économiques, sociales et culturelles sont à l’oeuvre, même si elles s’expriment sous des formes peu perceptibles de l’extérieur. Il faut veiller à ne pas idéaliser "l’organisation populaire" et avoir conscience que les conflits n’en sont pas absents ou qu’elle ne concerne pas toute la population. Cependant, leur prise en compte est un préalable indispensable à la participation des habitants et à la pérennisation des résultats. Toute politique visant à améliorer ces quartiers passe donc par la connaissance, la reconnaissance et le renforcement de ces dynamiques. Il faut stimuler l’activité économique par des équipements judicieux et favoriser un apprentissage de la maîtrise du développement par la population elle-même.
2. La première étape pour permettre à ces dynamismes de s’exprimer est de consolider la situation foncière des habitants et de garantir la stabilité de leur occupation. Les modalités de cette consolidation varient d’un pays à l’autre : vente, donation, location de la terre...
3. La volonté politique de s’attaquer à la pauvreté ou à la précarité urbaine comporte partout des contradictions : en ville ou dans la société, les pauvres urbains sont très peu représentés, les classes moyennes sont rarement favorables à une politique de transfert de ressources en faveur des quartiers précaires ou du renforcement du pouvoir de leurs organisations. Il faut encourager une représentation politique des populations défavorisées, coordonner la politique de réhabilitation, formuler une politique d’ensemble associant gestion de l’immigration, aménagement du territoire et amélioration des quartiers.
4. Il n’y a pas de politique efficace sans réforme de l’action de l’Etat et sans organismes réellement adaptés à la politique poursuivie. Trop de débats sur les objectifs masquent le refus de procéder aux réformes institutionnelles nécessaires. Actions non coordonnées, centralisme, standardisation des solutions, difficultés à accepter la "ville informelle", participation conçue comme une adhésion des habitants aux projets élaborés sans eux... les modes d’action traditionnels de l’Etat sont des obstacles à la mise en place d’une politique de la ville.
5. Les rythmes sociaux et les rythmes administratifs ne coïncident pas. Côté administration, les lenteurs bureaucratiques et la bousculade des échéances électorales ne s’adaptent pas aux temps courts de l’urgence ou aux temps longs de la maturation des projets et des changements sociaux.
6. Les financements doivent être adaptés aux enjeux. Il faut faire apparaître les choix en matière de financement du logement, procéder par dotations globales et permettre aux habitants de définir leurs priorités, associer les financements publics aux contributions privées et à la participation en travail, considérer la gestion financière comme un moyen de renforcement des groupes et d’apprentissage de l’autogestion.
Enfin, les participants souhaitent que cette déclaration soit diffusée et débattue et que l’on permette aux habitants de s’alimenter mutuellement de leurs expériences. L’objectif est que, face à des Etats souvent incapables d’entreprendre leur propre mutation culturelle, les habitants des quartiers défavorisés se servent de cette déclaration pour légitimer leurs revendications et dialoguer entre eux. Affaire à suivre...
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Libro ; Actas de coloquio, encuentro, seminario,…
FPH=FondationCharles Leopold Mayer pour le progrès de l'homme, La réhabilitation des quartiers dégradés, FPH in. Dossier pour un Débat, 1992 (France), n° 15
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