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La campagne contre la « guerre des lâches » de Handicap International

Claire MOUCHARAFIEH

03 / 1994

Eliminer les mines anti-personnel pour restituer aux populations civiles l’usage de leur terre : tel est le combat capital engagé depuis 1992 par Handicap International, après dix ans de travail d’appareillage et de rééducation des personnes dans plus de 25 pays.

Né à partir de l’expérience cambodgienne et d’une première révolte contre la quasi-absence de programmes internationaux pour venir en aide aux personnes mutilées par cette arme épouvantable, Handicap a compris qu’il ne servait à rien de réparer, si aucune mesure n’était prise pour mettre un terme au massacre des civils, surtout après la fin de la guerre. Sans campagne préventive pour obtenir l’interdiction complète et internationale de la fabrication, de la vente, de l’exportation et de l’utilisation des mines anti-personnel, ce combat comme celui de Sisyphe était perdu d’avance, ne contribuant en définitive qu’à la « bonne conscience » de ceux qui ont le pouvoir de changer les règles de ce jeu cruel et ne font rien.

L’ampleur du problème est à la hauteur des enjeux : aujourd’hui, ce sont plus de 100 millions de mines terrestres actives dans le monde, 1 million de victimes, plus de 50 pays ou régions touchés… Ce sont tous les mois 1400 tués supplémentaires et 780 blessés, en majorité des femmes, des enfants, des agriculteurs ou des bergers vivant dans les zones rurales. Et à chaque nouveau conflit la liste s’allonge. 10 millions de mines en Afghanistan et déjà plus de 400.000 victimes, 4 millions de mines au Cambodge et déjà plus de 36.000 amputés, une victime toutes les 36 heures en Angola…

Des chiffres terribles qui témoignent de l’ampleur du désastre causé par ces armes de mutilation et de mort qui frappent sans discernement les militaires comme les civils. Pour chaque victime de mine qui survit, deux meurent. La majorité des survivants devront être amputés. De plus, ces engins ont pour caractéristique redoutable de survivre aux conflits : la très grande majorité des mines anti-personnel peuvent rester actives pendant plus de 40 ans ! Leur prolifération revient à pratiquer une véritable politique de la « terre brûlée », interdisant toute mise en culture et rendant inaccessibles de vastes zones, alors que les pays ont besoin de toutes leurs ressources pour nourrir leur population et reconstruire la paix.

Devant l’inadaptation des réglementations juridiques internationales et le cynisme des Etats, Handicap International a lancé un manifeste contre cette « guerre des lâches ». Il existe en effet depuis 1981 une Convention réglementant l’usage d’armes causant des souffrances excessives, mais elle ne concerne ni la fabrication ni les ventes et n’a été ratifiée que par 36 pays. Un protocole interdit également l’utilisation indiscriminée des mines contre les populations civiles, mais il ne couvre que les conflits internationaux, alors que la majorité des mines est utilisée dans les conflits internes.

Fort des 25.000 signatures recueillies, Handicap a saisi l’ONU et les gouvernements concernés. A la suite de cette campagne, la France, la Belgique et les États-unis, gros producteurs en mines terrestres, ont proclamé un moratoire sur l’exportation des mines anti-personnel. Il n’existe aucun instrument de surveillance permettant de contrôler l’application de ces moratoires. Le Parlement Européen a demandé que le déminage soit considéré comme une urgence humanitaire et qu’un moratoire de 5 ans soit mis en place. Enfin, la France a demandé la convocation d’une conférence internationale pour la révision du droit international en vigueur réglementant ces armes.

Parallèlement à cette campagne de prévention, Handicap International participe, avec son partenaire « Mines Advisory Group » (MAG), au déminage sur le terrain et forme des démineurs. Les équipes de l’APRONUC (ONU) au Cambodge et diverses ONG interviennent dans de nombreux pays (Kurdistan, Mozambique, Laos). Les Nations Unies opèrent en Afghanistan, mais on n’en est qu’au début d’une tâche écrasante qui nécessite une grande technicité et une méthode manuelle consistant à tester le terrain mètre par mètre. Outre la lenteur inévitable de la méthode, le coût du déminage est accablant pour des pays dévastés et ruinés par des années de guerre : il est estimé à 1000 dollars au Cambodge pour une seule mine qui peut être achetée pour moins d’un dollar.

En attendant, le marquage des zones dangereuses et la sensibilisation des populations à risque pourraient être considérés comme une urgence et une obligation humanitaires, si les Nations Unies en ont la volonté et si la pression de l’opinion et des ONG sur les producteurs et vendeurs s’intensifie.

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