En février 1996, l’association Enfants réfugiés du monde s’installait dans la région de Tuzla où des milliers d’enfants déplacés -notamment de Srebrenica- avaient trouvé refuge.
Après avoir identifié un partenaire local -l’organisation humanitaire bosniaque Bosfam-, ERM a commencé à travailler en collaboration avec cette dernière auprès d’enfants sur deux centres d’activités. Nous avions pour projet commun de soutenir sur le plan psychologique et social ces enfants, victimes du conflit et de la purification ethnique, par le biais d’activités ludiques et éducatives.
Comment a-t-on choisi ces activités ? Tout d’abord, les éducateurs ont demandé directement aux enfants quelles activités ils souhaitaient pratiquer. Nombre d’entre eux, abattus par les événements, ont réagi de façon passive à cette demande et ne parvenaient pas à faire des suggestions. Nous avons alors fait diverses propositions et ils ont pu faire leur choix. Les éducateurs ont ensuite établi un planning d’activités en fonction de leur temps libre et en prenant surtout soin d’aménager des heures creuses pendant lesquelles ils pouvaient jouer librement dans la salle de jeux que nous avions équipée. Contraints de vivre en communauté, ces enfants n’avaient souvent pas chez eux un espace pour jouer ou étudier et le centre devait être, avant tout, un lieu d’écoute et de divertissement que nous nous proposions d’aménager et d’animer selon leurs désirs et leurs besoins, un lieu où ils pouvaient aussi choisir de venir lorsqu’ils le désiraient.
Dans les centres, chaque enfant a choisi les activités qu’il souhaitait suivre. Et les éducateurs discutent et décident du contenu des programmes de celles-ci avec ceux qui y participent. Pendant ces sessions d’activités, les éducateurs cherchent aussi toujours à favoriser les échanges et restent à l’écoute des enfants -nombre d’entre eux souffrent de traumatismes psychologiques.
Quelles activités les enfants ont-ils choisies et comment ces dernières ont-elles pu nous servir de support pour apporter aux enfants un soutien sur le plan psychologique et social ?
Les activités sportives ont eu un grand succès. En effet, les enfants ont souffert, pendant le conflit, d’importantes restrictions de mouvements et ils éprouvaient donc le besoin de pouvoir à nouveau se dépenser physiquement. Cela leur permettait également de s’exprimer à travers l’action, de canaliser leur énergie, le stress qu’avait généré la situation de guerre et les conditions de vie difficiles auxquelles ils étaient confrontés dans leur exil. De plus, ces activités sportives étaient menées sous forme de jeux. Ainsi, ce enfants qui ont donc souvent vécu isolés pendant la guerre et qui ont perdu nombre de repères devaient, à travers le jeu, s’intégrer dans un groupe, observer certaines règles, apprendre en quelque sorte à nouveau à fonctionner en société.
Les sorties (pique-niques, etc.)étaient également très prisées. Là encore, ces enfants qui avaient souffert pendant quatre ans d’un sentiment d’isolement et d’enfermement étaient avides de contacts avec l’extérieur, d’excursions, de voyages... En favorisant les sorties, nous avons donc permis aux enfants de rompre avec ce sentiment d’isolement et surtout de reprendre contact avec le monde extérieur.
Dans leurs préférences, venaient ensuite toutes les activités artistiques : peinture, théâtre, danse, musique...
Grâce à ces dernières, ils pouvaient s’exprimer, raconter leur histoire, leurs craintes. A travers le dessin, par exemple, l’enfant qui peut dire sa souffrance psychologique, se libère déjà un peu, franchit une première étape vers la guérison. Les dessins des enfants sont d’ailleurs très parlants : couleurs sombres, maisons détruites, militaires, taches de sang...
D’autre part, ces activités qui tendent à valoriser l’enfant lui permettent ainsi de retrouver aussi confiance en lui. Pour que les enfants puissent reconstruire une image plus positive d’eux-mêmes, nous avons également organisé diverses manifestations culturelles (spectacles, expositions)au cours desquelles ils ont pu présenter leur travail à un large public enthousiaste.
Sachant que nombre d’enfants déplacés avaient accumulé un certain retard scolaire pendant la guerre et que la reprise d’une scolarité normale pose encore aujourd’hui nombre de problèmes -élèves et enseignants sortant à peine de quatre ans de vie scolaire totalement anarchique- nous avons également intégré à notre programme dans les centres des sessions de soutien scolaire.
Contribution des parents aux activités des centres
Travailler avec un enfant sans chercher à intervenir aussi au sein de son environnement et donc notamment auprès de sa famille ne peut apporter de résultat. En Bosnie, beaucoup de parents d’enfants déplacés, submergés par une multitude de problèmes matériels, familiaux et psychologiques, ne parvenaient plus à assumer leur rôle auprès de leurs enfants. Nous avons donc aussi cherché à les impliquer pour rétablir la relation avec l’enfant. Nous avons donc aussi cherché à les impliquer pour rétablir la relation avec l’enfant. Ainsi, nous les avons invités à contribuer aux activités des centres : pour l’exposition de dessins, par exemple, nous avons proposé aux mamans de préparer un buffet. Nous leur avons remis les ingrédients qu’elles avaient demandés pour confectionner des gâteaux et ainsi nombre d’entre elles ont pu directement prendre part à cet événement.
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, Bosnia y herzegovina
Aujourd’hui dans ces centres, après plus d’un an de travail accompli par Enfants réfugiés du monde en partenariat avec Bosfam, le nombre d’enfants qui les fréquentent a triplé et ils sont désormais enthousiastes et demandeurs d’activités.
Pour atteindre nos objectifs, l’action d’Enfants réfugiés du monde doit cependant s’inscrire dans le long terme. En Bosnie, reconstruire l’équilibre psychologique de la population et notamment des enfants sera bien plus long et difficile que de reconstruire les maisons. D’autre part, plutôt qu’une ère de paix ou d’après-guerre, la Bosnie connaît actuellement une situation de non-action militaire, de cessez-le-feu et les forces d’intervention militaires internationales devant bientôt se retirer du pays, une reprise des hostilités n’est donc pas exclue. Et plus que jamais, bien sûr, ces enfants auront alors besoin d’être soutenus.
Valérie CECCHERINI a été volontaire pour Enfants réfugiés du monde à Tuzla pendant 1 an
Relato de experiencia ; Texto original
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