Durant l’Intifada, les jeunes Palestiniens étaient en première page des médias. Ces dernières années, les négociateurs palestiniens leur ont petit à petit volé la vedette et tout le monde a essayé de croire, qu’après les accords de Washington, d’Oslo, de Taba, d’Hébron, on pourrait enfin cesser de considérer les enfants de Palestine comme des enfants réfugiés et confrontés à la violence et que l’on pourrait enfin se consacrer à panser les blessures du passé et à construire l’avenir. Il faut continuer à y croire et pourtant...Tout laisse à penser qu’une bonne partie des enfants palestiniens resteront pour de nombreuses années encore des "enfants réfugiés", tant la perspective des accords de paix "définitifs" semble s’éloigner au fur et à mesure que l’on avance dans ce que les politiciens appellent la "période intérimaire".
Si environ 30% des Palestiniens vivent en Cisjordanie et dans la bande de Gaza et 12,6% en Israël, les autres sont toujours réfugiés en Jordanie (31,6%), au Liban (5,7%), en Syrie (5,2%)dans les autres pays arabes. Beaucoup sont toujours dans des camps où ils vivent dans la plus grande insécurité quant à leur avenir, toujours en partie dépendant des services de l’UNRWA dans leur vie quotidienne (Office des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens), en particulier en ce qui concerne les soins médicaux et la scolarité des enfants.
Parmi les Palestiniens qui vivent dans les territoires autonomes, c’est à dire en Cisjordanie et dans la bande de Gaza seule, deux personnes sur trois sont des réfugiés. La moitié des réfugiés vivent dans des camps. Les camps, surtout ceux qui sont installés à proximité des zones urbaines, sont des bidonvilles qui se caractérisent par des conditions de vie particulièrement insalubres et des taux de chômage très élevés. Non seulement de nombreux enfants palestiniens sont toujours des enfants réfugiés vivant dans des conditions particulièrement difficiles, mais beaucoup continuent aussi confrontés à la violence du conflit israélo-palestinien. Tel est le cas par exemple des enfants palestiniens qui vivent au Sud Liban et sont régulièrement soumis aux bombardements des avions israéliens, quand ils ne sont pas contraints à l’exode avec leurs familles, en compagnie des villageois du sud Liban, chaque fois que l’armée israélienne se lance dans une opération de représailles.
Quant aux Territoires palestiniens autonomes, la situation qui y prévaut est loin de ressembler à la paix, réparatrice des expériences traumatiques passées. Certes depuis le retrait israélien des principales villes de Cisjordanie, les occasions de confrontation directe avec les soldats israéliens ont beaucoup diminué : les enfants de Ramallah ou de Naplouse vont à l’école plus régulièrement, ils se déplacent en ville sans croiser les patrouilles militaires, leurs nuits ne sont plus troublées par les descentes nocturnes des soldats. On ne peut dire de même des enfants des villages et des camps restés sous occupation : le retrait israélien ne concerne jusqu’à maintenant qu’une petite superficie du territoire de la Jordanie (moins de 10%). Mais peut-on même considérer que les enfants des villes "libérées" sont désormais en position de vivre enfin leur enfance dans la sérénité d’un processus de paix qui se solidifie ? Difficile à croire, là encore... Si les soldats israéliens sont sortis des villes, ils sont aux portes de ces villes et utilisent désormais l’arme du blocus d’une façon régulière, avec des gradations dans son application.
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Il faut rappeler tout d’abord que depuis le mois de mars 1993, Jérusalem est fermée aux Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, à moins qu’ils ne soient en possession d’un "laissez-passer" délivré par les autorités militaires israéliennes. Au fur et à mesure que l’on a avancé dans le "processus de paix", il est devenu de plus en plus difficile d’obtenir ce permis. Seuls accèdent à ce document une minorité d’ouvriers palestiniens qui travaillent en Israël, quelques professionnels tels que médecins, infirmiers, avocats et quelques personnalités de l’Autorité palestinienne. A chaque incident impliquant un Palestinien, ces laissez-passer donnés parcimonieusement sont suspendus pour des périodes plus ou moins longues.
Non seulement la fermeture de Jérusalem est politiquement inacceptable pour les Palestiniens mais elle a aussi des implications économiques et sociales qui ont un impact direct sur la vie des enfants. Cette fermeture de Jérusalem signifie bien sûr une perte de revenus pour nombre de chefs de famille qui travaillaient en Israël ou à Jérusalem-est, une désorganisation du tissu social et des relations familiales non seulement entre la Cisjordanie, Gaza et la ville de Jérusalem mais aussi un accès limité aux hôpitaux palestiniens de référence situés à Jérusalem-est, une désorganisation du tissu social et des relations familiales non seulement entre la Cisjordanie, Gaza et la ville de Jérusalem mais aussi entre le nord et le sud de la Cisjordanie, la route reliant les deux régions passant par Jérusalem. A cette fermeture de la Cisjordanie et de la bande de Gaza (qui connaît des gradations dans sa sévérité en fonction des circonstances), il faut ajouter des blocus des villes ou des villages palestiniens qui sont perçus comme des punitions collectives en réponse à des actes individuels de Palestiniens ou comme des mesures vexatoires imposées sous des prétextes vagues de "mesures de sécurité". Ces fermetures de villes et de villages sont là encore particulièrement désorganisantes pour la vie quotidienne des familles : la vie économique se paralyse, les élèves et les enseignants ne peuvent plus arriver à l’école qui fonctionne alors au ralenti... et surtout les Palestiniens accumulent les rencoeurs et les tensions, s’enfoncent plus profondément dans la désillusion.
S.MANSOUR est psychologue. Elle travaille à l’université de Birzeit, département de santé publique/communautaire en Palestine.
Texto original
MANSOUR, Sylvie (France)
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