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Voir la lumière

Sunita NARAIN

08 / 2010

Il est indéniable que l’Inde doit impérativement produire davantage d’énergie.

Les indicateurs énergétiques sont clairs. L’Inde a la plus faible consommation d’électricité par habitant du monde. Cela, alors que l’accès à l’énergie est en lien direct avec le développement, ou plutôt la croissance économique.

On en ne peut résumer ce besoin d’énergie à une simple question d’équité nationale, dans un pays où les riches consommeraient trop d’énergie tandis que les pauvres n’en auraient pas assez. Cela peut être vrai pour d’autres ressources naturelles mais la pénurie d’énergie est plus ou moins générale. Les données indiquent que l’intensité énergétique de l’Inde diminue : nous produisons plus avec chaque unité d’énergie produite. Dans le secteur industriel elle a baissé de 2,2% entre 2004-05 et 2008-09 et dans l’agriculture et les services de 4,7% par an.

Les causes ne sont pas difficiles à cerner. Le coût de l’énergie en Inde est l’un des plus élevés au monde et cela affecte directement l’industrie et la consommation nationale. Faire des économies fait donc partie du « jeu de l’énergie ». Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas faire des efforts pour diminuer notre consommation énergétique ou être plus productifs. Mais le fait est qu’il y a des limites à la productivité.

Mais pourquoi rappeler ici des évidences ? Parce que même si l’Inde sait qu’elle a besoin de produire plus d’énergie, elle n’a pas encore compris qu’elle ne pourra pas le faire par des méthodes conventionnelles. Elle devra trouver une nouvelle approche en matière de sécurité énergétique avant que les objectifs ambitieux du Ministère de l’Énergie ne se révèlent inatteignables et que la sécurité énergétique ne soit finalement compromise.

Voyons ce qu’il se passe dans le pays. Partout la population manifeste contre la construction de grands projets énergétiques, de centrales thermiques, hydroélectriques et maintenant nucléaires.

Sur le site de la centrale à charbon de Sompeta en Andhra Pradesh, la police a ouvert le feu sur 10.000 manifestants, tuant deux personnes. Au Konkan, dans la région de production des mangues Alphonso, les paysans ont pris les armes contre une centrale thermique de 1.200 MW qui, selon eux, endommagera leurs récoltes. Au Chhattisgarh la population se bat contre toute une série de projets similaires qui leur ôtera leurs terres et leur eau. La liste de telles protestations est longue même si l’on ne prend pas en compte le fait que l’essentiel du charbon nécessaire à faire tourner les centrales se trouve sous les forêts et que les mines y sont contestées et non disponibles.

Les projets hydroélectriques sont dans le même cas. Les défenseurs de l’environnement protestent contre les nombreux projets prévus sur le Gange et qui l’assècheront sur de longues parties de son cours. Le Gouvernement de l’Assam exige qu’une étude soit réalisée sur les projets hydro-électriques dans les cours supérieurs de l’Arunachal Pradesh car il pense qu’ils sont à l’origine d’inondations en Assam. Le projet Subansiri de 2.000 MW en Assam est lui-même bloqué car des experts nommés par l’Etat affirment que le barrage pourrait avoir de graves répercussions sur les zones en contrebas. Les deux futurs projets de centrales nucléaires (de 6.000 MW pour Jasapara à Bhavnagar et de 9.900 MW pour Jaitapur dans le Konkan) font déjà face à la grande colère de la population.

Pourtant l’Inde persiste à ne pas voir le tableau d’ensemble. Elle croit toujours que ces luttes innombrables sont insignifiantes. La colère de la population peut être ignorée, payée ou tout bonnement réprimée. Mais je suis d’un avis contraire. Comme je l’ai défendu dans le passé, il s’agit là de la lutte environnementale des très pauvres ; à travers tout le pays, les habitants luttent pour leur survie. Ils savent que leur état de pauvreté sera simplement remplacé par plus de destitution si et quand ces projets seront réalisés.

Il est grand temps de reconnaître ces faits. Il est grand temps de reconnaître que nombre de ces projets, proposés ou planifiés, ne seront pas construits. La disponibilité de la terre et de l’eau seront des contraintes réelles qui pèseront sur la croissance. Alors, que faire ?

Tout d’abord il faut une loi qui fasse de l’énergie de base un droit fondamental pour tous les Indiens, à l’instar du droit à l’emploi, à l’éducation et maintenant à l’alimentation. Cela permettra à la population d’exiger l’accès à l’énergie et obligera l’État à partager ce qu’il a avec tous. Cela créera de vrais conditions pour produire de l’énergie de manière nouvelle et différente. La production pourrait être décentralisée et locale ou même de grande ampleur et connectée au réseau. Cela donnera à chaque communauté un vrai intérêt dans la production d’énergie.

Par ailleurs l’Inde doit accepter le fait qu’elle ne pourra pas construire tous les projets qu’elle a planifiés. Elle doit déterminer des priorités en prenant en compte la capacité cumulative de l’environnement. En d’autres termes, elle doit évaluer la quantité d’eau que des projets hydroélectriques peuvent puiser tout en assurant la continuité du flux naturel des rivières. Elle ne doit autoriser que les projets qui ne font aucun compromis avec l’environnement et les conditions de vie de la population. Ce n’est actuellement pas le cas : chaque ruisseau et chaque district sont considérés comme disponibles. En Arunachal Pradesh il n’y a pas moins de 10 projets sur chaque torrent, près de 150 protocoles d’accord ont été signés, devant générer en tout 50.000 MW (soit près d’un tiers de la production actuelle du pays). Dans le seul « block » (unité administrative) de Dabra, au Chhattisgarh, il y a neuf projets thermoélectriques dans un rayon de 10 km. Des protocoles d’accord ont été signés pour 49 projets dans le district de Janjgir-Champa au Chhattisgarh. Cette folie doit cesser.

Enfin l’Inde doit améliorer l’efficacité des organes de régulation environnementale afin qu’ils prennent des décisions justes et claires. Les projets doivent être mieux analysés et l’évaluation doit être crédible aux yeux de la population.

Nous devons d’abord prendre conscience de la nécessité de changer le jeu du développement. Alors seulement y aura-t-il de la lumière.

Palabras claves

electricidad, política energética, producción de energía


, India

Notas

Lire l’article original en anglais : See the light

Traduction : Valérie FERNANDO

Fuente

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Sunita NARAIN, « See the light », in Down To Earth, 15 août 2010

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