Du fait des déplacements forcés des familles à partir de 1975, Beyrouth a été le théatre d’une squattérisation massive pendant quinze ans. A l’heure de la paix, la question des squatters est complexe et source de nouveaux conflits.
Les immeubles à moitié détruits et les logements abandonnés ont été squattérisés par les familles de réfugiés tout au long des années de guerre. Le peuplement des logements se trouve profondément modifié et, par conséquent, la structure sociale de la population du quartier. Les quartiers anciennement résidentiels ont été adaptés aux conditions de vie des réfugiés. L’espace a été réaménagé d’autant plus que la ligne de démarcation entre Beyrouth-Ouest et Beyrouth-Est a divisé la ville en deux secteurs entraînant une nouvelle répartition démographique, souvent à base confessionnelle.
La crise du logement existait à Beyrouth avant 1975, mais la guerre civile l’a fortement aggravée : destruction de 50 000 logements, déplacement de 500 000 personnes, chute du pouvoir d’achat des classes moyennes... L’occupation d’appartements vacants de manière illégale est une réponse à cette crise. La milice a fortement contribué à ce phénomène en rendant ces opérations possibles ce qui lui a permis simultanément de renforcer son pouvoir.
On distingue trois sortes de squatters :
- les squatters politiques qui s’installent illégalement dans un logement grâce au soutien de la milice du quartier. Ces squatters très protégés sont craints de la population.
- les squatters volontaires qui s’installent illégalement dans un logement vacant par intérêt ou dépit d’avoir trop perdu pendant les années de guerre.
- les squatters économiques, les plus démunis, qui n’ont pas les moyens de louer un appartement.
La paix a mis fin à l’installation de nouveaux squatters. Avec leur dissolution le pouvoir des milices a disparu et un pouvoir étatique s’instaure peu à peu. Mais il faut que l’Etat reloge tous ces squatters et il n’en a guère les moyens. Le budget dont dispose le ministère des Déplacés ne permet de régler que 10 % des cas et les expulsions s’avèrent extrêmement délicates (la population est prête à manifester)dans le contexte actuel de pénurie de logements. Les tribunaux croulent sous les dossiers de demande d’expulsion (100 000 dossiers en 1991). Certains cas se règlent par transaction directe avec le propriétaire qui préfère donner une indemnité aux squatters et récupérer rapidement son bien, mais ces cas sont limités et ne résolvent pas vraiment la situation. Les dizaines de milliers de personnes installées en centre-ville vont devoir quitter les lieux pour permettre la réalisation des projets de reconstruction.
Pour ne pas risquer une nouvelle répartition spatiale ségrégative dans l’agglomération urbaine, il faut que l’Etat prenne en charge une réelle politique de construction de logements sociaux.
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, Líbano, Beyrouth
Artículos y dossiers
GEBRANE BADLISSI, Eliane in. MAGHREB MACHREK, 1994/01 (France)
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